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La pensée est toujours une affaire de préposition.
Entendons le terme « préposition » en deux sens à la fois : 1) préposition au sens linguistique, et je souligne d'emblée que c'est sur la préposition à plutôt que sur d'autres que va s'appuyer cet ouvrage dont la tâche est d'éclairer pourquoi nous mettons aujourd'hui l'accent sur cette préposition ; et 2) pré-position, c'est-à-dire le mouvement ou l'élan presque fluide et libre avant qu'on prenne (une) position ou qu'on s'y fixe.
Et par le terme « pensée », je ne veux pas dire la pensée au sens d'un système philosophique qui se démontre dans un livre ou un essai. Une telle pensée n'est ni la pensée à son origine ni la pensée dans ses aventures. Cette pensée-là, et qu'on peut appeler « en papier » en suivant Derrida, n'est en somme que superficiellement structurée ou positionnée (d')après des révisions et des raffinements.
Contrairement à la pensée « en papier », je pense à la pensée qua pensée, c'est-à-dire la pensée en train de se penser ou de se « faire », qu'on dirait avant et après tout prépositionnelle.
D'une part, on dit qu'« on pense à quelque chose » quand il s'agit du premier surgissement des idées à propos de la chose en question. D'autre part, et bien qu'on puisse dans ce cas-là avoir un semblant de position par rapport à la chose à laquelle on consacre la pensée, cette « position » n'est qu'en formation et n'est pas strictement formée. À cet égard, il n'y pas ainsi une position mais plus exactement un positionnement. Et tant que la pensée est en train de se penser, elle reste toujours prépositionnelle : elle s'ouvre à toutes possibilités, trajectoires, directions et à toutes révisions, voire au changement d'idées.
La pensée de la préposition/pré-position, sinon l'idée de la pensée en tant que préposition/pré-position, ne manque pas dans les oeuvres des penseurs français contemporains, notamment celles de Jacques Derrida, de Luce Irigaray et de Jean-Luc Nancy. Je laisse pourtant cet idiome à venir, n'oubliant pas ceux qui par leurs travaux contribueront à son émergence. Car l'enjeu en général de la préposition à est sa force d'ouverture. La préposition à fait ouvrir ce qui est fermé, et c'est en ce sens qu'on peut dire qu'elle s'approche de la déclosion de Nancy.
Autrement dit, la préposition à est à la fois l'espace et le temps d'ouverture. Elle s'ouvre toujours elle-même à toute altérité, à n'importe quoi, à n'importe qui, à n'importe quel lieu, à n'importe quel moment. Ou bien, simplement, elle s'ouvre à l'infini. C'est justement cette force d'ouverture que la préposition à, plus que d'autres, attire chez les penseurs français contemporains et qui nous intéresse ici. Nous verrons ainsi comment, avec ce à, repenser ou penser à nouveau l'ontologie, l'éthique et la politique.
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