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Une histoire d'amour impossible entre deux étudiants idéalistes, une française et un sénégalais, dans le Dakar des années 1980, où l'apprentissage de l'autre, au-delà des frontières, des cultures et des traditions, s'avère difficile. Ousmane, jeune sénégalais de condition modeste et Mireille, française, fille de diplomate, se rencontrent sur les bancs du lycée, à Dakar. Ils se marient, au grand damne de leurs familles respectives. Mireille coupe les ponts avec les siens et se convertit à l'islam. Ousmane impose sa femme à ses parents, catastrophés. Un fils naît de cet amour, Gorgui. Mais le poids des traditions et la pression sociale et familiale auront raison de leur amour...
Un roman raririssime d'une autrice elle aussi peu prolixe ..
Mais quel génie.et sensibilité..! Mariama Ba amul moroom...
Son écriture coule de source..
Décrit très bien le drame des couples mixtes quand l'homme n'a pas le courage d'affronter sa famille...
« Une si longue lettre » m’avait emballée, alors dans les propositions de Masse Critique, j’ai coché, entre autre, ce livre et j’ai eu la chance d’être tirée au sort.
Ousmane, adolescent, habite le quartier d’Usine Niary Tally et doit se rendre à pied au lycée, les transports en commun sont trop chers pour lui. Il est, pour sa mère, le fils parfait car il va chercher l’eau au puits, l’aide dans quelques tâches ménagères ce qui ne se fait pas du tout… Son statut de mâle en prend un sacré coup
Mireille, jeune fille de diplomates en poste à Dakar, fréquente le même lycée et une histoire d’amitié qui se transforme en histoire d’amour se noue entre eux.
Las !! lorsque le père découvre une photo du jeune homme dans les affaires de sa fille, il l’expédie illico presto en France où elle participe activement aux évènement de mai 68.
Pourtant, leur amour survit, ne s’étiole pas et ils décident de se marier, elle d’embrasser la religion de son mari et…. retourner au Sénégal.
Dans une lettre adressée à son père, Djibril Guèye,Ousmane écrit
« Je me suis marié ici avec « mon actrice ». C’est l’amie qui t’a offert la montre de proche qui rythme tes prières. Elle était ma fiancée… Si j’ai réussi, si je suis ta fierté comme tu dis, si j’ai comblé tes désirs, si tu es loin de la poussière d’Usine Niary Tally, si tu vois d’un œil plus calme les trimestres s’étirer, c’est à elle que tu le dois. Entreprendre est difficile pour un homme seul… Mireille m’a permis, par un soutien moral constant, de me réaliser. Elle était devant moi, comme un flambeau, illuminant mon chemin »
Quant à Mireille, la lettre à ses parents est tout autre : « Quand vous recevrez cette lettre postée la veille de mon départ, je serai déjà loin de vous, évoluant dans ma nouvelle famille sénégalaise. Majeure et responsable, j’ai épousé à l’état-civil, puis à la mosquée de notre ville, après avoir embrassé la religion islamique, Ousmane Guèye, professeur de philosophie… Son nom reste attaché à la petite photographie qui m’avait valu le rapatriement. »
A la lecture de leur lettre, la mère d’Ousmane fulmine de rage « Une tubaab ne peut pas être une vraie bru. Elle n’aura d’yeux que pour son homme. Nous ne compterons pas pour elle. Moi qui rêvais d’une bru qui habiterait ici et me remplacerait sur les tâches ménagères et prenant la maison en mains, voilà que je tombe sur une femme qui va emporter mon fils. »
Tout est dit. La haine pour la blanche, celle qui ne lui permet pas de briller, de parader dans sa société, auprès de ses voisines.
La haine est mauvaise conseillère et fait ressortir le pire en chacun de nous. La mère n’aura de cesse de mettre dans sont lit et avec son accord, son ancienne copine d’école qui a tout ce qu’il faut là où il faut avec amulettes et philtres en sus.
Quelle débauche lorsque, enceinte, Ousmane se doit d’épouser Ouleymatou. J’ai été choquée de voir l’argent circuler à ce point, les femmes prendre plaisir à déplumer le portefeuille d’Ousmane.
Ousmane et sa double vie ne se rend plus compte de rien.
Avec Mireille, il doit faire attention, il ne connaît pas tous les codes de la vie occidentale d’une vieille famille française ; comment positionner toutes les cuillères et fourchettes, manger sobrement, se laver les mains... Il se sent diminué, élève. Alors que avec Ouleymatou, il mange avec les doigts, piochant dans le plat et elle est à ses pieds, bref, il règne… Et sa mère est ravie du mauvais tour qu’elle joue à la blanche
Ousmane se sent dans l’obligation de revendiquer sa négritude lui qui a fait des études de philosophie, qui est prof de philo pour prouver, en quelque sorte, qu’il n’a pas changé et qu’il fait toujours partie de leur communauté. Ainsi, il se remet à porter l’habit traditionnel. « Il opposait à la grande volonté de Mireille le durcissement de ses positions. Même lorsqu’il avait tort, il tenait tête. Tout compromis, tout recul, lui apparaissaient comme l’abdication de sa personnalité. »
Le couple se délite, la tragédie arrive inéluctablement. Mireille ne connaît rien de la double vie de son mari même si elle sait qu’il a une maîtresse et, l’arrivée d’un bébé ne change rien. « Pathétiquement, Mireille choisit de rester. Elle ne trouvait aucune grandeur à son attitude. Son option n’était pas non plus fuite ou lâcheté, mais la seule possible quand on aime… Quand on a dans les bras un enfant nègre… quand derrière soit on a tout brûlé. »
Lorsque l’indicible arrive Ousmane se réveille, un peu trop tard « Un dégoût nauséeux de lui-même le submerge. Fou à lier, il avait contaminé Mireille. »
A travers cette tragédie, Mariama Bâ raconte la difficulté des mariages mixtes exacerbée ici avec la très (trop?) grande différence sociale. Ousmane n’a pas su ou pu faire face au poids des traditions.
Comme dans l’excellent Une si longue lettre, Mariama Bâ décortique, critique sa propre société avec ses traditions et la belle lâcheté des mâles.
L’obéissance aux règles traditionnelles est complètement porté par les femmes elles-mêmes ; elles conduisent leurs filles vers ce qui les a fait souffrir… c’est une chose qui m’interpelle encore et toujours…
Un livre dur, combien de fois j’ai eu envie de gifler Ousmane et son entourage, mais encore d’actualité
Avec Un chant écarlate, dont c’est leur premier « bébé » je découvre une nouvelle maison d’édition qui se définit ainsi : Les éditions Les Prouesses est une maison d'édition indépendante, féministe et ouverte sur le monde.
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