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« Ordinaire », ce roman noir d’Audrey Najar n’en a que le titre. Malgré son genre littéraire, la littérature noire, il vous fera ressentir une pléthore d’émotions. Cela a été mon cas, chose assez rare quand je me plonge dans ce type de bouquin ;
Hervé est un anti-héros dans toute sa splendeur car il mène une vie horriblement banale. Jeune retraité après avoir vendu des pneus durant plus de 40 ans, il doit aménager son temps seul avec son chien, alors que son épouse travaille encore. Il habite un petit appartement, à Alfortville, dans une copropriété banale, un voisin ordinaire comme nous en connaissons tous.
Son quotidien va se trouver ébranler par l’arrivée de nouveaux locataires, une famille jeune, aisée avec deux enfants. Alors que son épouse imagine en faire de nouveaux amis, Hervé voit cette apparition d’un mauvais œil, jalousement, et ce, jusqu’au drame final.
Par son premier roman, l’autrice Audrey Najar dresse le portrait d’un anonyme parmi tant d’autres, dont les échecs prennent le pas sur les réussites alors que le bonheur brille de mille feux pour les autres.
Jusqu’alors banale, la vie ordinaire de cet homme se trouvera bouleversée par deux événements, somme toute ordinaires, mais dont les répercussions engendreront un effondrement psychologique.
Par la finesse de la plume de l’autrice, on subit nous aussi lecteurs, de plein fouet, ces ébranlements au même titre qu’Hervé. Même si le roman est assez court, Audrey Najar parvient à parfaitement décrire cette descente aux enfers, sinistre avec beaucoup de réalisme.
Sans avoir besoin de quelconques artifices inutiles, ce premier roman est diablement prenant et efficace. Une lecture percutante à ne pas laisser passer !
Un roman comme un café parisien, court et noir, bien noir. Hervé, c’est un peu l’arbre mort mais qui se serait laissé crever en pleine ville. Au milieu d’une forêt d’hommes et de femmes encore actifs, toujours bien vivants, tous dédiés encore à une existence hors de l’immeuble : un travail, des responsabilités, des amis, des amants ou maîtresses. Lui, retraité d’avant réforme, il se sent creux, le tronc pas même habité de quelques intrus des bois, juste la sève des litres d’alcool avec lesquels il s’arrose, pour se sentir vibrer, ou pour s’oublier ? Allez savoir. Il n’y a guère que le chien qui le comprend vraiment… Ou pas. Billy ne fait peut-être que semblant, pour qu’Hervé continue à le sortir. Pourtant, Hervé a encore sa femme, Elisabeth. Elle l’aime, le regarde, l’écoute, lui pardonne.. Ou bien cherche-t-elle juste à l’embrouiller pour la lui faire à l’envers, dehors, avec un autre ? C’est que rien n’est sûr en ce monde. Et encore moins dans cette copro. Bien davantage depuis que la voisine du dessus est morte et que son appartement a été repris par les Kobon. Ils ont l’air gentils pourtant, ces nouveaux voisins…
Citation : « Il y a eu des fêtes et des éclats de rire. Comment la nuit a-t-elle fait son nid si discrètement ? Soustractions de battements de coeur. Il suffit parfois de bien peu de choses pour que l’ordinaire vole en éclats. Une succession de broutilles, la faute à pas de chance. »
Un premier roman à découvrir sans réserve si vous aimez les petits cafés noirs et bien serrés, Audrey Najar y a trempé sa jolie plume pour vous concocter un nectar bien amer.
Avant d'ouvrir le livre, la couverture nous happe, nous saisit, nous inquiète avec le regard fixe et glaçant de cet homme en gros plan. Lorsqu'on le referme, on comprend qu'elle est en parfaite adéquation avec le roman.
Celui-ci commence, un 3 décembre, par la découverte d'un corps qui gît dans la cour d'une copropriété, se vidant de son sang. Nous repartons en arrière, 10 mois auparavant.
Hervé, 65 ans, marié depuis 40 ans à Elizabeth, vit depuis plus de 30 ans dans une copropriété à Alfortville. A la retraite depuis 2 ans, après avoir vendu des pneus toute sa vie, il se sent inutile, marginalisé, boit un peu trop; son seul plaisir, c'est de sortir son chien Billy. Son père a quitté sa mère alors qu'il n'était pas né, son fils unique est mort à 3 ans de leucémie, il y a 36 ans. En juillet, s'installe au-dessus de chez lui, une famille avec 3 enfants et un chien, les Kobon. Ils sont jeunes, brillants, heureux. Ils renvoient Hervé à ses échecs. Hervé les envie, les jalouse jusqu'à ce que deux évènements dont les Kobon sont acteurs, conduisent au drame.
Nous assistons, impuissants, comme l'est sa femme, au délitement psychologique d'Hervé. Les voisins du dessus cristallisent toutes les rancoeurs accumulées depuis l'enfance ( il a déçu sa mère, il était mal dans sa peau, traité de bouboule par les autres enfants, tenu à l'écart). Il ne supporte plus de voir des parents heureux , lui qui pense à son fils chaque jour. On le voit petit à petit s'enfoncer dans la paranoïa, rongé par la jalousie, la méfiance, le ressentiment, la haine, sentiments amplifiés par l'alcool.
Audrey Najar décrit parfaitement le processus qui fait d'un homme ordinaire, profondément blessé par la vie, frustré, un monstre ordinaire. Elle crée une atmosphère lourde, pesante, angoissante. Même si Hervé se transforme en monstre sous nos yeux, l'auteure fait en sorte qu'il reste malgré tout profondément humain à travers l'amour sincère qu'il porte à sa femme, ses efforts pour sortir de l'alcool, selon l'adage mis en exergue sur la couverture : "Il n'y a pas de gens méchants, il n'y a que des gens malheureux". Ce roman m'a rappelé un autre personnage d'homme ordinaire qui se transforme en monstre par envie, jalousie, frustration dans un roman que j'avais beaucoup aimé "Des gens comme eux" de Samira Sédira, paru en 2020, inspiré de faits malheureusement réels, la tuerie du Grand-Bornand en 2003.
Primo-roman magistral, auteure à suivre.
Audrey Najar signe un premier roman "normal" et captivant en dépeçant le quotidien d'un homme jusque-là ordinaire.
Depuis qu'il est retraité, Hervé vit un quotidien sans surprise.
Il semble végéter dans une espèce d'état second, il n'est plus qu'un homme en attente.
Certes c'est un voisin sans histoire, un petit retraité bien au chaud dans ses pénates, qui promène son chien, passe parfois au bistrot du coin et prépare quelques bons petits plats lorsque sa femme rentre du travail.
Mais une vie, se résume-t-elle à ça ?
Qu'est-ce qui fait de nous des hommes et des femmes "en vie" ? Suffit-il qu'un de ces rouages bien huilés finisse par lâcher pour que tout déraille complètement ?
"L'enfer, c'est les autres" dit Sartre : l'arrivée de nouveaux voisins un peu trop "parfaits" va bousculer Hervé.
Tout à sa frustration de n'être qu'un homme ordinaire (ça et peut-être aussi un peu trop d'alcool…), il va se mettre à les épier de manière obsessionnelle pour prouver que ses doutes sont fondés, sa répulsion légitime.
Une écriture qui décortique et qui raconte sans jamais juger.
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