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« Enchaînée par le cou à un arbre, privée de toute liberté, celle de bouger, de s'asseoir, de se lever ; celle de parler ou de se taire ; celle de boire ou de manger ; et même la plus élémentaire, celle d'assouvir les besoins de son corps...
J'ai pris conscience - après de longues années - que l'on garde tout de même la plus précieuse de toutes, la liberté que personne ne peut jamais vous ôter : celle de décider qui l'on veut être ». Même le silence a une fin raconte les six ans et demi de captivité d'Ingrid Betancourt dans la jungle colombienne aux mains des FARC. Récit intime d'une aventure qui ne ressemble à aucune autre, voyage hanté, palpitant du début à la fin, c'est aussi une méditation sur la condition des damnés - et sur ce qui fonde la nature humaine.
Tout a été dit et écrit sur Ingrid Betancourt. En l’espace de quelques mois, au sortir de sa captivité, elle est passée dans les médias français, de l’icône vénérée à la femme vénale décriée. Et puis, voici son livre, dans lequel elle égrène les différentes étapes qui ont jalonné sa captivité du 23 février 2002 au 2 juillet 2008. Plus de six années aux mains des FRAC, à subir ses geôliers et l’enfer moite de l’épaisseur de la jungle amazonienne où ils se cachaient.
Le premier chapitre débute par le récit de sa quatrième tentative d’évasion avortée en décembre 2002 et des représailles que sa fuite a engendré. Les quatre-vingts chapitres qui suivent décrivent sa terrible aventure, selon un fil plus chronologique, démarrant au jour de l’enlèvement et s’achevant par sa descente de l’avion, à l’instant même où elle tomba à genoux pour embrasser le sable du tarmac de Bogota.
Ingrid Betancourt, franco-colombienne, a choisi d’écrire ses douloureux souvenirs en français, langue qu’elle manie avec une réelle finesse qui mérite d’être signalée au passage. Elle s’explique en conclusion de son livre sur ce choix, dans une « Note de l’auteur », avant un bref remerciement fait à Susanna Lea pour son soutien dans l’écriture et deux cartes pour illustrer ses propos. Ce n’est toutefois pas tant la préférence accordée au français, mais bien quelque chose de plus diffus qui a retenu mon attention. En effet, j’ai été troublée par le fait que son récit soit si clair dans ces descriptions, qu’elle puisse raconter si précisément ses journées, ses rapports avec ses gardiens et ses codétenus et parallèlement garder cette distance émotionnelle et digne face à ces sinistres souvenirs.
Après chaque chapitre lu, chaque page tournée, une question lancinante n’a cessé de me tarauder « Et moi ? Qu’aurais-je fait, comment aurais-je résisté ? Aurais-je survécu aussi longtemps, à cet infernal environnement? »
Quoique nous en pensions, le récit d’Ingrid Betancourt restera un texte tout particulier, que j’ai parcouru avec le même respect ressenti pour Florence Aubenas, lors de sa conférence de presse du mardi 14 juin 2005, à son retour en France, suite à sa libération.
Un livre à lire, non pas pour chercher la vérité, mais bien pour comprendre ce à quoi peut se raccrocher, pendant tant de jours, une femme privée de liberté dans des conditions effrayantes et que des ravisseurs cruels et incultes ont tenté de réduire à l’état de simple numéro.
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