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Le paysage est-il avant tout le fruit d'un regard sur une étendue donnée comme étant soit déjà là et intouchée soit aménagée, regard où l'appréciation esthétique charge cet espace de significations et d'émotions prioritairement subjectives ? Et voilà le paysage transformé en domaine consacrée à une approche pluri-sensorielle. Mais, avant d'être l'objet de représentations artistiques ou d'études, bref un décor, le paysage n'était-il pas un pays au sens originel du terme, c'est-à-dire une portion de territoire cultivée visant à satisfaire les besoins alimentaires des populations avoisinantes ? A cette charge noble et essentielle de nourrir son prochain a succédé depuis quelques décades un sentiment moins reconnaissant et favorable. Le paysan est devenu le « pecno », ce rustre peu au fait de l'état des choses. D'ailleurs, la presse se fait plus que jamais l'écho de tous les problèmes environnementaux et il n'est plus une seule saison de l'année au cours de laquelle l'agriculture n'est pas montrée du doigt. Pollution des eaux par les nitrates et les herbicides, algues vertes sur le littoral breton, résidus pesticides sur les fruits et légumes, haies abattues, talus arasés, érosion des sols, paysages défigurés, etc. Qu'attend-on des agriculteurs : qu'ils soient les pourvoyeurs de la pitance quotidienne ou des jardiniers du paysage ? Plusieurs contributions comme celle de Marc Dufumier qui analyse le passage en plus d'un demi-siècle d'une agriculture européenne ne produisant pas assez pour satisfaire les besoins du continent à l'ère des surplus ou de la mise en jachère obligatoire sous l'effet de la fameuse politique agricole commune (PAC). Dominique Marchais, auteur de Temps des grâces, un documentaire qui donne la parole aux agriculteurs, agronomes, chercheurs, écrivains, va au coeur de ce sujet. Certains projets visent à réunir les compétences d'architecture et de paysage, travaillant sur des études liés au milieu rural comme le montrent Rémi Janin et son agence Fabriques. Ce paysagiste a investi l'exploitation agricole familiale pour en faire un lieu d'expérimentation pour la construction d'un projet d'architecture et de paysage agricole contemporain. Enfin, l'écrivain Maryline Desbiolles avec son sens très spécifique de la description interroge la campagne agricole, elle qui a sciemment décidé d'y élire domicile tandis que le photographe Benoît Galibert traque, en analyste acéré, les ambiances de ce mode rural guidé par la gentiane à la recherche de vieilles publicités pour la Suze.
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