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Troisiemes noces

Couverture du livre « Troisiemes noces » de Tom Lanoye aux éditions La Difference
Résumé:

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Avis (1)

  • Maarten est un homme revenu de tout, désabusé qui n'a plus foi en rien et qui ne se remet pas de la mort de Gaëtan qu'il a accompagné jusqu'au bout. Ce livre est le récit de sa nouvelle vie avec Tamara, avec de très nombreux retours sur sa vie avec Gaëtan. Ce n'est pas un livre fondamentalement...
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    Maarten est un homme revenu de tout, désabusé qui n'a plus foi en rien et qui ne se remet pas de la mort de Gaëtan qu'il a accompagné jusqu'au bout. Ce livre est le récit de sa nouvelle vie avec Tamara, avec de très nombreux retours sur sa vie avec Gaëtan. Ce n'est pas un livre fondamentalement joyeux, mais Tom Lanoye manie autant et aussi bien le cynisme que la mélancolie, ou encore le réalisme et l'humour : "Ils [les voisins mormons] nous regardaient avec mépris, Gaëtan et moi, ils tenaient leur chien étroitement en laisse et ils se plaignaient quotidiennement chez l'épicier de la présence d'un dangereux pédophile à côté de leur porte. Ou plutôt, de deux pédophiles. Jusqu'au jour où ils ont vu l'épicier faire un French kiss à son petit ami derrière le comptoir des primeurs. Ce n'est pas pour rien que j'habite le quartier le plus hype de la ville. La hypetitude d'un quartier se mesure à l'aune des préférences sexuelles de ses épiciers." (p. 51/52). A noter également que la scène du "oui" à l'église et du baiser après l'échange des consentements est irrésistible de drôlerie : les hésitations du futur marié entrecoupées de souvenirs et l’impatience de la jeune épousée.
    Malgré sa misanthropie, Maarten va devoir habiter avec Tamara qui abandonne sa timidité pour s'imposer dans la maison. Petit à petit, en des pages magnifiques, chacun s'apprivoise, découvre l'autre et se dévoile, pudique ou impudique, met à nu ses peurs, ses faiblesses, ses angoisses, ses forces. Dans un premier temps, c'est Maarten qui se montre, puis il apprend à découvrir Tamara, peut-être pas si faible et victime qu'elle veut bien le montrer.
    Ce qu’il y a de formidable dans ce livre, c’est que Tom Lanoye ne se censure pas, il aborde toutes les questions existentielles : la naissance -la mère de Maarten est morte en couches-, la filiation, l'homosexualité -la vie au quotidien la perception par les hétéros-, l'amour, la mort, très présente par celle de Gaëtan et la maladie de Maarten. Il parle aussi de racisme, d’acceptation d’autrui, du repli sur soi, de la recherche d’identité, de la culture et de sa globalisation, de son étêtement à cause des émissions ou séries télévisées dont on nous abreuve : "Le tissu de saloperies les plus prévisibles sorti des fabriques à fables des faiseurs de fric anglo-saxons, qui exterminent tout talent comme un éleveur de volaille éradique à titre préventif, avec des tonnes d'antibiotiques, la pneumonie aviaire chez son gagne-pain caquetant. Toute vie doit en être éliminée ! Tout ce qui n'est pas naturel, peu agréable, inexorablement tragique, fragmentaire, fantastique, désespérément compliqué ou sortant de l'ordinaire -disons carrément toute authenticité et tout risque- doit être noyé dans le sirupeux et le pleurnichard, en formats fixes rassurants et en schémas sans aucun fond de spiritualité." (p. 226) Un extrait qui me fait penser à certaines tirades de Pierre Desproges, dans le ton et le fond.

    Je découvre avec ce roman formidable (écrit en 2006) l’écriture de Tom Lanoye, qui peut être légère, poétique, violente et crue ; il varie les niveaux de langage, alterne de belles phrases travaillées avec des plus courtes, plus punchies, qui peuvent choquer ; certains propos sont bruts, mais toujours magistralement écrits (donc traduits). L’auteur ne fait pas dans le politiquement correct, et ça fait un bien fou, il critique la société belge, puisqu’il est Flamand, mais, en tant que proches voisins, on peut se sentir concernés à raison. Lire Tom Lanoye n’est pas un acte de tout repos, ça remue et ça interpelle. Ses personnages sont attachants, fort bien décrits, profonds et tourmentés, réalistes ; ils sont de ceux qui restent un peu –ou beaucoup- en nous lecteurs pendant de longs moments après les avoir quittés à regret.

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