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Autour de la figure de Bénia Krik, le «Roi» d'une pègre de gangsters, de charretiers, de contrebandiers, s'ordonne le petit monde du quartier juif de l'Odessa des bas-fonds que met en scène - comme un hommage à ses origines - Isaac Babel.
Ici, pourtant, le petit Juif persécuté de l'imagerie de son enfance devient - par le retournement de la fiction - le beau et fort roi des voleurs d'Odessa. Capable de marier une soeur contrefaite, et même, en commanditant l'incendie du commissariat, capable d'empêcher que la cérémonie soit troublée...
C'est bien une fresque baroque, colorée, grouillante de vie et pleine d'humour que dessine ce recueil.
Quand on lit Isaac Babel, on lit avant tout une écriture d’exception.
Ce recueil en 3 parties, signé en 1927 et publié en 1931, hante la ville d’Odessa avec de courts récits qui décrivent ‘La perle de la mer Noire’, ou encore ladite ‘Petite Marseille slave’ (actuellement jumelée à Marseille) quand déjà, la plume d’Isaac Babel témoigne en filigrane, de son époque dans le quartier juif de la Moldavanka, situé dans les bas-fonds de la ville, après diverses occupations turc et tatar entre autres, épidémies, famines et deux pogroms dont un vécu par l’auteur quand il était enfant.
La première partie, entre réalisme et contes, les Récits d’Odessa mettent en scène avec beaucoup d’humour, Bénia Krik, dit le Roi, chef d’une bande de voleurs et contrebandiers, pour décrire la pègre juive d’Odessa au sein de l’empire russe, la fin du tsarisme, l’avènement bolchevik, l’arrivée de l’Armée Rouge et des enquêteurs de la Tchéka.
Avant l'histoire en elle-même, c'est l'écriture de Babel qui domine les textes.
La deuxième partie est faite de récits annexes complémentaires tirés d’autres écrits édités dans des revues pour certains et incomplets pour d’autres.
La troisième partie est faite de nouvelles regroupées sous le titre ‘Premiers écrits’ qui m’ont beaucoup plu. Parmi ces nouvelles qui se laissent moins deviner, se trouve « Le vieux Schloïme », un extrait du premier texte d’Isaac Babel, « Les Feux » signé à Kiev en 1913 et 7 autres qui semblent d’évidence autobiographique.
Avec « Cavalerie rouge » (voir mon avis sur le site), les Récits d’Odessa contribuèrent à la célébrité d’Isaac Babel et à la reconnaissance d’un écrivain émérite.
Ce livre a été repris récemment par Camille de Toledo et Alexander Pavlenko qui ont illustré ces contes dans la remarquable BD « Le fantôme d’Odessa » (voir mon avis sur le site) en y rapportant la biographie d’un écrivain talentueux remarqué et encouragé en 1916 par Gorki mais toutefois ambivalent par son soutien à la révolution d’octobre et son engagement dans l’armée rouge et la Tchéka avant d’être rattrapé par la paranoïa du régime de Staline sous lequel il fut accusé à tort par le NKVD d’activité antisoviétique et jeté en prison où il croupira huit mois avant d’être fusillé le 27 janvier 1940.
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