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En 2024, dans une Serbie devenue un État totalitaire, Bojan Radic, jeune professeur d'anglais au chômage, est contacté par Velibor Stretenovic, chef du Service national de la Sécurité, pour enseigner l'anglais à ses enfants, langue pourtant interdite de l'Occident ennemi. D'abord sur ses gardes, Bojan se rapproche de Stretenovic et commence à voir d'un meilleur jour la politique du Gouvernement de l'Unité populaire dont la devise est : UNITÉ FOI LIBERTÉ. Mais quand Bojan perd la confiance de Stretenovic, suite à sa rencontre avec Vesna, jeune femme séropositive, c'est le début d'une descente aux enfers.
Sur les traces du 1984 de Georges Orwell, L'Égout donne une vision étourdissante d'un sombre avenir.
On n’entend plus parler de la Serbie. Comment vit-on à Belgrade aujourd’hui ? Quinze ans après les cent cinquante mille morts et quatre millions de personnes déplacées des « guerres de Yougoslavie », j’avoue que je n’en sais rien. Nos chers medias, champions autoproclamés du décryptage et de l’investigation, sont partis se poser comme un essaim de mouches sur une autre plaie. L’Egout, écrit en 2009 et qui parait en français ces jours-ci, en donne une vision intéressante dont la couleur dominante est le noir. L’adjectif est utilisé soixante deux fois ce qui, en un peu moins de deux cents pages, est considérable.
C’est un roman d’anticipation, dans lequel l’auteur décrit la Serbie de 2024 comme un état devenu totalitaire dont la plus grande fierté est d’avoir réconcilié Communisme et Nationalisme. Je dois dire que la démonstration en est assez réussie, en particulier lorsque le chef de la police secrète explique que les deux idéologies ne différaient que sur deux points : la question religieuse (athéisme ou orthodoxie) et la propriété (collective ou individuelle). Tout le reste était commun (recherche de l’unité, primauté du peuple, système centralisateur, police, armée et justice musclées, rejet de l’Occident, de ses valeurs décadentes et de ses comportements déviants). En nationalisant et en associant étroitement l’église orthodoxe au pouvoir la synthèse était réussie et acceptée. L’auteur nous propose une vision « orwellienne » d’un communisme religieux ou d’un nationalisme collectiviste.
C’est très noir, bien écrit avec un ton parfois très ironique qui correspond bien au destin individuel du héros dont la descente aux enfers lui fait côtoyer toutes les tares, toutes les bassesses, toutes les infamies qui ont pu s’abriter et qui s’abritent encore derrière ces idéologies cauchemardesques. L’éditeur nous dit que l’auteur est actuellement enseignant à Istambul. Sans doute est-ce l’occasion pour lui de s’approcher encore un peu plus de son anticipation.
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