"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Melchor quitte provisoirement sa Terra Alta d'adoption pour venir prêter main-forte aux services de police de Barcelone dans une affaire de tentative d'extorsion de fonds basée sur l'existence présumée d'une sextape. L'enquête doit être menée avec célérité et discrétion car la victime est la maire de la ville.
L'inspecteur plonge alors dans l'univers de la haute bourgeoisie catalane et de ses rejetons élevés au-dessus des lois. Protégées par un clan qui leur assure une impunité de classe, ces âmes si bien nées connaissent peu de limites et la vie des sans-grades leur est parfaitement indifférente. Sous un vernis de raffinement, ces privilégiés n'ont rien à envier aux prostituées et aux junkies peuplant les bas-fonds qui ont vu naître l'enquêteur. Et quand le chantage est assorti d'une demande de démission de l'édile, il apparaît évident qu'il est le fruit d'une manoeuvre politique visant à déstabiliser la mairie pour favoriser quelques intérêts. L'indéfectible intégrité de Melchor est mise à rude épreuve au contact des rouages du pouvoir, là où règnent le cynisme, l'ambition décomplexée et l'arrogance des nantis.
Indépendance est un roman furieux qui brosse un portrait sans fard des élites politiques et économiques barcelonaises et vient épingler un mouvement souverainiste qui, en guise d'indépendance, entendrait surtout préserver celle de sa caste.
Je découvre l’auteur avec ce second opus de la trilogie Terra Alta. Un livre mis en avant par ma librairie préférée et dont la quatrième de couverture me tentait.
Pensez donc : un polar se déroulant dans les arcanes du milieu indépendantiste catalan.
J’ai découvert le personnage principal Melchor Merlin au passé agité ; sa fille Cosette prénommée ainsi car Melchor est un fan des Misérables ; la fin tragique de sa mère et son passé de délinquant pour un cartel sud-américain.
Je l’ai suivi lors de cette enquête à Barcelone pour découvrir qui fait chanter la maire, et pourquoi.
J’ai aimé écouter le mystérieux informateur qui nous révèle le pourquoi du comment, et j’ai eu de la peine pour lui qui a souvent fait les mauvais choix.
J’ai découvert le Monero, une crypto-monnaie open source intraçable (la maire doit payer la rançon en Monero).
J’ai découvert que Barcelone était une des porte d’entrée du narco-trafique : Melchor a fait partie d’un gang et l’unité dans laquelle il travaille pour cette enquête s’occupe également de faire libérer l’épouse du narcotrafiquant de Santa Coloma.
J’ai souri chaque fois que l’on demande à Melchor si il a lu le roman de Javier CERCAS Terra Alta, qui parle de lui et de sa précédente enquête.
Comme lui, je ne l’ai pas encore lu, mais cela ne serait tarder.
Quelques citations :
… quand la démocratie a démarré, le nationalisme a instauré en Catalogne une cleptocratie clientéliste. C’est-à-dire, le gouvernement autonome volait les citoyens et le produit du pillage était réparti entre le parti du gouvernement et les familles du parti du gouvernement, à commencer par la famille du président. (…) enfin, toujours les mêmes salades : tout pour la patreie et ce genre de fadaises. (p.180)
A la Generalitat, nous avions notre homme, Artur Mas. Un type bien. L’un des nôtres qui parlait même castillan à la maison, comme nous. Mais les choses se sont compliqués et Mas a été chassé de la présidence, laissant derrière lui Puigdemont, un moins que rien de province, qui n’avait rien à faire là et qui n’avait ni pouvoir, ni respect, ni ascendant. Nous tenions tous pour acquis le fait que Mas le contrôlerait sans problème, mais nous nous sommes trompés. parce que Puigdemont était un croyant, un taliban qui prenait absolument au sérieux ce qui pour nous n’était qu’un leurre, une stratégie destinée à nous faire sortir sans dégâts de la crise. Pour lui, ce n’était pas pareil : il était prêt à aller jusqu’au bout, coûte que coûte, ou bien en craignant davantage de ne pas le faire que de le faire. Bref, un désastre. (p.301)
L’image que je retiendrai :
Celle des 3 amis issus de bonne famille qui se lance en politique pour continuer d’avoir le pouvoir sur la ville.
https://www.alexmotamots.fr/independance-javier-cercas/
Embarqué dans Indépendance, le second tome de la trilogie consacrée à Melchor Marín, ce policier passionné par Les Misérables, de Victor Hugo - livre que Melchor a découvert en prison – j’ai encore été comblé.
