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« Celui qui se donne la mort voudrait vivre. » Cette vérité, mise au jour par Schopenhauer, je n'ai eu de cesse de l'entendre dans le discours des survivants au suicide que j'ai rencontrés, sous la forme « je ne voulais pas mourir, je voulais que ça s'arrête », « ça » désignant la souffrance. Et si, paradoxalement, le suicide interrompu signifiait une volonté de survivre psychiquement? Suicide interrompu car l'intention de mourir est bien ici déterminante: c'est parce qu'il y a eu intervention d'un tiers, la réanimation médicale, que la mort du sujet n'est pas advenue. La clinique des survivants révèle en effet cet étrange paradoxe: se tuer physiquement pour survivre psychiquement à la souffrance engendrée par l'expérience de la perte de l'objet aimé. C'est bien parce qu'il est confronté à la menace d'un effondrement que le sujet décide de se tuer, le suicide apparaissant alors comme une défense contre l'angoisse, en d'autres termes, comme un symptôme de la dépression. Il s'agit donc d'appréhender ce paradoxe en interrogeant non seulement les symptômes dans leur rapport aux problématiques dépressives, mais aussi la place de la mort dans la vie psychique. Attribuer un sens à la mort, l'intégrer à la vie psychique, la lier au vivant, apparait en effet comme un élément indissociable de toute forme de guérison possible pour ce type de fonctionnement psychique.
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