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(Pour notre époque, ce roman une histoire symptomatique : celle de deux amis qui ont dans un premier temps quelque difficulté à s'adapter à leur statut de nouveaux retraités..) .../ Max avait peu dormi et s'était levé de bonne heure pour préparer le petit-déjeuner, Alors qu'il peinait à trouver tout le nécessaire dans ce placards qu'il ne connaissait pas bien, il entendit un grand bruit provenant du couloir, suivi d'un juron à demi-étouffé.
Il se précipita et ne put retenir son rire en voyant Michel, les quatre fers en l'air au pied de l'escalier, en train de se masser la cheville gauche.
?T'es sympa toi, j'aurais pu me casser le cou.
?T'as l'air encore bien vivant pourtant.
Le ton était incertain. Max culpabilisait déjà de sa réaction réflexe. Heureusement son ami, pour qui la nuit avait été également plutôt courte, n'avait raté que la quatrième marche avant le bas et ce fut lui qui le rassura bien vite. Ils purent même rire ensemble de la mésaventure.
?Comment t'as fait ton compte ?
?Bah, j'ai l'esprit pas trop clair, je ne sais pas pourquoi.
?Eh bien, mon cochon ! Avec tout ce que t'as picolé hier, tu te demandes encore ce qui t'arrive ?
?J'aurais bu tant que ça, t'es sûr ?
Le regard en coin de Michel ne trompait pas et tous deux s'esclaffèrent de nouveau.
?Mais, restons sérieux, tu sais, Michel, tu devrais faire un peu plus attention ; ça va finir par te jouer des tours. Ta santé...
?Fiche-moi la paix avec ça. Je sais ce que je fais et pourquoi je le fais. Si t'as que ça à m'dire, tu peux te tirer !
?Ne te fâche pas, c'était juste pour toi...
?Bon, n'en parlons plus, mêle-toi de ce qui te regarde et allons plutôt boire un jus. T'as su l'faire au moins ?
?J'ai pas trouvé l'sucre.
?C'est donc ça, le ramdam qui m'a réveillé. De toute façon, j'm'en fous, j'en prends pas.
?Arrête de ne penser qu'à toi, sale égoïste.
Le ton était à nouveau celui de la plaisanterie et tous deux se dirigèrent vers la table dressée par Max.
Comme à son habitude, Michel se contenta d'un grand bol de café noir et d'un pain au chocolat ; les jours de grande faim il en mangeait deux. Max en revanche avait toujours un solide appétit et son repas se composait de sucré, certes : chocolatine, tartine de confiture, mais il le complétait volontiers de pain beurré et souvent de fromage.
Tandis que Michel noyait sa solitude plutôt dans le liquide et restait de corpulence mince, presque sèche, Max, lui, se jetait volontiers sur la nourriture et affichait un respectable embonpoint. Chacun résiste à sa manière aux vicissitudes de la vie.
C'était d'ailleurs une source de plaisanterie entre eux : la béquille était pour l'un le cigare et l'alcool, pour l'autre c'était la gourmandise - n'allons quand même pas jusqu'à dire la goinfrerie. Max disait parfois à son ami en rigolant : je ne viendrai plus chez toi ; avec ton unique repas par jour, tu m'affames !
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