Javier Cercas poursuit donc Terra Alta, un livre dont Melchor entend parler à plusieurs reprises. Taquin, l’auteur lance quelques clins d’œil à son premier livre qui alternait entre cette comarque et la capitale de la Catalogne.
Fidèle à son style percutant, Javier Cercas débute Indépendance par une scène terrible d’efficacité, montrant Melchor en pleine action pour faire cesser la prostitution de jeunes africaines mineures ou à peine majeures.
Le rythme du récit ralentit ensuite un peu car il faut bien rappeler l’essentiel de ce qui s’est passé pour celles et ceux qui n’auraient pas lu Terra Alta. D’ailleurs, c’est aussi utile pour les autres…
Melchor, toujours flic, est de plus en plus passionné de lecture. Cette activité, en plus, le rattache à Olga (1978-2021), son épouse qui était bibliothécaire. Il élève seul Cosette, leur fille, depuis que sa mère a été tuée ou plutôt assassinée en pleine rue, par une voiture, quatre ans plus tôt.
Bien qu’il ait été muté en Terra Alta pour sa sécurité après avoir abattu des islamistes en 2017, il demande à retourner à Barcelone, à l’unité des enlèvements et extorsions.
Melchor n’a pas oublié l’assassinat de sa mère qui se prostituait dans la ville. Il ne désespère pas de retrouver les ordures qui lui ont fait subir une mort atroce.
Dans sa nouvelle affectation, Melchor retrouve Blai qui le traite régulièrement d’ « Espagnolard » et lui confie une enquête bien délicate à propos de la maire de la ville, victime d’un chantage à propos d’une vidéo de sexe.
Vivales, personnage important de l’histoire, est un avocat qui défend les pauvres et les opprimés. C’est lui qui a sorti Melchor de l’ornière où il se trouvait et c’est chez lui, à Barcelone, que Melchor et Cosette logent, Vivales se révélant un père de substitution chaque fois que Melchor est empêché par son enquête.
Mais, que se passe-t-il ? Javier Cercas, romancier habile, glisse une discussion très intéressante entre deux hommes. Même si je me doute de l’identité de celui qui écoute, je suis vite passionné par les révélations de son confident. Cet homme décortique patiemment, avec force détails, toutes les turpitudes de la haute bourgeoisie barcelonaise. Ces gens ont l’argent et le pouvoir. Ils tentent même de revendiquer l’indépendance de leur province, ce qui sera un fiasco monumental. L’inconnu raconte, parle de Vidal, Casas et Rosell, fils de grandes et belles familles... Lui, fils d’un député de gauche, faisant partie du groupe socialiste, à Madrid, est tout heureux d’être accepté par le trio.
Il faut lire ces révélations puis retomber dans l’enquête minutieuse de Melchor, attendre impatiemment le retour des confidences, jolie façon de mener Indépendance. Javier Cercas va même plus loin en fin d’ouvrage puisqu’il mêle même la fin des révélations aux discussions menées dans le feu de l’action.
Avec un souci du détail honorable, Javier Cercas me promène dans les rues de Barcelone puis dans toute la Catalogne, m’emmenant même jusqu’en Andorre. Cela vaudrait le coup de mettre au point un circuit qui permettrait de découvrir la ville, même si un crochet par les Ramblas me rappelle de bons souvenirs.
Chapeau Monsieur Cercas !
Chronique illustrée à retrouver sur https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2023/04/javier-cercas-independance.html
Deuxième volet d’une trilogie débutée avec Terra Alta en 2021, on retrouve avec un immense plaisir Melchor Marin, policier et homme contradictoire au passé compliqué. Melchor aime la littérature du XIXème, au point que « Les misérables » est devenu son vade-mecum et que sa fille s’appelle Cosette. Il envisage d’ailleurs sérieusement de devenir bibliothécaire. A côté de ça, il ne peut s’empêcher de tabasser incognito les hommes qui cognent les femmes. Tout ça s’explique par son histoire personnelle dont je ne vous dirais rien ; il faut découvrir la psyché ténébreuse de ce personnage en lisant Cercas.
