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Penser n'est pas associer des idées ou vagabonder par l'esprit.
C'est un effort. Notre nature nous porterait plutôt vers la croyance, le conformisme et l'obéissance. " Penser, c'est dire non ", remarquait Alain : non aux apparences, non aux dogmes, non aux autorités. Telle est la première exigence de la pensée : la vigilance critique. Il s'agit de cesser de croire, au moyen d'un scepticisme bien compris. L'esprit critique est le marteau avec lequel la philosophie casse toutes les idoles.
Mais jusqu'où aller dans ce travail de sape ? Après avoir déboulonné Dieu, l'Âme et la Raison, l'intelligence réductionniste doit-elle encore s'en prendre au Sujet, à l'Homme et à la Liberté ? Ce serait prolonger la Modernité en modernisme. Le penseur affirmant l'impuissance de sa pensée ressemble à un enfant cassant son jouet. Pour penser, il faut parier dans les vertus de la pensée. Ce n'est plus de la croyance ou de l'idolâtrie, mais le principe d'une seconde exigence.
L'exigence méta-critique sauve le scepticisme du nihilisme : tout ne se vaut pas. Penser, c'est aussi juger, hiérarchiser et gouverner ses idées. On appelle scepticisme constructif l'association paradoxale de ces deux exigences, qui définit le cercle dans lequel se meut la philosophie. Chercher les conditions, les limites et les réquisits de la pensée, c'est aussi s'interroger sur la nature de la philosophie et sur la spécificité du problème philosophique.
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