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En deux cents ans, la mort s'est médicalisée et, au chevet du mourant, le médecin a remplacé le prêtre. Mais les questions que soulève le rapport des médecins à la mort n'ont guère changé. Que faire face à un malade que l'on sait condamné ? Comment l'accompagner jusqu'à la fin ? Faut-il prolonger ou abréger son agonie, faut-il l'adoucir oeSavoir si le patient est bel et bien mort est une préoccupation qui n'a cessé d'être centrale depuis deux siècles. La recherche d'une preuve incontestable du décès n'est pas seulement affaire de scrupule scientifique, elle est aussi induite par la peur : le grand effroi du XIXe siècle, c'est d'être enterré vivant, et, pour s'assurer qu'aucune étincelle de vie ne demeure, le cadavre fait parfois l'objet de «tortures» effroyables à nos yeux. Depuis, les peurs se sont déplacées ; ce que nous redoutons pour nous et pour nos proches, ce sont ces morts qui n'en sont pas : les comas, les états végétatifs.Quant à l'euthanasie ou à l'«acharnement thérapeutique», ces débats agitent la communauté des médecins dès le XIXe siècle, avec des mots différents, bien sûr. Le problème de la douleur, en revanche, ne sera pris en compte que bien plus tard : il faut attendre les années 1960 pour que les médecins voient en elle autre chose qu'un mal nécessaire, voire un symptôme utile pour la science.L'ultime question, en somme, pour les médecins d'hier et d'aujourd'hui, serait peut-être : la mort est-elle un ennemi à combattre ou un territoire à conquérir ?
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