Melchor retourne à Barcelone pour enquêter sur une affaire de chantage. La maire de la ville voit une vieille vidéo à caractère sexuel menacer de refaire surface . S’agit-il d’une simple extorsion d’argent ou d’une tentative de déstabilisation politique ? Pour le découvrir, le policier va entrer dans les cercles du pouvoir et rencontrer la haute bourgeoise catalane qui se croit tout permis depuis toujours.•
Cynisme, ambition, corruption systématique et généralisée, absence de scrupule… C’est moche, très moche.
« Indépendance » n’est donc pas un simple roman policier. C’est un livre anti système. Un portrait affreusement réaliste de l’élite barcelonaise (mais sans doute transposable à d’autres lieux), un plaidoyer contre la tyrannie des nantis, une critique de l’argent qui domine le monde et de la démocratie corrompue. Rien n’échappe à Cercas et ça fait mouche.
Nul besoin d’avoir lu le premier tome pour se jeter sur cette enquête haletante. L’auteur replace petit à petit le passé de son personnage et les relations avec les autres protagonistes sont rappelées au cours du récit. J’attends déjà avec impatience le 3ème opus pour continuer à découvrir la réflexion romanesque de Cercas sur l’histoire de l’Espagne, thème central de son œuvre depuis toujours.
Traduit par Aleksandar Grujicic et Karine Louesdon
Après Terra Alta, Indépendance est le deuxième tome d’une trilogie policière. M’en étant rendue compte trop tard, et bien qu’il puisse aisément se lire indépendamment, je n’ai qu’une hâte, me plonger maintenant, rapidement dans le premier.
Melchor Marín, fils d’une prostituée a connu la prison avant d’entrer dans la police pour venger les assassins de sa mère. Après s’être montré héroïque en abattant quatre terroristes lors d’un attentat islamiste à Cambrils en 2017, il avait été affecté au commissariat de Gandesa en Terra Alta, une comarque à l'extrême sud de la Catalogne, une région supposée paisible.
Si la placidité rurale du commissariat lui fait beaucoup de bien, il n’en sera plus de même après la mort de sa femme Olga. Il demande alors d’être muté à Barcelone où il part avec son enfant Cosette. Puis, ne pouvant se défaire de ses pires souvenirs, il décide de retourner en Terra Alta.
2025. Alors qu’il songe à changer de carrière et à devenir bibliothécaire, tant il aime les livres, « Les Misérables » de Victor Hugo ayant bouleversé son existence, il doit à nouveau, quitter provisoirement sa terre d’adoption, appelé pour prêter main-forte aux services de police de Barcelone, où il doit intégrer momentanément l'équipe de l'unité centrale des enlèvements et extorsions.
L’inspecteur Melchor se retrouve alors au cœur d’une enquête où la célérité et la discrétion sont de mise, la victime étant la maire de la ville.
Celle-ci, Virginia Oliver, est victime d’un chantage à la « sextape », chantage financier qui va rapidement être assorti d’une demande de démission de l’édile. Il apparaît évident qu’il est le fruit d’une manœuvre politique visant à déstabiliser la mairie pour favoriser quelques intérêts.
Très vite, l’inspecteur est sur la piste de trois hommes de pouvoir, issus des familles les plus puissantes de Barcelone et d’un quatrième issu d’un milieu moins favorisé que ces derniers. Melchor va devoir déterminer si les motifs de l’extorsion de fonds sont financiers, politiques, ou personnels, tout étant intimement mêlé.
En plaçant son enquête au sein de la haute bourgeoisie catalane, Javier Cercas met en évidence le cynisme et la corruption de cette caste de privilégiés à l’ambition décomplexée et démesurée. Il fait ainsi une violente critique de ces élites politiques et économiques barcelonaises qui se croient et la plupart du temps le sont, au-dessus des lois.
Javier Cercas porte un regard noir sur le monde politique espagnol et sur ce mouvement qui, en guise d’indépendance entendrait avant tout conserver celle de sa caste et c’est l’histoire récente du pays qui est présente tout au long de son récit avec notamment « le Procés », procès durant lequel des indépendantistes catalans ont été jugés devant la Cour suprême espagnole pour leur rôle dans la tentative de sécession d’octobre 2017.
