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Ernesto, le héros de Diego Marani, est un peu l'anti-Charles Denner de L'homme qui aimait les femmes. Si le héros de Truffaut était troublé, tourmenté, attiré, fasciné à l'excès par le sexe opposé, Ernesto voit les femmes comme des alliées et a peur de son désir. Il y avait presque une pulsion de mort dans la passion de Denner pour les femmes et l'aveu de sa fragilité face à elles ; Ernesto, au contraire, a peur de souffrir, et ne veut pas jouer au jeu de l'amour et de la mort des sentiments.Ernesto, 40 ans, professeur de lettres vivant à Trieste, n'a pas de chance avec les femmes. Ce sont peut-être les séquelles d'un très lointain traumatisme d'enfance qui lui font craindre l'amour et rechercher l'amitié qui lui garantirait enfin la tranquillité et la sérénité d'un rapport asexué, échappant ainsi au drame de la passion et à l'esclavage du désir. Mais il est difficile de renoncer aux imprévisibles feux de la passion et voilà qu'Ernesto, après un mariage terne avec Nadia, qu'il connaît depuis l'enfance, poursuit sa quête de femmes-amies, ruminant son « désir de souffrance » qui est comme « le sang pour les requins ». Ses collègues Laura et Marisa, son ancienne élève Lucia, et enfin Jasna la jeune Slovène qui possède toutes les caractéristiques de la classique femme fatale sont les étapes d'un ironique, ou peut-être tragicomique, chemin de croix au cours duquel le lecteur rencontre le mystérieux docteur Parovel, maître en matière d'immoralité. Au bout de ce chemin, c'est toute la vie d'Ernesto qui défile avant d'être remise en cause. Non sans une surprise finale.Sur un ton faussement léger où perce l'ironie, à travers un personnage attachant et drôle malgré lui, Marani explore la relation amoureuse et l'échange entre les hommes et les femmes. Le point de vue est ici masculin et c'est intéressant : il modifie habilement le jeu de rôles habituel. Ici, les femmes sont cyniques et cruelles, et les hommes - Ernesto en particulier - naïfs et romantiques (sans être pleinement honnêtes). Il veut aimer sans avoir à jouer au jeu de l'amour, mais il s'apercevra au terme de sa quête que cet espoir est vain.C'est peut-être cette fragilité qu'évoque Marani, et qui nous apparaît souvent de manière comique à travers les mises en scène d'Ernesto avec ses proies, qui est touchante. Et, bien sûr, la difficulté du rapport amoureux, sinon la quasi-impossibilité de la rencontre apaisée, qui n'entraînerait ni souffrance ni mort.Diego Marani, né à Ferrare en 1959, est écrivain, traducteur et journaliste italien. Son roman le plus célèbre Nouvelle grammaire finnoise, traduit dans plusieurs langues, a été publié en France aux Éditions Rivages (BER nº510) et a reçu le prix littéraire Grinzane-Cavour.
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