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Plus documentaire que livre, plus essai que roman, Le manteau de Greta Garbo survole du début à la fin le mythe Garbo, sa garde-robe unique et fascinante. Résultat : difficile de trouver quelque chose de fascinant dans ce roman. Le livre consiste en une succession de citations, de références parmi lesquelles il est bien souvent difficile de trouver le lien qui les unit. De Greta Garbo, nous en saurons peu, trop peu. De son fameux manteau, presque rien. L'impression de se noyer dans une liste de références persiste tout au long du livre. La lourdeur s'enchaîne à quelques passages d'une agréable fluidité. Les faits sont trop nombreux, trop décousus pour qu'on ne perde pas le fil de… l'histoire ?
On ne niera pas la solide culture de l'auteure mais était-ce le meilleur moyen de la mettre en valeur ? Au détriment de l'écriture ? Car si le récit entier est un assemblage de textes piochés et recollés, les quelques passages romancés écrit par la main de l'auteure laisse présager une écriture simple, plaisante que, malheureusement, nous ne faisons qu'entrapercevoir ici. Alors doit-on la remercier de ne pas avoir fait une énième biographie ? Difficile à dire puisque ici, les vêtements, les garde-robes, prennent le pas sur celle qui devait être le point central du livre.
Le livre de Nelly Kaprièlian est un fourre-tout, un kaléidoscope de bribes d'enfance, de morceaux choisis de la vie de l'actrice et d'autres de l'auteure. Si la première partie est volontairement culturelle dans le sens le plus strict du terme puisqu'on y croise les grands noms de la mode, du cinéma et même, un peu, de la littérature, la deuxième partie nous embarque sans transition vers le génocide arménien, traumatisme passé qui toucha de plein fouet la famille de l'auteure. Quelques pages de récit avant de réembarquer dans une déblatération d'anecdotes. L'enchaînement de tous ces courts paragraphes donnent l'impression de lire un carnet de pensées, ces quelques lignes que l'on jette sur une feuille pour ne pas les oublier et qu'on ne prend jamais le temps d'organiser. Mais quel est le fil rouge ? Où se cache le lien qui réunit toutes ces brides dépareillées ?
Il est dommage de découvrir une auteure qui préfère faire parler les autres, qui ne prend pas sa place d'auteure. Polluée par de trop vastes citations, Nelly Kaprièlian ne parvient pas à nous embarquer dans son univers puisque d'univers, il n'y en a pas.
Nelly Kaprièlian aurait mieux fait de s’abstenir de présenter son premier livre comme un roman pour en assumer le caractère autobiographique. D’autant plus que, comme critique livres (aux Inrockuptibles), elle n’ignore pas que tous les éditeurs usent et abusent de ce subterfuge qui, paraît-il, fait vendre (?). Cela aurait-il sauvé son entrée en littérature? Ce n’est pas sûr tant on a du mal à comprendre l’objet de ce bouquin, et donc l’intérêt. Que veut-elle nous dire? Qu’elle aimait Greta Garbo et qu’elle a été désolée de la vente aux enchères de ses vêtements en décembre 2012, au point d’acheter son manteau rouge, «alors qu’il n’était pas [son] genre» tient-elle à préciser (cela ne vous rappelle rien? Mais oui, mais oui, l’auteure est critique littéraire). Les réflexions sur l’actrice d’origine suédoise constituent les morceaux les plus intéressants de récit (les seuls, en fait). Les digressions vers d’autres actrices hollywoodiennes (chez Hitchcock, évidemment), on n’en voit guère l’intérêt. Quant à aux passages où l’auteure parle d’elle sont souvent pénibles par la façon dont elle se met en scène en agrémentant ses souvenirs de détails mondains - elle croise Dita Von Teese «en robe noir Roland Mouret» au Ritz, elle rencontre Ingrid Caven chez Jean-Jacques Schuhl, elle essaie une «second look dress» dans le magasin Decades sur Melrose à Los Angeles, etc.- qui déforce totalement le propos. Un propos qui a son intérêt mais qui aurait mérité d’être abordé avec plus de simplicité et de sobriété. Comment ce livre va-t-il être reçu, quand on connaît la place qu’occupe son auteure dans le paysage médiatico-littéraire parisien, notamment au Masque et la Plume sur France Inter où elle se montre régulièrement impitoyable? Wait and see.