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" On la dit femme, on la diffame.
Ce qui de plus fameux dans l'histoire est resté des femmes, c'est à proprement parler, ce qu'on peut en dire d'infamant " s'exclame Lacan en 1972 dans son Séminaire Encore, diffamation qui n'est sans doute pas sans lien avec le manque de signifiant pour la dire. En attente d'un dire qui lui donnerait consistance d'être, en attente d'un signe qui lui donnerait corps, elle est toujours un peu absente, toujours un peu Autre à elle-même.
Etourdie, elle le serait, de structure. A la question de ce que peut bien vouloir une femme au nom de son désir, la réponse par l'amour est la voie royale ouverte par Lacan à partir des années soixante-dix. Le désir, au féminin, est corrélé à une volonté de jouissance qui se montre dans le rapport, toujours symptomatique, au partenaire. Ainsi la question n'est pas tant de savoir ce qu'une femme peut bien vouloir au sens d'un désir tout orienté phalliquement, qu'au nom d'une jouissance féminine que la limite phallique ne suffit pas à serrer.
Seule une clinique de la sexuation, et non plus de la castration, nous introduit à une clinique de la position féminine de l'être échappant à tout déterminisme anatomique ou à tout choix d'orientation conforme au sexe. " Parce que son être est marqué d'un moins irrémédiable elle va toujours trop loin ", disait Jacques-Alain Miller. En cela elle ne connaîtrait pas la " divine juste mesure ". Aussi, le rapport à l'autre, à l'Autre du désir, à l'Autre de l'amour, sont-ils engagés sur les voies d'une demande qui est à la démesure de sa jouissance.
Son choix de susciter du désir chez l'Autre, de s'assurer d'un désir de désir auprès de l'Autre, n'est qu'une manière de trouver un dire qui pourrait lui donner consistance d'être, un " dire qui secourt ". L'amour est donc une des voies qu'une femme peut choisir pour se dire. Si à défaut de la dire, " on la diffame ", les auteurs de cet ouvrage ont fait choix de tenter de la dire, sans ambages et sans ménagements, avec rigueur et non sans éthique, à partir de ce qu'elle montre et de ce qu'elle éprouve, à partir de ce que la psychanalyse retient de son témoignage.
La modernité donne nouveaux habits à la structure, nouveaux façonnages des symptômes et nouveaux usages des partenaires; les signes trompeurs de la féminité aujourd'hui donnés en pâture à un oeil avide participent du désoeuvrement et de l'égarement d'un sujet alors confronté à sa seule inexistence, à sa seule inconsistance d'être. Si le signifiant manque pour la dire, le lieu d'existence d'une femme dans son rapport à son être et à sa jouissance ex-siste.
Ordinaires sont les abîmes qu'elle peut traverser, abyssale est la défaillance d'un symbolique forclos pour la dire, elle, comme femme : " La femme n'existe pas " disait Lacan, seules des traces d'elle - des traces d'être - se saisissent dans ses manières d'être au monde, dans ses identifications et ses ravages, ses amours passionnés et ses dérélictions mélancoliques, dans ses extases mystiques et ses sacrifices anorexiques, dans ses mises en scène théâtrales et ses écritures du vide.
Le " pas-tout " est le signifiant de la résistance à l'infernale machine contemporaine qui traite les êtres comme des choses et qui omet que " l'amour est le plus loquace des sentiments ". L'amour peut suppléer au rapport sexuel qu'il n'y a pas à condition que l'amour s'adresse au savoir qu'il n'y a pas et que le sujet soit mené jusqu'au nouage de l'incomplétude avec l'impossible. La psychanalyse d'orientation lacanienne est l'expérience d'un nouvel amour qui engage le sujet sur les voies du " pas-tout " et, ce faisant, participe d'un acte civilisateur.
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