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À l'approche de Noël 2018, le docteur Paul Gachet emmène sa femme et sa fille à la découverte de Florence. Alors qu'il brûle de leur faire découvrir les Botticelli, les charmes de la vieille ville et du fleuve Arno, leur séjour est perturbé par l'apparition d'une performeuse serbe, Marina Abramovic, à travers les rues de la cité jusqu'aux salles du Palazzo Strozzi. Qui est cette femme soudain omniprésente qui bouleverse tous les repères de Paul Gachet et des siens, malmenant son propre corps pour parler à une humanité sourde et défaillante ?
Chirurgien-orthopédiste, Paul Gachet répugne aux mutilations de l'artiste. Mais il est malgré lui envoûté par son univers qui, s'éloignant peu à peu d'une violence gratuite en apparence, exprime une recherche d'harmonie avec l'autre, en particulier avec son compagnon Ulay qu'elle enlace à l'étouffer avant de nouer sa chevelure à la sienne ou d'exposer son coeur à la flèche de son arc.
Deux ans après cette apparition florentine, Paul Gachet tombe par hasard sur une photo ancienne de Marina A et d'Ulay intitulée L'impossible rapprochement. Prise en 1983 à Bangkok, elle montre deux êtres qui voudraient se toucher mais en sont mystérieusement empêchés et doivent rester à distance l'un de l'autre. Alors qu'éclate la pandémie planétaire, Paul Gachet comprend que les manifestations de cet art étaient une forme d'alerte dont il saisit enfin toute l'importance. Une incitation à protéger l'autre, à refonder nos sociétés sur ces deux petits mots : « après vous ».
Ce livre est différent de ses autres romans , j’ai eu un soupçon d’ennui au début mais heureusement l’écriture est toujours au rendez-vous ...ensuite j’ai aimé cet ouvrage de réflexion sur notre monde qui change et sur la nécessité d’une prise de conscience , sorte de catharsis tout cela grâce à l’art ou plutôt devrai-je dire grâce à la performance d’une artiste notamment ! Cela m’a rappelé La beauté des jours de Claudie Gallay où justement il beaucoup question de Marina Abramovic ...
Marina A. Marina Abramovic. A l’instar du narrateur, le Docteur Paul Gachet, je ne connaissais pas cette performeuse d’origine serbe et qui a fait le tour du monde en s’arrachant le corps devant des milliers de visiteurs. Une lanceuse d’alerte par la mutilation du corps. L’art non pas pour sublimer mais pour une violence à réparer.
Chirurgien orthopédiste dans un service pédiatrique, le narrateur passe, avec son épouse et sa fille, quelques jours dans une ville à musée ouvert, Florence. Leurs pas ne songent qu’à suivre les traces de Boticelli, Donatello, Da Vinci… mais un tremblement de terre artistique provoque un séisme intérieur, le protagoniste est bouleversé par les affiches mettant en scène Marina Abramovic. Visites, recherche d’information, observation d’images, l’obsession est proche. Choc psychologique contre violence artistique, plus besoin du poids des mots, la vision d’une femme qui nettoie des squelettes, s’attache avec son compagnon, expose son corps et laisse le public libre de faire ce qu’il veut avec déclenche un big-bang chez celui qui a pour métier de réparer des os brisés. Métaphore littéraire pour roman en mode warning sociétaire.
Deux ans plus tard, un soi-disant pangolin farceur envoie un cataclysme planétaire par le messager Coronavirus, nom de code : Covid-19. Notre narrateur songe toujours à la provocante Marina, d’autant plus qu’en plein confinement son cerveau bascule et son corps nécessite un repos confiné. Les métaphores tourbillonnent encore dans les pages et derrière un ton léger semblant primesautier se dessine une réflexion sur la société individualiste que la crise sanitaire a renvoyé en boomerang dans la figure des hommes.
Combien de fois sommes nous interpellés ? Souvent, très souvent. Sommes-nous pour autant touchés ? Pas certain. C’est là que se joue ce roman, chevauchant sur l’art qui s’éloigne de la beauté pour montrer la laideur du monde, de ce que l’humain est capable de faire et, encore pire, sur sa capacité à détruire. Banalisation de l’effondrement de l’autre pour protection individuelle, regard de proximité malgré la mondialisation. Marina Abramovic défie les humains : en rendant un corps accessible d’aucuns sont capables des plus viles intentions. Eric Fottorino signe un roman qui fait résonner les systèmes d’alerte pour que les raisons cessent de s’égarer.
Même si à titre personnel j’estime que l’art se doit d’être beau pour supporter les affres de l’existence, une belle claque peut être un geste salutaire pour réveiller les consciences endormies. Parfois, il suffirait d’un geste pour que la face du monde puisse changer. Collectivement. Avec humilité. Prendre soin des autres et prononcer deux mots : « après vous ».
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