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Pour l'histoire de l'art

Couverture du livre « Pour l'histoire de l'art » de Eric De Chassey aux éditions Actes Sud
  • Date de parution :
  • Editeur : Actes Sud
  • EAN : 9782742796847
  • Série : (-)
  • Support : Papier
Résumé:

Depuis peu, l'enseignement de l'histoire de l'art a été ajouté aux programmes de l'Education nationale. L'actuel directeur de la Villa Médicis de Rome propose un état des lieux de cette discipline : comment mieux définir son champ d'application, ses objets, les façons de la... Voir plus

Depuis peu, l'enseignement de l'histoire de l'art a été ajouté aux programmes de l'Education nationale. L'actuel directeur de la Villa Médicis de Rome propose un état des lieux de cette discipline : comment mieux définir son champ d'application, ses objets, les façons de la transmettre.

Introduite depuis peu dans les programmes scolaires du secondaire, l'histoire de l'art provoque de vives polémiques dans le monde enseignant. Pourtant les enjeux sont importants, nous rappelle Eric de Chassey.
Le livre se divise en trois chapitres : "La discipline", "L'école", "La société", partant d'une problématique d'enseignement, analysant ses enjeux sur le terrain de l'école et suivant le débat au sein de la société, l'école étant le miroir de celle-ci. Car l'histoire de l'art n'est pas la nostalgie d'un passé poussiéreux mais analyse ce dernier pour faire comprendre le présent. Et plus que jamais les élèves, les citoyens ont besoin de ce type de repères sans quoi le monde contemporain leur paraîtra abscons.
Quand il trace un historique de la discipline, Eric de Chassey insiste sur l'importance matérielle de l'objet d'art et sur la nécessité de le placer dans une perspective chronologique pour le comprendre. En ce sens, l'histoire de l'art appelle le double point de vue de l'esthétique et de l'Histoire.

A travers une kyrielle d'exemples passionnants et à la portée de tous, Eric de Chassey démontre que la perception d'un objet est historiquement et culturellement constituée. Par ailleurs, il met en garde contre l'angélisme du "choc esthétique", problématique au centre des questions que se posent les élèves et les étudiants. L'étude oblige à un décentrement et à une recontextualisation.
Le savoir ne contredit en rien l'émotion, insiste Eric de Chassey, mais la beauté est exigeante. Il faut donc s'informer sur le contexte de l'oeuvre, les conditions de sa commande, le choix des matériaux, car tous ces indices en disent quelque chose et nous obligent à sortir de notre anthropomorphisme contemporain. A l'inverse, l'histoire de l'art nous apprend à ne pas nous limiter aux seuls écrits des artistes analysant leurs oeuvres, mais à prendre du recul. L'artiste qui commente est comme "l'assassin", "le premier témoin de son crime", et il n'est pas celui qui voit le plus clair. Vérité qu'il est bon de rappeler également.
L'esprit universel de cette démarche demeure la grande force du livre. L'auteur n'a de cesse de réconcilier les approches : celles d'une histoire de l'art positive et celles qui émane des études d'archives.
L'histoire de l'art est une science au carrefour de beaucoup de disciplines : linguistique, sociologie, histoire, esthétique, sciences politiques. Il est rappelé qu'après la Seconde Guerre mondiale le centre de gravité du monde intellectuel a basculé dans le monde anglo-saxon et que l'essentiel de la production en Histoire de l'art s'est fait en langue anglaise. L'université française a pris du retard, déplore Eric de Chassey, et "Il a fallu un temps incroyable pour que les élites françaises se rendent compte qu'elles n'étaient plus au centre du monde." Et l'auteur d'évoquer sans langue de bois l'ouverture d'esprit qui existe dans les universités américaines en l'opposant à notre triste fermeture.

Avec beaucoup d'élégance, Eric de Chassey prône une forme d'extraterritorialité de l'esprit et de la perception. Européen éclairé, conscient des enjeux du mondialisme et de l'économie de marché, il n'en est pas moins convaincu par la richesse de notre patrimoine et du message unique que délivrent les oeuvres millénaires exposées dans nos musées. Partisan de la construction d'une véritable histoire européenne de l'art, il développe dans ce livre un plaidoyer pour l'Europe. Fustigeant le modèle capitaliste du signe désincarné, il espère en retour qu'une histoire de l'art européenne saura mieux maîtriser les effets pervers du nationalisme.
Des dangers du relativisme culturel à la critique de "la culture du divertissement", ce livre nous conduit sur le chemin passionnant de la contemplation et du questionnement, en ce sens où l'art transmet toujours un surcroît d'humanité au spectateur de bonne volonté.

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