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Voici l'histoire d'une rencontre entre deux hommes solitaires, maigrichons et plus tout jeunes. Le premier, Kilgore Trout, obscur auteur de science-fiction, passe ses soirées à prédire l'apocalypse à son seul ami, Bill, une perruche. Quant à Dwayne Hoover, riche concessionnaire Pontiac dont l'unique compagnon est un chien nommé Sparky, il est sur le point de perdre la tête. Lorsque Kilgore Trout rencontre Dwayne au cours d'un festival, il lui offre l'un de ses romans. La lecture de ce livre va transformer Dwayne en monstre.
Kurt Vonnegut, immense figure de la littérature américaine, démantèle dans ce roman prophétique la folie du monde moderne dans un jeu de massacre où rien ni personne n'est épargné.
Quelque part dans les années 70 aux USA, deux « champions » qui s’ignorent et n’ont rien en commun (sauf leur âge mûr) vont se rencontrer, et c’est dommage, parce que, sans cela, on aurait pu éviter quelques dégâts (mais le lecteur aurait moins ri).
D’un côté, nous avons Kilgore Trout, auteur de SF aussi obscur que prolifique, dont les romans sont détournés et publiés dans des revues pornos.
De l’autre, Dwayne Hoover, concessionnaire de voitures, prototype du self-made-man et du rêve américain, dont le cerveau disjoncte lentement mais sûrement.
A ces deux spécimens, il faut ajouter le narrateur Philboyd Studge (double fictif de Vonnegut), qui se présente comme l’auteur de l’histoire que nous allons lire, et qui ne se privera d’ailleurs pas d’intervenir à tout moment dans le récit. Il nous explique la vie sur Terre (et singulièrement aux Etats-Unis) comme si nous étions des Martiens, à coup de petits dessins enfantins. C’est aussi lui qui nous annonce dès le départ que Trout et Hoover vont se rencontrer dans un festival d’art, au cours duquel le premier va offrir l’un de ses romans au second, lequel va se transformer en sombre brute après lecture.
« Le petit déjeuner des champions » est un portrait féroce de l’Amérique de l’époque, de ses névroses et de ses travers. Tout y passe : le Vietnam, les armes à feu, les fast-foods, le puritanisme hypocrite, l’obsession pour le sexe, le racisme, l’égoïsme, l’individualisme et la solitude, l’écologie, la religion, l’hyper-consommation (eh oui, déjà).
J’ai rarement lu un bouquin aussi déjanté et schizophrénique (où le narrateur est à la fois personnage et auteur de l’histoire avec droit de vie et de mort sur les protagonistes). Un roman totalement délirant où Vonnegut flingue à tout va la société américaine, en visant plutôt juste. C’est jouissif et drôle, mais on rit un peu jaune en se disant que, 50 ans plus tard, peu de choses ont changé…
L'auteur présente les américains comme des pirates cruels et avides, venus, en 1492, piller des terres et réduire leurs habitants en esclavage. En réalité, Kurt Vonnegut revisite vite fait l'histoire de l'humanité à sa sauce, et c'est drôle bien que tragique au fond. Mais rapidement on se retrouve dans une histoire futuriste loufoque, de soif de l'or et de petites culottes. Car un des héros du roman, Kilgore Trout est auteur de science fiction, et un peu à la masse. D'ailleurs, ses romans sont illustrés d'images pornographiques n'ayant rien à voir avec le texte. Loufoque, oui, oui. Comme ces extraterrestres-voitures, où ceux qui font des claquettes en pétant et des humanoïdes qui se nourrissent d'aliments à base de pétrole et de charbon…
En fait, plus on avance dans l'histoire, plus le sentiment que Kurt Vonnegut se paie la tête de l'Amérique est prégnante. Il se moque de la façon dont elle tourne (pas rond). Car au fond, bien que ça paraisse complètement farfelu, ça dit beaucoup de choses de l'humanité. J'y ai même trouvé une résonance avec ce qui arrive chez nous en ce moment, à savoir se laisser enlever son libre arbitre, accepter d'être dominé par quelqu'un de mauvais en échange de sa protection pour avoir un sentiment de sécurité.
Le narrateur nous explique tout, comme si on était stupides ou ignares et ça m'a beaucoup amusée : "Le Vietnam était un pays dans lequel l'Amérique essayait d'empêcher la population d'être communiste en lui larguant diverses choses de ses avions. Les produits chimiques auxquels le conducteur faisait allusion servaient à détruire tout le feuillage, afin qu'il soit plus difficile pour les communistes de se cacher des avions".
Je trouve que ça met l'accent sur l'absurdité de ce que font les hommes.
Des dessins naïfs parsèment l'histoire, dans la même veine que les explications basiques destinées aux crétins que nous sommes XD.
Chaque résumé des romans de Trout ressemble à une métaphore fantasque de nos sociétés complètement à côté de la plaque, qui vénèrent le Dieu Pognon et la superficialité, oubliant complètement l'essentiel qui est la base de la survie. Car, même si c'est des USA qu'il se moque, on a tellement voulu copier ce pays de la malbouffe dans son modèle ultraconsumériste, qu'on peut largement prendre notre part dans ces critiques.
En fait je crois que j'ai lu le roman d'un roman dans un roman. Car ce roman écrit par Kurt Vonnegut qui donne la parole au narrateur qui, je crois mais je ne suis pas sûre, est Philboyd Studge donc Vonnegut lui-même qui se met un moment dans le roman et donc le créateur se retrouve au milieu de sa création, nous raconte l'histoire de Kilgore Trout qui écrit des romans. C'est vraiment une histoire de fou ! D'ailleurs l'autre personnage de l'histoire de Philboyd Studge, Dwyane Hoover, fait doucement mais sûrement l'ascension vers les sommets de la folie furieuse, à cause de la chimie de son cerveau qui laisse à désirer.
Vous l'aurez compris, ce roman très intelligent est complètement barré et d'une drôlerie qui provoque souvent le rire ! Visiblement, c'est la marque de fabrique de Vonnegut. Et alors qu'il a été écrit en 1974, il parle d'écologie et de pollution, de tous ces procédés de fabrication qui sont en train de détruire la planète. Et il y en a qui ont l'air de découvrir ça, maintenant, au XXIe siècle ou qui osent dire "on pouvait pas prévoir". Ben voyons ! Mais il parle aussi de cupidité, de concupiscence en termes souvent assez crus et très drôles, d'individualisme évidemment, de racisme parfois, d'imbécillité souvent, de taille de pénis aussi, de mensurations féminines tant qu'on y est, de violence, de désir, d'homosexualité, d'excréments de levure pour l'euphorie,
J'ai beaucoup aimé, car je crois que j'aime totalement l'esprit Kurt Vonnegut, facétieux, farfelu mais profond. Cependant j'ai trouvé par moment qu'il y avait des longueurs dont je me serais bien passée. Ça reste pourtant un excellent moment de lecture, vraiment, vraiment.
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