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« C'est un carnet à couverture noire que j'ai toujours sur moi et dans lequel j'écris chaque jour mes doutes, mes étonnements et mes colères. J'y ébauche aussi des articles, des chapitres de roman, des contes, des recettes de cuisine, des déclarations d'intention. Lorsque j'arrive à la fin des pages que j'ai noircies et que je les relis, telle une brève cérémonie des adieux avant d'étrenner un nouveau carnet, je découvre que je n'ai pas perdu ma capacité d'étonnement. Les textes qui suivent sont extraits de trois carnets de moleskine que j'ai remplis entre janvier 2002 et janvier 2004 et depuis lors, comme l'écrivait Van Gogh à son frère Théo : " Les moulins ne sont plus là mais le vent est toujours le même." Les histoires que nous raconte ici L. Sepúlveda forment un ensemble d'émotions diverses mais cohérentes parcourues par le fil rouge de l'indignation devant les crimes impunis, la violence et l'intolérance. En contrepoint de cette critique indignée, il place le plaisir du souvenir des amis bien-aimés : Coloane, Vásquez Montalbán... ou de courts récits drôles ou émouvants : un épisode de l'enfance, un frère, un match de boxe, un chien perdu...
En témoignant de l'une des périodes les plus troubles de notre histoire récente, L. Sepúlveda montre une inaltérable passion politique mais laisse affleurer la vocation de narrateur, dans laquelle il trouve depuis toujours "le plus infini des horizons : celui de la créativité littéraire."
Grande lectrice de romans, je me suis laissée tenter par le recueil de Luis Sepulveda, contenant ses « notes d’un carnet de moleskine » dans lequel il consigne « ses doutes, ses étonnements, ses colères ». Auteur chilien engagé, condamné à 28 ans de détention sous la dictature de Pinochet, il est emprisonné plusieurs mois et finalement exilé en Suède. Il est passionné de politique et militant, mais c’est son talent d’auteur et son humanité que je retiendrai ici pour présenter cet ensemble de textes courts, portant sur la période de 2002 à 2004 à travers le monde.
Les sujets, souvent traités sur deux ou trois pages, sont hétéroclites. Des questions politiques, l’Irak et la politique de Bush, Israël et Sharon, Aznar, Berlusconi… les 11 septembre, 1973 et 2002. « Le jour maudit », une même date pour la prise de pouvoir de Pinochet au Chili, et les attentats aux Etats-Unis. Pas de point commun dit-il, « mes camarades savaient pourquoi on les tuait, ils savaient que c’était là le prix à payer pour rêver d’un monde meilleur, en revanche, les pauvres victimes du World Trade Center n’ont pas su pourquoi elles mouraient ».
Dans ce carnet, il est aussi question de « droits et devoirs », envers la nature ou les animaux comme « l’histoire classique et sa fin prévisible d’un clébard abandonné sur la route et écrabouillé par un camion… », ou de « Papa Ernest », Hemingway et « le vieil homme et la mer , le grand roman de la dignité d’un homme , mais également « la vieille Europe » et bien d’autres thèmes si brièvement traités et pourtant si percutants lorsqu’ils proposent au lecteur quelques instants de réflexion.
Ce livre fut une vraie découverte qui a attisé ma curiosité et que je recommande vivement. En dehors de toute idéologie, j’ai rencontré un écrivain plein d’humanité.
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