La huitième aventure du policier allemand Bernie Gunther commence à Berlin, se termine à Berlin mais se déroule essentiellement à Prague, comme le titre le laisse entendre. Si dans le volume précédent « Vert-de-gris », la vérité pas très jolie sur la vie de Gunther pendant la guerre était...
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La huitième aventure du policier allemand Bernie Gunther commence à Berlin, se termine à Berlin mais se déroule essentiellement à Prague, comme le titre le laisse entendre. Si dans le volume précédent « Vert-de-gris », la vérité pas très jolie sur la vie de Gunther pendant la guerre était relatée en mode flash-back, ici, on est directement en plein dedans, sans fioritures et peut-être dans le moment le plus important de sa guerre à lui. Après avoir tout fait pour quitter le front de l’Est et les horreurs qu’on lui avait fait commettre là-bas, Gunther est de retour dans un Berlin qui crève quasiment de faim, en 1942. Il rencontre des jolies femmes (ça le perdra, je n’arrête pas de le dire !) et enquête sur des meurtres qui n’intéressent pas grand monde, en période de guerre. Il regarde avec désespoir son pays devenir de plus en plus antisémite. Heinrich, qui vient d’être promu protecteur de la Bohème-Moravie, l’invite à Prague et il lui est impossible de refuser. Pendant son séjour dans la somptueuse résidence d’Heinrich, entourés de SS qui se craignent et se détestent entre eux, un meurtre est commis et Heinrich demande à Gunther de mener l’enquête. Mais une enquête policière dans se contexte est forcément soit une mascarade, soit une entourloupe. Il va falloir à Gunther beaucoup d’intelligence et de philosophie pour sortir vivant des griffes de Prague. Sans doute le plus clair, limpide et facile à lire de toute la série jusqu’ici, « Prague fatale » est une enquête policière somme toute très classique dans un contexte qui pour le coup beaucoup moins. Et j’avoue m’être laissé entrainer dans cette histoire sans trop deviner sur quoi elle allait déboucher. En termes d’intrigue, Kerr s’améliore de tome en tome. Si le pauvre Gunther passe son temps à côtoyer (à son corps défendant et pour le pire) tout le gratin du IIIème Reich, cette fois-ci il a directement à faire à la lie du genre, celui qui est entré dans la légende comme le Boucher de Prague (voir « HHhH » de Laurent Binet, porté à l’écran l’année dernière) et en terme d’ignominie, on touche quasiment le fond. Etrangement, Kerr dépeint Heinrich avec un retenue qui interpelle et même qui dérange un peu au début mais c’est pour mieux lui faire tomber le masque vers la fin, et montrer le vrai visage de celui qui mettra au point la Solution Finale avant de succomber dans un attentat. Les inimitiés au sein de la SS, la rivalité Heinrich/Himmler, la farouche résistance du fier peuple Tchèque, tout cela est très bien montré dans le roman, qui s’autorise bien peu d’entorses à la grande Histoire et qui nous en apprend beaucoup, mine de rien, sur ce qu’on croit tous déjà bien connaitre. Le roman sous-entend que la Solution Finale (évoquée fort pudiquement dans le dernier chapitre) fut mise au point, entre autre chose, pour épargner aux SS la souffrance psychologique qui consistaient à exécuter par balle et à tour de bras les juifs des pays conquis. Quand on a dit ça, on n’a pas grand-chose à rajouter… « Prague fatale » est un très bon millésime de la saga Bernie Gunther qui s’améliore de tome en tome. Vivement la suite…