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«Ça fait deux ans que je ne l'ai pas revu. Sept cent vingt-trois jours pour être précise. Il y a un mois, j'ai reçu une lettre de lui en provenance des États-Unis. Il m'indiquait qu'il avait fui notre pays et qu'il travaillait dans une entreprise de bâtiment. Il allait bien, il écrirait de temps en temps, il me souhaitait du calme maintenant qu'on ne se reverrait plus.J'ai brûlé la lettre et j'ai regardé mon fils aîné partir en fumée.»Inspiré de faits réels, ce roman choral explore des rêves d'exil, accomplis ou à jamais manqués. D'un continent à l'autre, des familles dispersées affrontent la même incertitude : que transmet-on à ses enfants qu'aucune frontière ne peut effacer ?
C'est un faisceau de récits terribles et dérisoires de banalité de nos jours. Ce ne sont que quelques personnes quand on entend chaque jour le compte-rendu de dizaines, de centaines de malheureux noyés, affamés, battus pour avoir espéré mieux pour eux-mêmes ou leurs enfants. La force de ces récits tient aux détails des espérances parfois naïves, et au caractère universels de ces trajectoires humaines.
Essentiel pour cesser de ne voir que des ombres et des effectifs macabres au lieu d'êtres humains.
Là d’où je viens a disparu est un roman choral qui dit la mondialisation et l’exil. Le récit se déroule de 2015 à 2019. L’auteur nous dévoile par petites touches, avec pudeur, l’histoire de ceux qui partent. Luis et Eva s’exilent avec Angéla leur petite fille pour fuir le harcèlement des gangs du Salvador, Litzy souhaite que son enfant naisse aux Etats-Unis, il aura une vie meilleure qu’au Salvador, Sahra, Somalienne, s’invente une vie aux Etats-Unis, Angie pleine de rêves, tente d’entrer en Europe. L’auteur donne aussi la voix à ceux qui restent, en proie à leurs questionnements et à leur imagination. Cette crise migratoire réveille des engagements opposés non exempts de motivations narcissiques. Jérémy, mal dans sa peau, milite dans une association d’extrême droite, agit dans les Alpes contre l’immigration clandestine alors qu’il fait par ailleurs des maraudes pour venir en aide aux sans-abris ; sa mère, Hélène, le coeur à gauche, documentaliste dans l’enseignement catholique, veut sensibiliser sur les disparitions de migrants et partant, retrouver ce fils qui s’est tant éloigné d’elle. Les drames de la séparation revêtent diverses formes dans le roman.
Le livre dit aussi la force de la connexion et de la médiatisation dans le monde globalisé. Les personnages ont des liens entre eux. Litzy, exilée aux Etats-Unis, est très touchée par la mort d’un enfant syrien de 3 ans dont le corps est retrouvé sur la côte turque. A la fin du livre, Marta, déplore l’usage fait de la photo du drame, cela fait naître une émotion abominable et inutile pense-t-elle, alors que ce qui est essentiel ce sont les questions qu’elle se pose sur ce drame, questions auxquelles l’image n’apporte pas de réponse.
Le lecteur à travers ces récits de vie inspirés du réel s’empare de personnages dont l’identité et l’histoire dépassent largement la fugacité de l’image que les médias nous livrent.
Du Salvador à la Somalie, le malheur au malheur ressemble et les rêves de liberté échouent sur des rafiots de fortune ou des camps aux frontières. Rafael et Marta évoquent leur histoire tandis qu'à Somerville, les rêves avortés parviennent à Mogadiscio sous forme de pieux mensonges.
C'est une tout autre ambiance à Lyon, alors que Pascal fait le bilan de vingt et un ans d'une cohabitation avec ce fils qu'il n'a pas vu grandir. Ce fils qui devient autonome, mais dont il sait peu de choses, jusqu'au jour où il reconnait sa voix, captée pour une interview à la radio …
C'est avec beaucoup d'empathie que Guillaume Poix donne la parole à ses personnages, qui rêvent tous d'un autre monde. Malgré les frontières toujours plus hautes, plus controlées plus inaccessibles , l'espoir est là, brisé parfois avant même de comprendre l'imposture.
