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Un mois après le tremblement de terre de Kobe en 1995, les secousses continuent dans le coeur des Japonais... Les séismes intérieurs déplacent les solitudes ordinaires, réveillent les consciences endormies ou ravivent le feu de la vie. A travers six variations, Murakami effleure, avec une infinie délicatesse, la faille intérieure présente en tout être.
Tranches de vie mystérieuses, troublantes et poétiques, ces nouvelles magistrales nous disent que la vie en ce monde n'est qu'un rêve, évanoui en un rien de temps.
Biba Traduit du japonais par Corinne Atlan
Haruki Murakami était aux Etats Unis lors du tremblement de terre de Kobe en 1995, à Princeton. Cette catastrophe le submerge et bouleverse quelque chose en lui : il ressent un besoin quasi viscéral de revenir à ses racines.
Les six nouvelles que comprennent le livre exposent au lecteur les catastrophe comme elles sont ressenties par la population : leur vie se transforme, quelque chose est rompu en eux.
L'écriture de l'auteur :
Comment ne pas tomber sous le charme de cet auteur qui parvient à créer une atmosphère, un monde en quelques lignes. Il a ce génie dans l'écriture, une prouesse artistiques qui émeut. Le verbe est bien choisit, il n'y a pas de futilité ou de longueur dans le texte. Chaque mot à sa place, et c'est ce que j'apprécie dans l'écriture de Haruki Murakami : les mots sont justes et pertinents. Haruki Murakami a aussi cette délicatesse de ne jamais laisser les portes se refermer à la fin d'une de ses histoires : au contraire, liberté est laissé au lecteur d'imaginer la suite, la fin comme il l'entend. Cela permet aussi d'imaginer que ses personnages poursuivent leur vie, sans fin, comme tout un chacun.
Piochant des moments de vie simples, il en crée un monde à part, et c'est avec fascination qu'on découvre au fil de la lecture qu'un moment simple comme un feu de plage peut être rempli de force et de puissance.
Les nouvelles :
Au nombre de six, elles sont énigmatiques et les thèmes récurrent sont la solitude, le vide, la mort, l'autre. Elles sont semblables par leur puissance métaphorique mais aussi par ce côté impalpable, une sensation brumeuse d'avoir englouti le bonheur au fond de soi et de ne pas arriver à en retrouver le chemin.
Il y a l'histoire de cet homme qui s'en va vers Kushiro à la demande d'un de ses collègues. Son épouse ne cessait de regarder les informations sur le drame de Kobe et a finit par disparaître. Seul repli pour lui, partir, et sans destination, c'est son collègue qui lui offre l'opportunité d'aller ailleurs, loin de ce drame. Il y fait la rencontre de deux femmes...
Sous le voile de la nuit au bord de mer, et dans l'observation extatique d'un feu de camp, Miyake et Junko essayent de comprendre ce qu'ils sont, et expriment parfaitement cette sensation de vide.
Vient ensuite une recherche d'identité, d'un jeune homme, fils du Seigneur comme le lui a répété si longuement sa mère. Il prend conscience de son être et de sa normalité. En recherchant son père il se trouve lui même.
Sous fond de Jazz, Satsuki décide de rester en Thaïlande après son séminaire et de prendre une semaine de repos. Durant toutes ses sorties, elle se pose des questions, se remémore des moments passés. La musique la suit, le chauffeur de taxi qui l'accompagne partout se fait miroir de ses questionnements.
Crapaudin sauve Tokyo d'un terrible tremblement de terre avec l'aide de Katagiri. Dans les mythes japonais, les séismes sont causés par un poisson chat Namazu, et on retrouve toutes ces croyances dans un récit incroyable.
Triangle amoureux, complexité du sentiment amoureux et non dit. La dernière nouvelle tangue, avance et recule à mesure que les protagonistes révèlent la vérité sur leur sentiment, avec l'application d'une petite fille au centre de l'histoire, aussi espiègle qu'adorable.
Le mystère entourant ses nouvelles et cette sensation d'envoutement est propre à Murakami : il n'est nul besoin de suspens pour apprécier son écriture, et on retrouve dans ces nouvelles le savant mélange de la suggestion, du rythme lent et lancinant de la vie et aussi de l'espérance. Aucune nouvelle ne finit de façon abrupte, et cela permet au lecteur d'imaginer la suite.
Plus que des nouvelles, Murakami donne du sens au quotidien, et au lieu d'exprimer uniquement l'horreur du séisme, il se projette et essaye d'imaginer dans ses nouvelles les retentissements sur la population japonaise : marquée et meurtrie, elle essaye de survivre, malgré les changements intrinsèques à leur vie.
On ne garde pas en mémoire au long de cette lecture ce séisme, on oublierait presque ses ravages, telle une cicatrise que l'on essaye d'atténuer.
On note aussi cette impression liée à toutes les histoire : on a l'impression en lisant ces nouvelles qu'il y a une menace toujours présente, et qu'il faut toujours s'attendre à ce quelque chose se produise.
Voici six nouvelles, indépendantes les unes des autres, avec en toile de fond le tragique tremblement de terre qui a touché Kobe le 17 janvier 1995. Six nouvelles tout en délicatesse, où les non-dits sont nombreux, les failles bien présentes, et où un évènement anodin va tout remettre en question. Car si le tremblement de terre n'a touché aucun des personnages du recueil directement, il sert de catalyseur à leurs doutes, à leurs questionnements. Amour, amitié, solitude, acceptation de soi, vie et mort... les thèmes abordés dans ces nouvelles sont nombreux et nous incitent à réfléchir au sens de la vie.
Le style de l'auteur est très agréable à lire, le texte se déroule devant nos yeux avec fluidité et nous entraîne doucement à la découverte de tranches de vies et de personnages attachants ; et, comme souvent avec Haruki Murakami, il n'y a pas de dénouement clair à ces histoires, c'est au lecteur d'imaginer la fin qui lui plaît...
J'ai trouvé que les nouvelles n'étaient pas de qualité égale : j'ai tout particulièrement aimé Paysage avec fer, Thaïlande et Crapaudin sauve Tokyo, par contre Un ovni a atteri à Kushino m'a laissée de marbre. Cependant les nouvelles sont variées, je pense que chaque lecteur peut y trouver son compte...
Le tremblement de terre de Kobe (1995) a fait plus de 6 000 morts et a marqué toute une génération de japonais. Il a aussi provoqué le retour au Japon de Haruki Murakami, qui s’était exilé aux États-Unis, et il a fourni à l’auteur le matériau sur lequel celui-ci a élaboré le recueil de nouvelles Après le tremblement de terre. Six textes, dans ce livre, qui propose un regard sur l’existence d’individus différents, avec comme personnage de récurrent cet événement particulier. Six textes dans lesquels la vie continue, complètement bouleversée ou tout juste un peu changée : c’est l’absence d’une mère, une épouse qui s’en va, une folie qui se déclenche. De manière brutale ou par petites touches, c’est l’existence de tous qui se trouve affectée par la catastrophe.
Ce qui est intéressant dans le livre de Murakami, c’est qu’aucun des personnages n’est une victime immédiate du séisme. Pourtant, de par sa sensibilité, son vécu, ses liens avec les autres, chacun s’approprie la catastrophe pour la vivre d’une manière qui lui est propre.
Comme dans tout recueil de nouvelles, certains textes m’ont plus touchée que d’autres. Néanmoins, j’ai été globalement émue par ces personnages, qui, comme souvent chez l’auteur, sont spectateurs du monde, mais spectateurs actifs de par la manière dont chacun investit le désastre d’un sens qui n’appartient qu’à lui.
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