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On connaissait les chiens truffiers, les verrats truffiers et même, certains jours sans vent, les initiés à la recherche du diamant noir suivant la mouche couleur tabac clair. Mais personne n'aurait imaginé qu'un homme puisse être « truffier ». C'est pourtant ce qui s'est produit à Monroque, village des monts deVaucluse. Ce récit, empreint d'humour, pose un regard sur la vie, avec l'innocence de celui qui sait, mais ne peut rien dire.
Les premières lignes «Comment et pourquoi Monsieur Eliott est-il arrivé à Monroque ? Personne ne le sait vraiment. À dire vrai, chacun a son idée ; Madame Gras, qui tient le bureau de tabac, a autant d'explications que de clients. Mais toutes sont concordantes : ce n'est pas un hasard. Pourtant moi, je sais qu'il est arrivé là par hasard et, s'il a fait une halte à Monroque, c'est parce que la lumière de fin d'été était belle et dorée et que la place était ombragée, parce que la fontaine était moussue et que l'eau débordait de la bassine, parce que la boulangère lui a souri et parce que le patron était dans un bon jour pour lui servir une bière pression sur la terrasse sans trop récriminer. Voilà pourquoi il s'est arrêté. C'est aussi simple ! Le fait est qu'un jour de début septembre, on l'a vu arriver au volant d'une voiture de location. C'était un samedi ou un dimanche. Mais quelle importance que ce soit un jour de la semaine ou un autre ! Moi, je l'ai suivi du regard et je l'ai vu flâner sur la place, rendre son sourire à la boulangère, tâter l'eau de la fontaine et s'en humecter les tempes et les joues pour se rafraîchir. Puis, il s'est assis à la terrasse pour lire ses journaux. Il a bu une bière avant de commander son repas. De la daube ou quelque chose comme ça. Un plat d'hiver alors qu'il faisait encore bien chaud. Il faut dire que les plats du jour s'ordonnancent d'une façon immuable dans le café restaurant de Monroque. C'est immuable comme les jours de la semaine. Jacques, le patron, a des menus standards pour chaque jour et refuse même de parler d'un quelconque changement. C'est un sujet qui fâche et qu'il ne faut pas aborder. Ce jour-là, c'était la daube - donc un samedi - et tout le monde était dehors. Les boulistes jouaient en bras de chemise et les derniers chasseurs revenaient dégoulinants de sueur de leurs escapades dans les collines. Moi, je paressais à l'ombre des platanes. La battue dans la combe noire n'avait rien donné ce matin-là, et ce ne sont pas les quelques malheureux faisans d'élevage lâchés la veille qui avaient réveillé mon instinct de chasseur. Les pauvres volatiles savaient à peine voler et retombaient lourdement sur le sol quand un coup de botte malencontreux les dérangeait dans leur sieste d'obèses. La pétarade qui s'en suivait m'avait fait renoncer à rechercher dans les touffes de genêts cette boule de plomb recouverte de quelques plumes de couleur. Chaque malheureux faisan était fusillé au moins quatre fois avant d'être déclaré mort. Mais toutes ces gesticulations et toutes ces pétarades faisaient l'objet d'abondants commentaires quand les tartarins du village entamaient le quatrième pastis de la matinée.
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