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La ville de Tananarive possède aujourd'hui encore les traces d'un riche passé architectural.
Manjakamiadana, exemple achevé d'une construction monumentale de premier plan, accaparait l'attention jusqu'à l'incendie qui l'a ravagé (novembre 1995). Construit autour de 1840, ce palais emblématique situé au sommet d'une colline, visible à des dizaines de kilomètres aux alentours, eut droit à de nombreuses études qui l'ont trop souvent isolé dans sa superbe comme témoin d'un règne singulier et chef-d'oeuvre d'un étranger.
Pourtant, l'intérêt pour l'histoire urbaine de l'ancienne capitale du royaume merina doit dépasser l'enceinte royale et s'élargir au reste de la cité.
Il existe en effet dans la capitale et ses environs un riche patrimoine architectural, méconnu et rarement analysé dans une perspective historique, qui témoigne pourtant des mutations socio-économiques du XIXe siècle. Il convient donc d'ouvrir le champ d'analyse " classique " (celui des palais) au profit d'un corpus plus large, si l'on veut comprendre la place occupée par les édifices dans l'espace social de la ville au XIXe siècle et les effets de contraste voulus par le pouvoir et de jeux en miroir ambitionnés par les Grands.
Le décloisonnement ne doit pour autant aboutir à un éclatement de l'objet distendu entre ethnographie et anthropologie. Il s'avère nécessaire, pour éviter cet écueil, de périodiser l'évolution architecturale de la ville. Trois grandes phases ressortent avec clarté. Dans les années 1820-1860, une monumentalisation de l'architecture royale monopolise les innovations techniques venues de l'extérieur. Dès les années 1840, une partie de l'élite reprend pour elle-même les avancées architecturales.
L'apogée de l'architecture domestique de prestige est atteinte dans les années 1870-90. A la fin du siècle, la diversification des styles et des techniques, impulsées par les missionnaires anglais de la London Missionary Society, banalise l'architecture royale et privilégie les Grands tout en assurant une certaine " démocratisation " des innovations aux couches intermédiaires de la capitale. En s'imposant en 1895, la France a dû composer avec ces divers apports qui font de la capitale de la nouvelle colonie un lieu de synthèse de la tradition et de la modernité tout à fait original.
A travers cet ouvrage, Didier Nativel a été particulièrement soucieux de restituer la vision autochtone de l'architecture et la maîtrise locale de son évolution. Il a utilisé avec perspicacité les moindres détails des récits de voyage mais aussi des mémoires et autobiographies du XIXe siècle, pour se placer dans la perspective des acteurs sociaux et rappeler leurs stratégies.
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