C'est l'histoire d'un monde qui vit mal son évolution, d'un monde qui continue à penser en légitimité du droit du sol, et ferme les yeux sur la détresse de moins chanceux mais autant humains qu'eux.
Sans jugement péremptoire, l'auteur dresse une galerie de portraits comme un état des lieux de l'époque.
L'humour n'est pas absent de ces lignes, en particulier pour les chapitres consacrés à Pascal, le naïf de service, avec ses principes qui explosent en vol, confronté à une réalité inimaginable pour lui.
Un très beau roman humaniste, qui dresse un état des lieux sans donner de leçon
Roman choral à cœurs et à cris ouverts, « Là d’où je viens à disparu », nous emmène, des Etats-Unis au Salvador en passant par la Lybie, la Somalie et la France, à la rencontre de vies qui s’entrecroisent au fil des chapitres.
Des vies qui ont rêvé, osé, tremblé, fui et surtout toutes espéré qu’un avenir meilleur les attendrait au bout du voyage… pour ceux qui ont eu la chance d’arriver à son terme.
Un roman qui parle des migrants, terme générique pour un sujet ô combien d’actualité qui nous est devenu ces derniers années si « familier ». Un mot vaste pour un sujet qui l’est tout autant…
Oui, mais voilà : dans ce roman justement, ces migrants prennent vie et identité :
ils sont Litzy, Luis, Eva, Giant, Malek, Sahra ou Angela.
Ils sont hommes, femmes, parents, enseignante ou pizzaiolo de formation, ou simplement un enfant et nous emportent avec eux dans un tourbillon d’espoir et de désillusions.
Lire ce livre, c’est embarquer au plus près de certains d’entre eux dans ces radeaux de fortune en route vers un Eldorado d’illusions qu’ils atteindront pour certains, quand les eaux ne les emporteront pas pour d’autres, c’est aussi se résigner à mener la vie sur le qui-vive et clandestine d’une femme de ménage que sa famille imagine enseignante dans une des plus brillantes universités d’Amérique.
Lire ce livre, c’est se plonger et se heurter à une réalité dramatique d’autant plus réaliste que ces histoires de vies sont inspirées de faits réels.
Une lecture qui dérange et qui bouscule, qui ne peut laisser insensible.
Toutes les voix de ce magnifique récit polyphonique nous hantent longtemps après l’avoir refermé. Ce roman est pour moi la quintessence de la littérature, quand le fond rejoint la forme. Quand la plume est un scalpel, quand le discours est un plaidoyer, quand l’humilité grandit l’humain, quand les mots vous serrent le cœur et vous arrachent les tripes…
On se prend à rêver d’en acheter des centaines d’exemplaires et d’en inonder le monde…
Ce livre fait honneur à la littérature et fait apparaître le 5 bien insuffisant à l’heure de l’attribution des étoiles.
Ils s'appellent Rafael, Litzie, Pascal ou Angie, ils viennent de France, de Lybie, du Salvador.
Tous ont un point commun, ils rêvent d'un monde meilleur ; ils recherchent la sécurité pour leurs enfants et eux. Ils veulent un avenir.
J'ai tout d'abord été saisie par la puissance du texte, la très belle écriture de Guillaume Poix, ciselée, intense. Il orchestre ses mots et ses phrases à la perfection. Il m'est arrivé de relire plusieurs fois la même phrase pour savourer l'emplacement du sujet, la proposition subordonnée, un plaisir.
Son texte sonne juste, qu'il prête sa voix à un homme ou à une femme, à un adolescent ou à une grand-mère.
Dans ce récit choral, j'ai été touchée par la détresse des personnages, leur souffrance mais également la volonté qu'ils ont de changer leur destin.
Certains fuient, pour échapper à la misère, à la violence, pour vivre un rêve d'ailleurs ; d'autres protègent.
Malgré les nombreux discours, je n'ai pas été perdue parmi toutes ces voix, tous ces personnages, ils forment un tout, reliés les uns aux autres dans une ronde implacable.
C'est un roman poignant sans être lourd qui nous fait réfléchir à notre rapport à l'autre ainsi qu'à notre terre.
Une belle découverte grâce au prix Landerneau.
Un roman vraiment réussi, par sa construction originale et par son thème poignant.
Une très belle surprise littéraire !
