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Diego et Walid font connaissance dans la salle d'attente d'un centre pour enfants gravement handicapés, où l'un et l'autre mènent leur fils chaque jour. Une amitié se noue entre eux, mais tandis que Diego parle volontiers de lui, de sa culpabilité, de la quasi-impossibilité de communiquer avec son enfant, du malaise de sa confrontation au monde, Walid reste sur la réserve. L'Arabe l'entraîne un soir dans une fête orientale, où Diego rencontre une fascinante danseuse du ventre, puis Walid disparaît. Des agents secrets prennent contact avec lui pour lui demander de les aider à retrouver Walid, qu'ils dépeignent sous les traits d'un terroriste.
En superposant l'intrigue prenante d'un roman d'espionnage à la description du vécu douloureux des pères d'enfant handicapé, De Cataldo renonce ici à son détachement habituel devant les folies du monde. Dans un récit tout en émotion retenue, il conte à la fois l'histoire d'une amitié entre hommes de civilisations diverses et les profondeurs de l'amour pour les plus faibles d'entre nous, enfermés à jamais dans une hermétique prison mentale.
Deux pères se rencontrent à l'Institut où leurs fils, lourdement handicapés par des lésions cérébrales et physiques, sont pris en charge pour quelques heures. Diego, le père de Giacomo, est employé au ministère de la Justice à Rome. Après la naissance de son fils, Diego se sait "mort à l'intérieur" et a bien du mal à ressentir autre chose qu'une grande honte lorsqu'il regarde Giacomo. Walid, au contraire, se montre plein d'attentions et de douceur envers Yusuf, son fils. Une amitié profonde aussi bien qu'inattendue se noue entre les deux hommes. Au contact de Walid qui le fascine, Diego se libère de tout ce qui asphyxie sa paternité et empêche une relation apaisée avec Giacomo. Ainsi, il change très progressivement de regard sur son petit garçon. Mais quelques mois après leur rencontre, Walid disparaît et Diego est alors contacté par un agent des services secrets. Qui était vraiment son ami ? Où est-il maintenant ? Diego aura-t-il la force de poursuivre seul ce qu'il a commencé à construire avec Giacomo ?
En focalisant le point de vue sur Diego, ce sont toutes les émotions, tous les ressentis du père et de l'ami auxquels le lecteur a accès. Non seulement l'identification joue à plein mais le côté opaque de la personnalité et de la vie de Walid est ainsi préservé. Les doutes, les réactions, le désespoir, la pitié mêlée de honte, bref tout ce qui fait le quotidien du père d'un enfant handicapé est explicitement exprimé, sans angélisme, ni hypocrisie et cela donne à certains passages une force poignante de réalisme à laquelle, paradoxalement, l'intrigue policière fournit une forme de respiration qui éloigne le pathos.
Le titre condense les deux trames narratives en métaphorisant le réseau de relations qui irrigue le roman : le père pouvant aussi bien être Walid que Diego et l'étranger étant Walid, de fait, mais aussi Diego qui est étranger à lui-même et au monde depuis la naissance de Giacomo ; étranger aussi à la vie de Walid. Mais l'étranger est aussi chacun des deux enfants puisque le monde des autres leur est inaccessible.
C'est un roman tendu, où l'amitié vient balayer la nuit comme un faisceau de lumière troue les ténèbres. Un roman qui laisse la gorge serrée mais le coeur rempli. Splendide et généreux.
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