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Automne 1913. A Paris et ailleurs - de Budapest à la Birmanie en passant par Venise -, une jeune femme intrépide, Gabrielle Demachy, mène une périlleuse enquête d'amour, munie, pour tout indice, d'un sulfureux cahier hongrois recelant tous les poisons - des secrets de coeur au secret-défense. Habité par les passions, les complots, le crime, l'espionnage, et par toutes les aventures qu'en ce début du XXe siècle vivent simultanément la science, le cinéma ou l'industrie, Dans la main du diable est une ample et voluptueuse fresque qui inscrit les destinées sentimentales de ses personnages dans l'histoire d'une société dont la modernité est en train de bouleverser les repères. En 1913, Gabrielle Demachy s'avance, lumineuse et ardente, dans les rues de Paris, sur les chemins du Mesnil ; entre l'envol et la chute, entre eaux et sables, la voici qui s'engage dans le roman de sa vie...
Quelle aventure que ce livre! Une fois entrée dans ce long roman je n'ai pu m'en détacher, malgré quelques défauts (la longueur, près de 1300 pages en format poche; les moments un poil trop "romance").
Des défauts vite oubliés car que cette langue est belle!!! que cette écriture est envoutante, ce vocabulaire rare, et comme ça fait du bien de dérouler ces mots trop rarement utilisés.
Et puis les personnages! Gabrielle bien sûr mais surtout Millie, si attendrissante, Mathilde et Dora, cette femme qui mériterait un volume à elle toute seule. Une sorte de Colette, une belle femme, qui n'a peur de rien ou presque, qui veut vivre comme elle le désire et baste ce que les autres pensent.
Les moments historiques se nouent à l'histoire de ces personnages épiques, on y croise quelques têtes connues, on les devine (tiens ce Marcel pourrait tant être Proust!), ce Paris nous enchante, on se met à trembler pour nos préférés et on arrive doucement à la fin du livre, le coeur lourd de devoir le refermer.
Une très belle lecture!
Il faut toujours laisser trainer ses oreilles dans les allées des librairies. C'est en entendant le commentaire passionné d'une libraire à l'une de ses clientes que j'ai eu envie de repartir avec ce pavé de plus de mille pages. Il y a quelques années déjà, cinq ou six. Mais il reste depuis en bonne place dans mon top 20, c'est à dire les livres que je choisirais de garder si on m'obligeait à me séparer de tous mes exemplaires (un cauchemar !) pour n'en conserver que 20.
Le roman débute en septembre 1913 et s'achève avec la mobilisation, le début de la grande guerre. Une année de la vie de Gabrielle, jeune femme ardente et passionnée, entre la petite et la grande histoire. La petite d'abord, c'est sa passion pour son cousin Endre, originaire de Hongrie et donné pour mort lors d'une expédition en Birmanie. Une passion plus fantasmée que réellement vécue mais qui pousse Gabrielle à enquêter sur les circonstances de cette disparition qu'elle n'accepte pas. Munie de maigres indices dont un mystérieux cahier, elle va "infiltrer" la famille de Pierre de Galay, le médecin qui a rapporté les effets d'Endre et pénétrer les arcanes d'une grande famille bourgeoise menée d'une main de fer par Mathilde de Galay, véritable capitaine d'industrie. Alors que les secrets de famille refont surface, Gabrielle grandit, murit et découvre la vraie passion. En ce début de XX ème siècle, alors que la guerre n'est pas encore dans les esprits, la période est propice à l'émancipation, à la création, à l'innovation dans tous les domaines artistiques et scientifiques. Une toile de fond passionnante pour ce roman où il est question des progrès de la recherche médicale (le Dr Galay travaille à l'institut Pasteur), de femmes qui s'assument et se construisent une vie propre. Gabrielle n'aura de cesse de trouver et de comprendre ce qu'il est advenu d'Endre. Mais sa rencontre avec la famille de Galay forgera à jamais son destin...
Quel souffle ! Quelle jolie écriture, précise, évocatrice, entraînante. Cette impression d'être toujours en mouvement, de courir, voler, tournoyer avec Gabrielle dont les aventures pourraient avoir été imaginées par Alexandre Dumas. Malgré l'épaisseur, ça passe trop vite et le regret est vif de refermer le livre et de devoir quitter Gabrielle et ses acolytes. Heureusement, la suite nous tend les bras : "L'enfant des ténèbres" et "Pense à demain" ancrés dans les heures les plus sombres de la seconde guerre mondiale.
Voila une trilogie qui fera un cadeau de Noël idéal pour tous les amateurs de grandes fresques romanesques, documentées et intelligentes.
