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« J’ai été Robert Smith une nuit, une soirée du moins. » Daniel Bourrion est jeune. Dans les années 80, il va vivre une soirée émancipatrice. Dans un village en Lorraine, où la campagne assigne les replis, les mouvements ordonnés, les jours semblables les uns aux autres il va bousculer l’ordre établi. « Qu’on s’imagine donc, ce que c’était que de faire ça, se laisser les cheveux pousser jusqu’au plancher au moins (on exagère un peu, disons jusqu’aux épaules) et puis un soir en faire une chose ébouriffée. » Daniel Bourrion se prépare, maquillage, mimétisme : Robert Smith. « Une rencontre imparable. » Ce récit d’une transmutation est un kaléidoscope sociétal et sociologique. On aime le style poli digne d’un génie évident. L’écriture qui nous murmure à l’oreille l’idiosyncrasie d’une époque, de sa propre vie, toujours d’une voix douce dont on voudrait retenir à jamais les sons des confidences. « Quand moi, j’aurai tourné la page, celle de ces années où je voulais être lui parce que je ne parvenais même pas à être moi et donc que grimé, il me semblait que le monde serait vivable, ce qu’il n’était toujours pas. » Daniel Bourrion est ici. Le dos collé au mur, il ne bouge plus. Les pensées s’entrechoquent. Les images remontent à la surface. Le maquillage coule et sa carapace s’effrite. Il rassemble l’épars de sa vie, de cette existence dans une campagne sublime car authentique ; où ne passe que les migrations d’espérance, trop hautes dans le ciel pour les toucher du doigt. On aime cette teneur certifiée, pleine de sève remontante, regain en devenir. Robert Smith, son double cornélien est la métaphore des risques. Le passage de l’enfance vers cet advenir existentiel, le brouillard opaque fragilise ce qui l’interpelle. « Ce soir-là ils joueront « Just Like Heaven » manière de cantique sautillant tombant à pile, chacun entend la messe qu’il veut, moi mon dieu c’est Robert. » « Robert a tant de corps… Les fans dont certains sont les enfants, petits-enfants peut-être de ceux de la première heure _ Il faut porter ici cette légende aux racines vraies possibles. » Le charme de cette trame est une invitation. Fouler les fragments qui remontent à la surface subrepticement, tous sont ce parcellaire écarquillé offrant la véracité. La musique à fond couvrant la quête de soi. « Dans la fosse cependant sautillent encore ceux qui, dans leur passé, usés jusqu’à la corde, parlent toujours dravant même s’ils sont juste ici, maintenant. » Ce texte solaire, puissant est celui d’une époque fiançailles d’une contemporanéité placée au plus juste. « J’ai été Robert Smith » est un récit initiatique. « Le dernier jour enfin » page 81 est à apprendre par cœur. La clef est ici. « C’est un silence qui est le silence du silence. » Ce récit est bouleversant tant son intrinsèque est fusion. Les morceaux d’architecture sont des myriades. L’aura d’un Robert Smith qui sera le levier pour Xavier Bourrion. Le renom est au cœur de « J’ai été Robert Smith ». Je l’ai lu trois fois, annoté, il est de bleu nuit qui perce au travers des doutes. Je le relirai encore, demain dans un jour d’incertitude comme le plus bel escompte hyperbolique du futur. Magistral. Publié par Les majeures Éditions Publie.Net.
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