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Porté par le succès de L'oiseau, L'insecte, tiré d'emblée à 8000 exemplaires, paraît le 17 octobre 1857 chez Hachette. Le livre relève une gageure, celle de s'intéresser à des créatures mal-aimées et effrayantes, moins connues aussi, ce qui pouvait en revanche susciter la curiosité. Comme dans l'Oiseau, les connaissances scientifiques sont exposées d'une façon qui laisse place à l'interprétation métaphorique : l'insecte est ce travailleur chargé d'outils (pinces, scies) avançant souvent en légions innombrables qui comme le peuple, et pour la même raison, parce qu'on le connaît mal, peut faire peur. Si les masses, selon la conception de Michelet, font l'histoire, les insectes (ces « multitudes infimes ») font le globe : il insiste sur la fonction essentielle de l'insecte dans le cycle de la nature. « Cet imperceptible constructeur » est aussi l'épurateur, celui qui transforme toutes les matières en décomposition. Il a donc un lien privilégié avec la mort, et par là avec la renaissance. Conception cyclique, chère à Michelet, où le peuple, abattu, opprimé, toujours renaît de ses cendres. L'insecte parle donc de la résurrection et de l'immortalité. Il prouve dans ses métamorphoses la pérennité de l'être à travers des crises qui paraissent autant de morts. Il est aussi la seule créature vivante, excepté l'homme, Michelet le démontre par l'observation des fourmis et des abeilles, à atteindre « le but le plus élevé », celui de la Cité. L'historien vante l'aptitude à la construction des abeilles, le sens de l'organisation sociale qui préside à la destinée des communautés de fourmis, et par là amorce une réflexion qui lui est chère celle de la personnalité morale des animaux. Propos qui se reflètent aujourd'hui, avec succès, dans le travail d'une Elisabeth de Fontenay, par exemple. Avant l'homme, l'insecte a compris comment éluder la mort : en créant la société. Par l'observation, l'homme doit s'efforcer de respecter la « personne » et la vie de ces infimes créatures dont certaines menacées aujourd'hui pourrait signifier sa propre disparition. En étudiant l'insecte avec la précision qui le caractérise, Michelet livre un merveilleux éloge de la nature, de ses profondeurs et de ses soubassements, dans la lignée d'une oeuvre qui toujours pose la question de la communauté et de l'organisation sociale du vivant.
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