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Ce grand roman-destin retrace un demi-siècle d'histoire de l'Union soviétique et de la France à travers l'intense aventure humaine de Lucien Baert, jeune communiste français "prisonnier du rêve écarlate".
Arrivé à Moscou en 1939 pour découvrir la promesse d'un paradis sur terre, il connaîtra l'envers du décor : l'extrême cruauté du régime, les tortures dans les camps du Goulag, la sauvagerie de la guerre. Mais aussi la communion des âmes meurtries et l'amour d'une femme, Daria, avec qui il saura reconstruire leurs vies brisées.
Près de trois décennies plus tard, Lucien parvient à traverser le rideau de fer pour tenter de retrouver les siens. Mais ce revenant du grand Nord ne reconnait plus sa patrie. Comment pourrait-t-il se fondre dans le confort d'une "société d'estomacs heureux" et prendre au sérieux la révolution d'opérette de 1968 ? Lui faudra-t-il se renier, en effaçant son passé ? Ou bien tenter l'impensable retour à Tourok pour reconquérir son rêve de fraternité et son amour perdu ?
Un puissant roman sur la barbarie stalinienne et le rejet de l'hypocrisie occidentale, où s' exprime la foi dans une humanité digne de ce nom.
L'itinéraire d'un “cocu de l'Histoire” parti visiter le paradis socialiste et qui passera vingt ans au goulag avant de retrouver une France où il ne se retrouve plus lui-même.
Auteur discret, Andreï Makine fait partie des grandes plumes du paysage littéraire français (il est membre de l'Académie Française depuis 2016).
Pour autant il n'oublie pas sa Russie natale qui reste au cœur de la plupart de ses ouvrages.
On l'avait découvert avec "L'archipel d'une autre vie", coup de cœur 2016.
On le retrouve ici avec : "Prisonnier du rêve écarlate", un joli titre pour une belle histoire.
L'itinéraire d'un ouvrier du nord, né en 1918, “un an après la Révolution d'Octobre”, qui part visiter la nouvelle patrie du socialisme en 1939. Par un concours de circonstances digne d'un théâtre de l'absurde, il manquera le train du retour et sera rapidement emprisonné dans les camps staliniens.
Interné sous le nom de Lucien Baert, il en sortira vingt ans plus tard sous le nom de Matveï Belov et ne retrouvera la France qu'en 1967 où il ne se retrouve pas lui-même : l'époque est troublée, les choses, les mœurs et les gens ont beaucoup changé.
Dans cette France moderne qui se libère, il est un peu perdu “comme un astronaute égaré sur une planète inconnue”.
Viendront alors quelques succès pour ce “rescapé de l'enfer” et l'intelligentsia parisienne fera de lui un nouveau personnage - c'est l'époque Soljenitsyne (avec qui Andreï Makine règle encore quelques comptes).
➔ Les “prisonniers du rêve écarlate” ce sont ces “communistes étrangers happés par la grande illusion”, qui sont venus se réfugier en URSS au mauvais moment : eux qui fuyaient les guerres ou les fascistes, ils seront happés par le tourbillon paranoïaque de Staline et finiront au goulag. Ceux qui croyaient trouver refuge sous la bannière rouge, se retrouveront bientôt perdus dans la blancheur des steppes sibériennes.
Parmi ces “cocus de l'Histoire” on pourrait croiser “un ancien communiste espagnol après la défaite des républicains”, “un allemand antinazi”, “un japonais qui faisait du renseignement au profit de l'URSS”, la liste pourrait être longue de ces “vies déchirées, fabuleusement complexes et qui vacillent au bord de l’effacement définitif”.
➔ Andreï Makine va nous entraîner dans ce tourbillon de l'Histoire : 50 ans d'Histoire soviétique bien sûr mais aussi, et c'est la bonne surprise, de notre histoire française. Tout cela est filmé en grand-angle dans un travelling historique passionnant qui met en lumière le regard amer et désabusé que le cinéaste porte sur notre époque.
➔ C'est finalement la dernière partie du parcours de Lucien Baert/Matveï Belov qui fait tout le charme de ce bouquin. On y retrouve le souffle glacé de la taïga qui anime les meilleurs romans de l'auteur, on savoure la prose pleine de poésie sauvage qui termine en beauté cette formidable histoire.
Une prose emplie d'humanité pour ces “gens revenus de toutes les illusions et qui retrouvent la simple humanité depuis longtemps perdue ailleurs”, pour ceux qui vivent dans ce “village au milieu des forêts où les gens vous accueillent sans rien demander en échange”.
Une histoire un peu triste mais pas tout à fait désespérée.
Une histoire qui n'était peut-être finalement qu'une simple histoire d'amour.
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