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Début août, dans un site montagneux, près d'un lac, deux hommes, un jeune et un vieux, s'ignorent.
L'un cherche du travail. l'autre a trouvé une maison pour les vacances, il emménage. ils ne peuvent donc pas se rencontrer. sauf si le jeune trouve du travail, c'est la première condition. la seconde, ce serait que le vieux ait besoin des services du jeune. en vacances, normalement, non. c'est pourtant ce qui va se passer. comme si c'était écrit. ça l'est, mais ce n'est pas aussi simple. il y a des femmes dans cette histoire.
Le titre « Be-Bop » et en couverture, la remarquable photo de Charlie Parker (signée Dennis Stock – Collection Magnum), donnent le « LA » de ce roman au texte syncopé.
Christian Gailly, avec un style qui swingue et un rythme aux multiples directions et tempos, épouse le discours intérieur de Basile Lorettu, un jeune altiste passionné de jazz et admirateur inconditionnel de Charlie Parker.
Chaque dimanche, il joue avec quatre autres musiciens dans la crypte d’un monastère qui surplombe le lac Léman pour un public fidèle à la musique de jazz et qui aime danser sur les airs endiablés du be-bop. Pendant la semaine, pour alimenter son quotidien, il travaille dans une entreprise d’assainissement, au cul d’un camion de vidanges.
Dans la seconde partie du livre, on rencontre un quinquagénaire venu en vacances avec Jeanne dans une maison au bord du lac.
Un admirateur de Coltrane qui a raccroché le saxo ténor il y a plus de vingt ans.
La fosse septique de la villégiature trop pleine, bouche les tuyauteries. Le propriétaire fait appel à l’entreprise. Basile Lorettu intervient avec son camion.
C’est ainsi que se fera la rencontre quasi improbable entre les deux hommes éloignés par leurs classes sociales respectives.
Ils se recroiseront par la suite en compagnie de leurs amoureuses sur le ferry de retour d’Yvoire.
Une Jeanne maritalement claustrale et une Cécile farouche tout en retenue qui fait penser à Lorettu que « il est bon d’être loin, et pas loin à la fois. »
Comme Basile, Paul a joué en semi-professionnel. Il ne pourra pas s’empêcher d’aller écouter le quintet jouer au monastère.
Entre Basile et Paul, l’enthousiasme d’une discussion sur le jazz qui dévoile leurs goûts communs pour Chet Baker, Gerry Mulligan ou Monk, rallume la flamme de la passion chez Paul. Il finira sur scène pour jouer un blues très simple avec un phrasé proche de celui de Coltrane.
« Je n’ai jamais réussi à en vivre, dit Paul. On en crève plutôt, dit Lorettu. C’est ça, dit Paul, j’ai eu peur de ça. »
Ce livre nous parle de ce qu’on aimerait être et de ce qu’on est. Il est bourré de nos propres sentiments d’incertitude. Il est plein du souffle de la passion et de la raison. D’accords et de désaccords avec nous-mêmes.
Parsemée de petites touches comme les notes de partitions finissent en s’assemblant par créer une œuvre, l’écriture reconnaissable au style musical et unique de Christian Gailly est celle d’un très grand écrivain porté par Jérôme Lindon aux Éditions Minuit.
Une écriture d'une pureté incroyable, une rythmique sans faille. C'est beau.
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