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« Je connais de l'intérieur cet univers totalitaire, exterminateur. Je suis un naufragé, entouré d'ordinateurs. Je m'accroche à ce poème de Charles Juliet qui me laisse un peu d'espoir : « si tu n'as pas/ connu/le naufrage/impossible/de gagner/la haute mer/le naufrage première porte de la connaissance » Je suis devenu dépendant de mon smartphone, mon bras armé, ma croix, ma brûlure intérieure. Je me sens un exilé. Je ne joue pas Victor Hugo persécuté par l'empereur, prenant la route de Jersey puis de Guernesey. Mais je choisis la force océanique contre le nuage informatique. Nous vivons désormais en territoire occupé. J'ai l'impression d'être un collabo, un criminel envers mes enfants : je les ai laissés se faire contaminer. J'aurais dû leur apprendre ce que nous pouvons faire de nos mains et nous contenter du grec, du latin car depuis rien de nouveau sous le soleil. Tout clic informatique est une pulsion de mort. Et moi, je choisis la vie.
Nous savons qu'un complot mortifère sape nos sociétés.
Je dis et redis à mes enfants : les écrans ce n'est pas la vie. Ils détruisent le plus beau divertissement, l'ennui, le temps perdu, la rêverie. Le numérique ce n'est pas un changement technique, c'est le global deshumanisé. Il y a comme un hic. Où sont les siestes dans la chaleur grésillante de l'été et le blé en herbe, les yeux vers le grand ciel ? » Dans cet essai d'humeur, ce pamphlet contre le totalitarisme des écrans, Olivier Frébourg oppose le temps de la poésie, la beauté et la lenteur pour sortir de l'accélération du temps et de l'enfer des écrans.
Baisser le ton, le son, calmer le flot de paroles vaines qui viennent de toutes parts... Commencer par éteindre les écrans, s'éloigner des réseaux sociaux, mettre à distance le numérique... et s'écouter lire ou réciter... de la poésie.
Faire silence, donc, pour ouvrir notre espace, l'élargir aux choses, aux phénomènes, pour mieux voir, mieux entendre, mieux écouter, mieux sentir... Redevenir maître de soi...
Et si Olivier Frébourg était un nouveau Don Quichotte ? Intrépide et ne cédant en rien au politiquement correct face à une invasion d’armes de destruction massive, celles-ci soi-disant conventionnelles sans que cela fasse réagir quelconque organisation non gouvernementale : les écrans. Même si la ligne rouge risque d’être franchie, l’écrivain éditeur propose un remède, lui aussi universel avec une efficacité restée et approuvée : la poésie avec un ingrédient majeur, la beauté. Un antidote testé depuis l’antiquité : « Les Grecs nous ont appris la magnificence de l’instant pur, de la jouissance du présent. Les Romains les ont suivis sur cette voie. « Laetus in praesens animus » (Horace). Et cette beauté de l’instant ne doit pas nous être ravie ».
Un ouvrage précieux qui se lit avec lenteur pour savourer les envolées scripturales, les nombreuses citations et découvrir que l’on peut transformer l’encre en velours même lorsque d’aucuns s’attachent à inscrire sur papier leur esprit d’acier. Néanmoins, votre serviteur est loin d’être aussi révoltée contre les ordinateurs et autres smartphones, ces appareils ayant un côté salutaire pour qui les utilise avec sagesse et bienveillance. Ironie du sort, ma chronique se sera visible que sur écran et peut-être n’aurais-je jamais eu ce livre entre les mains – pardon les pattes – sans les réseaux sociaux.
Véritable plaidoyer pour un retour aux relations humaines, au goût du contact, à l’authenticité, Olivier Frébourg navigue sur les vers poétiques, Baudelaire, Apollinaire, La Fontaine, Villon, Becker, Rimbaud – coucou Sylvain Tesson – Pessoa…, tout en dressant un tableau des maux de notre siècle qui s’éloigne des mots. Le tout en rendant hommage aux livres, aux bibliothèques, à la littérature en particulier et à l’art en général. Un appel pour retrouver la beauté du monde, pour renouer chaque destin à ce qui fait la vraie vie, à rejeter cette laideur du voyeurisme sociétal. Avec une bonne claque à cette horrible expression et directive de l’ « obsolescence programmée.
Cet ouvrage est aussi un voyage. Une excursion en dehors des chemins que l’on veut tracer à notre place, une balade sur des sentiers bordés des petites choses de la vie et qui méritent bien plus notre regard, une navigation pour s’éloigner des carcans imposés, une escalade vers la beauté en s’agrippant à ce qui reste le plus solide de tout : notre capacité à ne pas effriter les précieuses roches de l’onirisme. Même si les outils numériques restent un élément incontournable, ne pas céder à l’enfermement et s’évader vers des ondes enivrantes, celles de la liberté.
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