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Comme une porte que l’on entrouvre subrepticement, ivre de secrets. Laisser les rais de cette lumière bercer les poèmes. Maux sur les mots, fraternité et sel enlacés sur l’aura qui se donne sans retenue, l’heure est grande. « Le chant des marées » est l’espoir qui ne peut se nommer. Trop beau, trop grand. Attendre le moment de l’hospitalité heureuse qui encense la clef des délivrances. Le pays dérive, s’éloigne des visions empreintes d’humanité. Le froid attise les verbes et les sanglots renforçant la beauté du dire qui s’épanche. Cueillir à pleines brassées « La mémoire d’une île… Si j’ai encore à te dire le passage. De la mer je l’écrirai. » Moissons verbales, grandeurs des cimes, vagues qui croisent l’encre salvatrice. Orée, plénitude allouée. « Pour un grand jubilé/Et les sources les plus secrètes/ Sont comme des ressacs. » Comprendre le filigrane salvateur, les cris arrachés à la terre-mère. Retenir la ferveur d’une marée abandonnée dans un exil où le tout est abyme et sanglots. La nostalgie s’amplifie, chant des marées mélancoliques. Les voix éteintes, résurrections grammaticales. Les marées sont des sanglots accrochés à la vague qui frappe et ne lâche rien. Le néant se voudrait tempête. Mais la grandeur gagne le rivage. Rime avec cette gestuelle qui prie sur un papier que l’on retourne. Watson Charles est un poète. Un homme debout. Un passeur, un éclaireur qui force la douleur à mourir. Il annonce la rédemption des souffrances. Ecrit les larmes d’airain et les chants du rappel des marées à jamais. D’une beauté infinie. Publié par Les Editions Unicité. A lire, relire, apprendre par cœur les poèmes où le mémoriel est roi.
La langue française est riche et pourtant ! Pourtant, il est parfois difficile de trouver le mot juste. Je viens de refermer le recueil de poèmes de Watson Charles "Le chant des marées", après une seconde lecture, et je suis sans mot.
Que dire d’une telle écriture ? Belle ? C’est banal, non ? Magnifique ? Ça me semble trop convenu. Superbe ? Tout pareil. Alors quel qualificatif peut décrire un tel texte, celui que j’ai préféré parmi tant d’autres :
La journée s’en alla
Comme un vieux madras
Je te vois pleinement dans l’artifice
Des jours
Ta voix berçant les Loas de ma ville
Toutes les sources ont repris le refrain des damnés
Et les champs épousent la courbe
De tes yeux sous-marins
Je regrette, en lisant, de ne plus avoir d’élèves devant moi. C’eût été un bel exercice que de disséquer ce poème, essayer de deviner à qui appartient cette voix qui berce les Loas et possède des "yeux sous-marins", leur faire entendre la musique née de ces mots enchevêtrés. L’auteur exprime des sentiments de tristesse, de solitude, de mal-être. Il mêle des expressions qui vont et viennent librement tel le ressac de la mer – la mère ? – car il est bien question d’une femme, oui, mais laquelle ? A travers des petits textes (un peu plus de 70), en vers – libres – ou en prose, Watson Charles semble nous raconter une histoire, des souvenirs, des désirs, des regrets sans doute et la nostalgie de la terre mère. Il parle de son pays d’origine, Haïti. Ses phrases sont ciselées, la sensibilité affleure, les termes sont choisis, le poète nous emporte sur les vagues qui bordent son île et nous fait pénétrer sa vie d’exilé.
Jeune, je lisais beaucoup de poésie, Baudelaire, Verlaine, Rimbaud. Et puis, plus tard, j'ai rencontré René-Guy Cadou, Jean Bouhier, Luc Bérimont, toute l'équipe de l’Ecole de Rochefort. J'avais un peu laissé ce genre littéraire de côté. Avec Watson Charles, je l'ai retrouvé. C’est tout simplement sublime, un voyage au cœur de son île originelle, une île faite de beauté, mais aussi de souffrance, une île à laquelle il rend un hommage vibrant, une île pour laquelle il souffre :
Enfant de la terre mal aimée
Enfant
Calciné de la guerre
Je continue ma route
Car ma soif est lointaine
Enfant de tous les pays
Paria du monde
Je viens de loin
Le rythme est lent, obsessionnel, prenant, envoûtant. A lire, relire et savourer !
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Watson Charles prend pour thème la mer dans son dernier ouvrage. Cette mer des Caraïbes qui entoure son pays, Haïti. « La mer, omniprésente en Haïti, est vraiment ce miroir de l’âme que le poète ne cesse d’interroger pour faire sens de sa présence au monde. » Même s’il ne vit pas là-bas, Watson Charles accorde beaucoup d’importance à son île et dans ses poèmes lui rend un bel hommage. « Je t’écris pour te dire que mon cœur est une rivière qui coule à ta rencontre. Et que chaque goutte est un hymne à la terre, que chaque cri te dit la levée du jour. Je t’écris comme ce vent qui passe et qui m’emmène vers toi, pour te dire que mon cœur est à la dérive des continents. » C’est doux, lent, intime et poignant. L’auteur nous replonge dans l’horreur de cette vague de janvier 2010 emportant tout sur son passage. « Je ne crois qu’à tes yeux/ Même si les nuits me viennent/ Par avalanche dans l’eau pure/ Ou dans ce deuil aérien/ Tu comprendras que cette terre/ Est un amer linceul/ Que je porte parmi tant d’autres / Tel un tabou d’un siècle ancien. » Il pleure à jamais les disparus, les morts et fait de la mer un mystère. Il se demande quelle est son rôle, sa place et cela en devient une obsession, tournant en boucle dans ces pages. Jusqu’à la chute, l’arrêt, l’abandon, l’absolution de l’auteur.
http://www.mesecritsdunjour.com/archives/2018/06/23/36509240.html
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