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À la différence d'Emmanuel Lévinas qui ne cesse dans son oeuvre de méditer la tradition hébraïque, Hannah Arendt n'en appelle pas à une source juive.
Ne reniant pas sa judéité, elle indique pourtant en 1963 que " s'il fallait que je sois venue de quelque part, c'est de la tradition allemande ". Tout est-il dit dans cette affirmation ? Non. Le monde séculier, ou monde politique de la cité de tous, est certes l'horizon de la pensée de Hannah Arendt, mais ce monde séculier et politique est vu à partir d'une sensibilité juive marquée par les impasses et les désastres qu'ont connus les juifs.
Relisant Hannah Arendt, Martine Leibovici s'attache alors à montrer ce qu'est le monde pour la tradition juive. Dans l'histoire européenne, le judaïsme n'a pas exercé le pouvoir politique. Pour lui, le monde politique et séculier est extérieur, référé à la Grèce et marqué par la tradition chrétienne, notamment le conflit de la Cité de Dieu et de la Cité terrestre cher à saint Augustin auquel Hannah Arendt avait consacré sa thèse de doctorat et qui se tient aussi derrière la sécularisation moderne.
Au gré de la relecture d'Arendt, c'est finalement la question de la signification du politique dans le monde moderne qui est posée. Oscillant entre impossible restauration d'une tradition, certaines formes de sionisme, les ambivalences du messianisme et le risque d'une assimilation ou d'une dissolution, le judaïsme relance à sa manière une question qui concerne chacun dans la modernité séculière affirmée à partir des Lumières européennes.
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