Dans ce récit, nous découvrons et suivons plusieurs personnages de 2015 à 2019.
Litzy, Sarah, Angie, Eva, Luis ont le même rêve : vivre dans un autre pays que le leur.
Ils ne désirent qu'une chose, fuir la misère, la pauvreté, l'insécurité et une vie sans avenir.
Ce sont des portraits de femmes et d'hommes bouleversants dont leur parcours de vie est souvent dramatique. Ils quittent tout et partent, plein d'espoir et de courage sur les routes de l'exil pour essayer d'atteindre l'eldorado…
Seulement le chemin est long, semé d'obstacles et la lecture en devient parfois difficile et très émouvante.
D'autres personnages se greffent au fil des pages, s’emboîtant judicieusement à l'intrigue qui nous happe entièrement dans ce récit percutant.
↜↝↜↝↜
Il est question de migrants, d'exil, d'errances, de drames venant de différents coins du monde.
Mais aussi de convictions, de combats et liberté.
C'est un sujet d'actualité et sensible qui perdure malheureusement.
Nous n'avons pas tous la chance d'être né au "bon endroit" et nous le comprenons superbement dans ce roman fort et d'une réalité effroyable.
Un texte saisissant, très bien écrit, intelligent et humain.
A lire de cette rentrée littéraire, c'est certain.
https://leslecturesdeclaudia.blogspot.com/2020/10/la-dou-je-viens-disparu.html
Habituellement, je développe toujours un peu le même schéma plutôt classique lorsque je rédige une chronique. Après une petite phrase d'accroche, j'essaye de résumer très brièvement l'intrigue et puis j'expose mon point de vue personnel sur le roman. Je vais avoir un peu de mal à garder ce schéma ici pour la simple et bonne raison que cela bloque dès le résumé.
Il est très difficile de résumer ce livre puisque je l'ai trouvé assez étrange dans sa construction. C'est un roman choral, l'auteur vient donc multiplier les points de vue. On identifie bien dès le début les thèmes développés par l'auteur dans le récit. On parle immigration, déracinement, exil, engagement politique... Par contre, ça part un peu dans tous les sens. Le roman est très foisonnant, c'est une succession d’instantané et il faut avouer que j'ai parfois eu un peu de mal à recoller les morceaux. L'auteur alimente régulièrement le lecteur avec des nouveaux protagonistes qui parfois apparaissent assez furtivement , j'ai eu l'impression qu'il me manquait des éléments que cela soit des données d'entrée ou des informations sur le devenir des personnages. Cet aspect assez décousu ne m'a pas aidé à m’immerger dans le récit.
Bien que la lecture se fasse sur un rythme un peu erratique, il faut reconnaitre qu'il y a de réelles qualités littéraires à ce récit et j'ai pris un vrai plaisir à lire ce roman. Tout d'abord, le style d'écriture est très agréable et il y a une vraie voix, singulière, engagée et cela se ressent lors de la lecture. Les thèmes traités sont difficiles, clivants, l'auteur arrive à le montrer en multipliant les points de vue et en prenant parfois la bonne hauteur. Il y a une vraie justesse dans le choix des mots et dans la manière générale de traiter ce sujet.
Mon avis est donc plutôt positif. C'est un roman fort, c'est riche en émotion, c'est engagé pour autant, et vous l'avez compris à la lecture de cette chronique, il m'a manqué ce fil rouge. Disons que l'on est pas obligé de faire toujours des histoires linéaires (et heureusement), mais là je n'ai clairement pas pu m'immerger dans une histoire, m'attacher à des personnages, ce qui ne m'a toutefois pas empêché de ressentir différentes émotions tout au long de la lecture, de m'interroger sur certaines situations...
En conclusion, un bon roman de cette rentrée littéraire qui évoque un thème fort de l'actualité de manière tout à fait réaliste. Ce thème est traité avec justesse et certains passages marqueront le lecteur, je n'en doute pas. Dommage qu'il manque parfois un peu de liant à tout ça, la multiplicité de personnages, pas tous traités de manière égale, vient un peu nuire à l'immersion dans le récit et force est de constater que ça part un peu dans tous les sens. Ça ne dérangera pas tous les lecteurs et en tout état de cause cela reste un livre très intéressant que je recommande.
Ma note : 3,5/5
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