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« Les hommes libres se cachèrent dans les cavernes. » Cette phrase de l'Apocalypse est devenue réalité en cette fin du XXIe siècle imaginée par Pierre Labrousse. Il reprend des thèmes conflictuels de nos sociétés (liberté et matérialisme, progrès technologique, robotique, écologie, vaccins, surpopulation, disparition de Dieu...) et les développe à l'extrême, aboutissant à une dystopie effrayante où les gouvernements ont sombré, avec l'assentiment de la majorité de la population, dans le totalitarisme sécuritaire, les idéologies écologistes et le contrôle démographique. Aux côtés de ceux qui ont refusé les implants et autres décisions gouvernementales progressistes, Daniel et l'étonnant clone Lucie rejoignent l'armée qui se préparait dans les cavernes depuis plusieurs décennies. Leur combat pour sauver l'humanité va prendre une dimension eschatologique. Un formidable roman d'anticipation, aux nombreux rebondissements et aux personnages d'une grande profondeur psychologique, mais aussi une réflexion politique, anthropologique autour du corps et de l'âme, et philosophique sur le progrès.
Je suis assez déçu par ce roman qui se vantait être de l’anticipation réaliste de dérives sociales actuelles aboutissant à une dystopie. À mon sens, 1984 ou Le Meilleur des Mondes demeurent nettement plus pertinents là-dessus, alors qu’ils datent de plus de soixante ans !
Que dire ? Commençons par le résumé : avec la subtilité d’un diplodocus dans un magasin de porcelaine, l’auteur (Pierre Labrousse, professeur agrégé de philosophie) nous dépeint une société gouvernée par l’anti-spécisme, l’anti-racisme, l’anti-discriminations, l’anti-complotisme etc... et surtout, avec une vénération malsaine pour l’écologie. Pour vous faire une idée, imaginez que toute la société est composée de cadres bobos parisiens vegans, consuméristes et peu cultivés. Environ un tiers de la population est tombée dans la dissidence – nos Gilets Jaunes actuels, ici appelés les Zombies, qui se font massacrer jour et nuit par les policiers – et l’Union Occidentale (Union Européenne + États Unis) a « cancell » l’Asie et l’Afrique, qui polluaient trop à son goût et refusaient d’abandonner leurs traditions sexistes et « hétérosexualistes ».
Là, comme ça, sur le papier, l’idée peut paraitre intéressante : après tout, pourquoi pas, pourquoi ne pas montrer le risque qui existe derrière chaque idéologie politique, même la plus innocente en apparence ? Je pourrais par exemple écrire un roman d’anticipation où les Pastafaristes (vous savez, ces gens qui vénèrent le Monstre Spaghetti Volant) prennent le contrôle du monde et envoient les amateurs de riz et de patates dans des camps au nom de la Pâte Sacrée ! Tout peut servir de base à un bon roman de dystopie : le fait qu’ici le rôle des méchants soit tenu par les descendants spirituels de nos écolos actuels n’est pas ce qui me dérange. Au contraire, à une époque où la plupart des livres de SF parlant d’un futur proche dépeignent une planète complètement détruite par la faute de notre pollution et de nos erreurs actuelles, cette voix s’élevant à l’opposée du courant dominant aurait été bienvenue....
... sauf que Labrousse s’y prend comme un pied. Avec la finesse d’un hippopotame dans un parterre de tulipes, il nous balance sans discontinuer tous les odieux mensonges bricolés à partir de rien qui constituent cette horrible société de vegans écolos non-binaires : le réchauffement climatique anthropique n’a JAMAIS existé, notre pollution n’a eu AUCUN impact sur la planète, tout ça c’est un complot concocté par Greta Thunberg (pourquoi ??! À qui profite le crime ?!? Mystère et boule de gomme !), les vaccins n’étaient que des moyens de manipuler les masses (pour ce qui est des vaccins, étant moi-même plus ou moins anti-vax (pas pour les mêmes raisons que l’auteur, heureusement ; contrairement à lui j’ai des connaissances rudimentaires en biologie moléculaire), j’aurais trouvé cela beaucoup plus subtil de ne pas présenter le vaccin EN SOI comme dangereux/nocif, mais plutôt l’effet psychologique de l’obligation de se faire vacciner – un moyen de briser les volontés, ce qui aurait par la suite entrainé d’autres dérives, comme par exemple les implants obligatoires (qui, eux-aussi, ont reçu un traitement superficiel et grossier dans l'histoire, malgré le potentiel d’une telle technologie en science-fiction et en philosophie de l’esprit))... Le manichéisme entre les gentils Gilets Jaunes/Zombies – éduqués, intelligents, proches de la nature, en excellente santé malgré le fait qu’ils font du survivalisme en forêt – et les citoyens manipulés – ignares, rustres, cuistres, abêtis par leur mode de vie consumériste, faisant des fôte dortograf à CHAQUE MOT (sérieusement ? Ce sont censés être des cadres, ils ont certainement suivi des cours de français au moins à l’école primaire... rien que pour savoir écrire en écriture inclusive !) – est absolument omniprésent, jusqu’à en devenir indigeste. Et surtout, complètement incohérent : comment une société composée de tels crétins peut survivre et dominer l’Europe et l’Amérique du Nord ? D’accord, la classe dirigeante semble un peu plus éduquée que cette classe moyenne biberonnée aux médias.... mais quand même ! Il leur faut bien des ingénieurs, des scientifiques, des profs !
