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Pour connaître une ville, pour la comprendre, il faut passer par sa gare routière. Élise Hugueny-Léger livre le récit de l'entre-deux permanent, entre un pays, la France, et un autre, le Royaume-Uni, entre deux cultures, deux manières de parler, de lire, d'entendre, d'écrire ou encore de rêver, mais aussi entre le monde extérieur et celui des pensées et des souvenirs.
Peut-on vivre dans une bulle et ressentir malgré tout les pulsations du monde, sans la faire éclater ? Cette question posée par l'auteure de cet ouvrage résume sans doute sa contradiction interne à travers un récit de l'entre-deux permanent, entre un pays, la France, et un autre, le Royaume-Uni, entre deux cultures, mais aussi entre le monde extérieur et celui des pensées et des souvenirs.
Sous l'allure d'un petit journal intime ou récit de vie d'une femme de quarante ans, Élise Hugueny-Léger, à la double appartenance et au parcours de vie découpé, Twenty Twenty abrite une réflexion sur le quotidien, celui de l'auteure mais aussi sur le quotidien de millions de Français et de Britanniques du XXIe siècle et de ses crises importantes. Une sociologie des actualités des années 1980 à 2020 se déploie à travers un regard singulier et unique qu'est celui de cette femme partagée entre deux espaces et deux temps, habitant le monde à sa façon, au gré de ses pérégrinations entre la France et le Royaume-Uni, leurs deux manières de parler, de lire, d'entendre, d'écrire ou encore de rêver, en regardant défiler les paysages par la vitre du train. Le paysage n'est jamais que du temps qu'on parcourt avec les yeux.
La narratrice semble en effet parcourir le monde physiquement, spirituellement, et par la linguistique avant tout : la notion de jeu linguistique est très présente par le passage fréquent de l'auteure d'une langue à une autre. Comment faire entendre en français des phrases, sonorités, tournures britanniques, et à travers elles, une vie sociale, des habitudes, une culture ? Le lecteur est alors interrogé sur le fait d'être étranger , de se sentir étranger au sens où même installé quelque part on le demeure ; c'est en partie un texte qui parle d'émigration et immigration, de n'être jamais tout à fait chez soi ou chez l'autre. L'auteure forme presque une troisième langue propre à la manière d'appréhender le monde quand on est entre deux pays.
Notons que le stream of consciousness , visant à dépeindre les innombrables pensées et sentiments qui traversent l'esprit d'un narrateur selon Daniel Oliver, raconte précisément ce mode narratif utilisé par l'auteure qui ne cesse de confondre ses pensées ou ses souvenirs dans ses itinérances en un flux de conscience traduit par les mots. Pour connaître une ville, pour la comprendre, il faut passer par sa gare routière. Les mots, seule forme permanente de la pensée, survivent au temps et à l'espace.
Words so I don't fall. L'auteure semble s'y accrocher et y suspendre des voyages et des rencontres, des morceaux de vie bien réels, pourtant toujours ailleurs.
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