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«S i Jean-Marc Roberts me fut proche, c'est parce que je lisais ses livres et qu'il éditait les miens.
On ne saurait parler d'amitié ou même de sentiment. Le rapport était plus théorique, plus passionnant, plus mystérieux.
La mémoire est un charme, elle ne ment pas sur le sien.
Je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui incarne autant la notion de personnage, déportant la fiction dans la vie, vivant dans les virtualités de ses doubles, aussi présent qu'insaisissable. Quand il disait mentir tout le temps, il mentait encore.
Il aimait chanter et danser dans un métier qu'on dit souvent aphone et figé. À sa mort, à 58 ans, en mars 2013, la presse l'a salué comme le dernier aventurier d'une profession. François Hollande s'est souvenu de son audace. Généralement, la mort d'un patron n'émeut pas tant. Une telle unanimité en dit long, mais pas assez.
Roberts, c'était l'espoir, le jeu, l'exception contre la règle, la liberté du « on s'en branle, on les emmerde », une certaine noirceur aussi, une curieuse solitude d'écrivain.
Il venait d'ailleurs, d'un autre temps, même s'il ne fut jamais vieux. L'éternel jeune homme qui avait débuté dans les années 70 répétait souvent : « Tout est possible.
» Le livre est le monde de tous les possibles.
Penser à lui, c'est penser aux pouvoirs de la littérature, aux visages de l'écriture, à ce que ces mots recouvrent depuis vingt, trente ou quarante ans, pour le meilleur et pour le pire, dans l'espace social et celui de la critique littéraire.
C'est penser, par réfraction, à Pier Paolo Pasolini, à Guy Debord, à d'autres irréductibles.
C'est évoquer des maladies contemporaines (nostalgie, idéologie, parodie) et cette récurrente tumeur nationale nommée « rentrée littéraire » qui s'aggrave chaque automne d'une épidémie de prix littéraires. Un écrivain, cela n'a jamais été un premier de la classe - encore moins un mouchard.
Et comme on en est au littéraire, il n'est pas inutile de préciser que La Mort de Jean-Marc Roberts se tiendra loin du milieu.
Ce n'est pas non plus un hommage, le genre ne lui seyait guère.
Ce n'est évidemment pas une autofiction. Je laisse à d'autres le soin de iacuber Roberts, selon les méthodes de plus en plus douteuses d'un genre qui fut l'un de ses labels et qui a contribué à brouiller les lignes.
Jean-Marc Roberts est parti à l'heure où certains annoncent, avec un trouble soulagement, la fin du livre et du papier. D'autres dramatisent et spéculent sur l'agonie de la littérature. Tous sont plus morts que lui. » Jean-Marc PARISIS
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