Il est également beaucoup question de lutte des classes dans Indépendance avec une société où il y a les riches et ceux qui aspirent à l’être.
Javier Cercas sait parfaitement entretenir le suspense tout au long de son roman tout en livrant une analyse assez fine d’un mouvement régionaliste qui flirte avec le populisme. Pour moi, cette analyse inscrite au cœur de l’enquête donne toute sa saveur et son intérêt au polar.
Beaucoup de psychologie émaille ce roman avec des personnages jamais simples. S’ils ne sont pas bipolaires comme le sergent Vàszquez, ils sont souvent hantés par leur passé ou prisonniers de leurs secrets. Mais s’il est un personnage attachant dans ce roman, c’est bien l’inspecteur Melchor, cet homme dont l’indéfectible intégrité est mise à rude épreuve au contact des rouages du pouvoir où cynisme et opportunisme sont de mise. Comment ne pas être en empathie avec cet homme, qui, lors d’une courte peine de prison, grâce à son avocat, découvre Les Misérables de Victor Hugo, s’identifie à Javert et devient policier ensuite pour venger la mort de sa mère.
Ce livre est d’ailleurs un magnifique hommage aux écrivains et je laisse à Melchor le soin de nous délivrer ce message : « Alors, pour finir, je vous raconterai ce que j’ai aussi appris en lisant des romans. Ce que j’ai appris, c’est que les romans ne servent à rien. Ils ne racontent même pas les choses telles qu’elles sont mais comment elles auraient pu être, ou comment nous aimerions qu’elles soient. Et c’est comme ça qu’ils nous sauvent la vie. »
Indépendance est un polar politique à l’humour cinglant dans lequel Javier Cercas brosse un portrait terrible du monde politique espagnol, un monde mené par l’argent, une politique-fiction, violente critique des élites politiques corrompues.
Tome 2 de la trilogie en cours intitulée Terra Alta. Les 50 premières pages renouent avec le livre précédent nous rafraichissant la mémoire tout en nous préparant le cadre et le sujet traités dans ce nouveau volet ce qui permet aux lecteurs de lire cet excellent polar indépendamment de l’autre.
Javier Cercas qui nous a habitués à ses passionnants romans sans fiction aux questionnements multiples sur le franquisme et ses conséquences contemporaines, quitte le sujet pour, dit-il, ‘ne pas se plagier lui-même’.
Avec Terra Alta, il nous propose de suivre les enquêtes de Melchior Marin, un policier intelligent, sombre, secret, obstiné, attachant, hanté par l’affaire non élucidée du meurtre de sa mère, passionné par la lecture de romans du XIXème et tout particulièrement celle des Misérables de V. Hugo avec une attention particulière portée à Jean Valjean et Javert, héros et anti-héros confondus, qu’il tient comme exemples voire comme secours, au long de ses propres enquêtes difficiles.
Quand on connait Javier Cercas, on sait que sa fiction, soit-elle un polar, va plonger dans une part de réalité historique ou d’actualité, instruisant une vérité sur le terrain de l’imaginaire.
Le premier volume faisait ressortir la tristement célèbre bataille de l’Ebre, avec en jeu une vengeance dans un présent rattaché au passé comme si en sorte, le passé restait le présent.
Dans 'Indépendance', la récente crise catalane va emporter sa plume dans les systèmes politiques foireux, les arrangements entre des pourris, les arcanes des élections et du pouvoir, des classes sociales soumises et piégées par des ultra riches qui pensent être au-dessus des lois, ce, dans une intrigue puissante et passionnante qui plonge le lecteur dans le marigot politique barcelonais et les systèmes électoraux en général.
Pour en parler librement, il situe son livre en 2025 et imagine que la mairie de Barcelone est tenue par une femme qui s’adresse à la police car elle est rançonnée par des inconnus qui détiennent une sexe-tape la compromettant dangereusement.
Si déjà, j’avais été séduite par « Le mobile », un thriller époustouflant de Javier Cercas qui m’a fait lire tous ses livres, 'Indépendance' est absolument remarquable.
C’est un roman noir érudit, intelligent et savoureux qui ne se lâche pas.
Du grand Cercas !
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