C’est encore la moindre des incohérences, dont voici une petite liste non exhaustive : d’où est-ce que l’Union Occidentale tire son énergie (ils ont une technologie ultra-développée) si elle est écolo radicale ? pourquoi les nations externes (Asie, Afrique) n’ont jamais attaqué, alors qu’on voit bien dans l'avant dernier chapitre que les Russes semblent porter un culte pour la guerre ? POURQUOI la dérive écologiste (à savoir : renaturaliser le territoire, réduire la démographie, réintroduire des espèces disparues) s’est-elle mise en place, à qui tout ça peut-il bien profiter ? Surtout que dans cette fiction, la pollution humaine n’a jamais eu d’effets nocifs sur la nature (enfin surtout la pollution aux gaz à effets de serre, l’auteur ne parle pas du plastique dans les océans) !
On a aussi droit à quelques affirmations « scientifiques » de l’auteur (on sent bien qu’il n’a pas trop fait de sciences depuis le collège), dont voici une particulièrement croustillante : au cours d’une discussion entre le personnage principal et un neurologue, le neurologue affirme que « le nombre de synapses dans [le cerveau humain] est supérieur au nombre de protons qui composent l’univers. Dix puissance quatre-vingts, voire beaucoup plus. » (si vous pensez avoir la grosse tête, ne vous en faites pas : votre cerveau est beaucoup plus gros que l’univers !) (pour ceux qui veulent les vrais chiffres : il y a 10 puissance 85 protons dans l’univers, et 85 milliards – soit environ 10 puissance 11 – synapses dans le cerveau humain). Bien sûr, ce ne sont que des détails, mais l’auteur aurait pu s’informer avant d’écrire des âneries...
Je passerai sur mon opinion personnelle du personnage principal, censé être très intelligent (c’est toujours exaspérant de lire des personnages « censés être intelligents » mais qui au final vous paraissent encore plus idiots que vous-mêmes...) pour plutôt m’intéresser au fond du livre (parce que oui, sous cette couche d’amertume envers la gauche socialiste et les écolos se cache bel et bien un message un peu plus profond que les discours de votre papy réac lors d’un repas de famille) : la super-promo du catholicisme !
Ah çà, du catholicisme, vous allez en bouffer ! Les événements de la trame principale s’enchainent plus ou moins subtilement pour correspondre presque mot à mot aux textes de l’Apocalypse, les Zombies opprimés sont apparemment tous des moines ou de fervents chrétiens, la Bible va très vite devenir THE référence pour absolument toutes les prises de décisions majeures... Alors oui, pour ne pas mentir, les passages les plus intéressants du roman sont précisément les discussions théologiques entre personnages (il aurait même pu y en avoir plus – j’ai eu la sensation qu’à chaque fois qu’un argumentaire intéressant commençait à être développé, un événement impromptu survenait pour l’interrompre, comme si l’auteur n’osait pas – ou ne savait pas – continuer). Les questionnements sur l’origine de la conscience, omniprésents dans l’histoire, sont plutôt pertinents (même si on en fait plus ou moins le tour dans les deux ou trois premiers chapitres ; après quoi, un « consensus » tombe : la conscience est due à l’âme, donnée par Dieu à tout être vivant né naturellement). La quête du héros, ici, au-delà de combattre le système injuste dans lequel il vit, c’est avant tout de trouver la Foi.
Oui, car en réalité, ce roman a été très mal classé : ce n’est ni vraiment de la SF ou de l’anticipation, ni même un ouvrage philosophique à proprement parler (je ne suis pas un expert, mais il me semble que les thèses développées dans des romans philosophiques doivent quand même être un peu plus profondes que ce qui est présenté là – un peu de maquillage avec des mots savants pour cacher la misère d’une histoire clichée et d’une dystopie mal écrite). C’est avant tout un conte théologique, une réécriture des textes sacrés à une sauce moderne pseudo-SF (pour que ça fasse vendeur) : chaque page s’efforce de vous convaincre de réveiller votre chrétienté refoulée, de jeter aux ordures toute idée progressiste et de retourner vivre à la campagne avec une femme et des enfants, église chaque dimanche, comme un bon catholique du siècle dernier. « C’était mieux avant, du temps où la France était chrétienne, avec un roi pour la gouverner et la Vierge Marie comme symbole ». Ce n’est pas un visionnaire qui a écrit Le Clone de l’Apocalypse : c’est un nostalgique.
Grand bien lui fasse, en réalité. On ne peut pas reprocher les opinions de quelqu’un ; en revanche, on peut critiquer sa manière de les promouvoir, ce qui justifie ici ma note. J’adore lire des histoires, cela ne me dérange pas qu’elles soient politiquement orientées, mais à une condition : par pitié, soyez subtils un minimum ! Ne me donnez pas l’impression de lire un slogan de propagande vaguement agrémenté de personnages fades évoluant dans un univers peu crédible pendant presque quatre cent pages !
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