Paris, septembre 1913. Gabrielle Demachy accompagne Agota, la tante qui l'a élevée à la mort de ses parents, au Ministère de la Guerre. Angoissée par cette convocation, Agota imagine le pire : une expulsion vers la Hongrie son pays d'origine. Mais sur place, on leur annonce sans ambages la mort d'Endre, le fils d'Agota, ingénieur chimiste parti en mission en Birmanie il y a 6 ans de cela sans plus jamais donné de nouvelles à sa famille. Le jeune homme est mort en 1908 mais l'information a mis longtemps à atteindre la France. D'Endre ne reste plus qu'une vieille malle contenant des nippes difficilement identifiables. Si Agota se résigne, Gabrielle accepte mal la mort de son cousin qui était aussi l'homme qu'elle aimait de tout son cœur de jeune fille. Elle voudrait connaître les circonstances de ce décès inattendu et pour cela, aiguillée par un obscur gratte-papier du ministère, elle se présente pour un poste d'institutrice chez le Docteur Pierre Galay, l'homme qui aurait expédié la malle depuis la Birmanie. C'est Madame Mathilde, matriarche de la famille Bertin-Galay, à la tête d'une prospère biscuiterie, qui la reçoit et l'engage. Elle devra s'occuper de l'éducation de la petite Millie, fille de Pierre et orpheline de mère. L'enfant est de santé fragile et sa grand-mère a décidé qu'elle irait mieux, loin de Paris, dans leur maison de campagne du Mesnil. C'est donc par ce biais que Gabrielle entre dans la famille Galay, premier pas dans sa quête de vérité sur la mort de son premier amour. Elle ne sait pas qu'elle vient de mettre le doigt dans un engrenage qui mettra sa vie en danger.
Coup de cœur absolu pour cette somptueuse fresque qui mélange les genres avec bonheur et bénéficie de la sublime écriture de son auteure.
Dans la main du diable est d'abord un roman initiatique porté par le charisme de son héroïne, Gabrielle, jeune femme du début du siècle qui s'émancipe et suit la voie de ces femmes libres qui ne veulent plus subir le joug d'un mari omnipotent. Le chemin est long, les lois sont iniques mais des perspectives s'ouvrent pour celles qui ne veulent plus se faire dicter leur conduite par les hommes.
C'est aussi un roman d'amour, le premier, celui d'une jeune fille pour un homme insaisissable, le cousin idéalisé, paré de toutes les qualités. Comme tous les premiers amours, elle le croit le dernier et même la mort ne peut effacer les sentiments forts et absolus qu'elle porte en elle. Mais est-ce le vrai amour ? Gabrielle apprendra qu'il existe une autre forme d'amour, une vraie communion de deux êtres, sensuelle, physique, passionnée, bien loin de l'attachement sentimental et romantique d'une presque enfant pour une chimère.
Mais Anne-Marie GARAT ne s'est pas arrêtée là. Elle réussit aussi une saga familiale en racontant les destins d'une famille de biscuitiers parisiens, enrichis durant la guerre de 1870 et qui continue à prospérer en ce début du XXè siècle. L'union des Bertin, fondateurs de l'entreprise, petits bourgeois commerçants et des de Galay, aristocrates rentiers, fait des merveilles, surtout grâce à Madame Mathilde, digne héritière de son père, qui mène ses affaires et son monde d'une main de fer. Débarrassée d'un mari qui préfère jouer les globe-trotteur, elle dirige seule l'usine parisienne et régente la vie de ses quatre enfants à la manière d'un despote. Son seul souci est sa succession qui s'avère difficile. Pierre est chercheur à l'Institut Pasteur, Daniel s'est entiché de cinéma et Blanche et Sophie ne sont que deux oies blanches sous la coupe de leurs époux.
Le destin des Bertin-Galay, de Paris au Mesnil, entre respect des convenances, petites mesquineries en famille et nombreuse domesticité, est un condensé de la France du patronat à la veille de la première guerre mondiale.
Tout cela mène naturellement l'auteure vers la fresque sociétale et historique. C'est toute la France du début du siècle qui revit sous sa plume : émancipation des femmes, premières grèves ouvrières, mécanisation du travail, montée de l'anarchisme et du syndicalisme, début du cinématographe, crise nationaliste, impuissance des pacifistes, fragilité de la Troisième République, etc.
Et pour finir, Dans la main du diable est aussi un fabuleux roman d'aventures qui se promène du côté des colonies, un roman policier à suspens avec une enquête criminelle menée par un commissaire Louvain, fin connaisseur de la nature humaine et peu enclin à obéir à une hiérarchie jugée trop frileuse, un roman d'espionnage qui met en scène les services secrets, les cabinets occultes, des hommes prêts à tout pour rétablir la grandeur de la France et intriguent pour mettre la main sur l'arme chimique.
On l'aura compris, Dans la main du diable est un livre extra-ordinaire, un roman-fleuve terriblement addictif qui ne se lâche plus une fois commencé et emporte dans un tourbillon d'aventures et de sentiments. C'est le souffle de Zola et d'Hugo qui a inspiré Anne-Marie GARAT, une auteure à la plume enchanteresse qui sait passer d'un univers à l'autre, d'un niveau de langage à l'autre, d'un personnage à l'autre avec une maîtrise digne des plus grands. A lire évidemment !
Pourquoi lire ce livre ?
- pour le récit, le voyage initiatique, facilement comparable à l'avancée de notre propre vie ;
- pour l'héroïne : ce personnage qui peut déplacer des montagnes. Elle a la présence et le charisme qui lui permet de s'imposer, la volonté d'aller toujours plus loin, l'ambition. Et ça marche, rien de l'arrête.
Un véritable cadeau que ce roman fleuve qui sait combiner les genres (romantique, policier, peinture de société), ciselé par une plume admirable : Gabrielle nous entraine et nous transporte au sein d'une foisonnante galerie de personnages dans une époque troublée en pleine mutation. Follement romanesque, un délice de lecture !
Mieux vaut ne pas avoir quelque chose d'urgent à faire : impossible de lâcher la main du diable...
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