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Après l'essai "Lutter ensemble", Juliette Rousseau propose un premier texte littéraire poignant, dans lequel elle retisse les liens avec les femmes de sa famille à partir de sa propre expérience de la maternité. S'adressant à sa soeur disparue, elle interroge de manière bouleversabte la manière dont on s'approprie un héritage familial en même temps que l'on s'en extrait avant de faire soi- même oeuvre de transmission. En contrepoint est livrée une observation sensible sur la transformation du paysage rural qui l'entoure et de certains bouleversements irréversibles de la nature.
La vie qui s'est enfuie, celle de la grande sœur, le modèle, l'aînée.
La maladie qui emporte tout sur son passage, les souvenirs, le temps qu'il reste à passer ensemble, le bonheur.
Alors la narratrice fait revivre celle qui lui manque tant, et avec elle toutes les femmes de sa lignée, tous leurs chagrins, toutes les violences subies, les peurs, les pleurs, les silences.
Après le décès, elle est revenue habiter la maison familiale, emplie de souvenirs bons ou mauvais. La campagne environnante ravive les souvenirs du passé, l'enfance, les jeux, les espoirs, l'attente.
Un roman très court, entrecoupé de quelques poèmes, chapitres brefs, écriture incisive, maux et mots dits, soupirés, espérés, oubliés. C'est à la fois sensible et émouvant, parfois déstabilisant quand la mémoire fait resurgir les traumatismes d'une lignée de femmes liées par les mêmes maux, ceux qu'infligent les hommes et que subissent des générations de femmes depuis si longtemps.
Il y a ces femmes et il y a tout au long du récit la douleur de la perte de cette sœur qui est morte et ne sera plus, de tous ces instants suspendus qu'il restait à vivre, ces bonheurs perdus, cette solitude à venir.
Ce roman est un long monologue où la narratrice, inconsolable, raconte à sa sœur morte à l’âge de 33 ans d’un cancer généralisé l’histoire douloureuse de sa famille, en convoquant ses souvenirs d’enfance et en y mêlant des fragments de sa vie de jeune mère, parfois rageurs, parfois apaisés.
La narratrice justifie des choix de vie différents de ceux de sa famille où régne le mensonge et où les femmes sont traitées sur un pied d’inégalité ; c’est l’occasion pour les non-dits et les secrets de famille de remonter à la surface : viol conjugal, avortements, troubles psychiatriques...
Tout ceci est à la fois cruel, douloureux et poignant, ni l’époque ni le milieu ne sortent grandis de ces courts chapitres percutants et tendus, de la lecture desquels on sort littéralement lessivé.e.
Ce livre voyage dans le cadre des 68 premières fois, merci à l’équipe pour cette aventure et ses découvertes
Revenue vivre dans la maison familiale, la narratrice écrit à sa sœur, disparue bien trop tôt d’un cancer.
« T’écrire, c’est négocier avec le feu. Découvrir des foyers incandescents et en accepter l’épreuve. Puis laisser la matière s’apaiser. On n’écrit pas sur des charbons ardents. On écrit en soufflant doucement sur les braises. On en extrait ce qu’il reste. Parfois ce sont quelques phrases, parfois une fatigue infinie. »
Stop
Arrête-toi
N’en dis pas plus
Chut
C’est inutile
Ça gâcherait tout
Chut
Ce texte intime, poétique, puissant, vous remue et prend aux tripes ! Je ne peux que vous dire de le lire. Y’a urgence !
Comme un objet fragile entre mes mains, j’ai lu ce livre lentement et précieusement. Il me fallait en prendre soin et l’écouter me murmurer les mots de ces femmes. Juliette Rousseau aborde la condition féminine, le rapport homme/femme, ainsi, elle rend un bel hommage aux femmes de sa vie.
Bien plus qu’un coup de cœur, il est de ces livres qui tiennent une place importante dans ma bibliothèque, de ceux que je veux transmettre à ma fille plus tard.
« Je voulais t’écrire un livre dont on entend les pages respirer lorsqu’on les tourne. »
http://www.mesecritsdunjour.com/archives/2023/06/01/39926768.html
116 pages découpées en parties courtes : prose et poésie de l'évocation de sa sœur disparue par l'auteure à travers des souvenirs d'enfance. En fait des destins de femmes parfois contrariés, violents et tendres ... celle de la grand-mère, de la mère, de la soeur et de la fille de l'auteure, de leurs relations complexe entre elles, où l'homme est peu présent, plutôt nocif ou vraiment très loin du récit, d'ailleurs quel rôle y jouerait-il devant ses relations de femmes et mères auxquelles il ne comprend pas grand chose.
Thanos et Thanatos, un peu Eros sont ici convoqués pour évoquer ces vies et le retour de l'auteure dans son évocation de ces relations. Entre évocation des maladies, rapports au corps dans son évolution et ses maux, l'état d'esprit des mères sur plusieurs générations dans leur évolution profonde, ce sont de très beaux passages d'une écriture d'une grande sensibilité qui nous guident dans ses pages parfois difficiles. Ce sont aussi de beaux textes sur la nature, le rapport de l'auteure et de sa sœur avec la nature environnante mais aussi la fuite en avant quant à la perception de la souffrance et de la lente et fatale détérioration de notre enveloppe corporelle.
Un court premier livre qu'il faut absolument découvrir.
Un livre découvert grâce à la sélection des 68premièresfois.
Un texte très difficile par son sujet et les thèmes abordées.
L'auteure va nous parler de femmes, de destins, de deuils, de rapports au corps. La narratrice va nous parler d'elle, de la perte de sa grande sœur, morte d'une leucémie (des pages terribles dans la chambre d'hôpital) de ses parents (son difficile rapport avec sa mère), sa relation avec sa grand mère et son rapport à sa fille.
Récit intime, personnel, il m'a bouleversé que ce soit avec des scènes difficiles ou avec de belles pages de poésie pures. Elle parle aussi très bien de la transformation des campagnes, quand elle revient dans sa région natale. C'est un beau texte sur les femmes, leurs rapports aux corps, aux choix ou non de vie.
❝Nous sommes les héritières d'une détermination farouche, nous les descendantes des avortements ratés, des grossesses imposées. Celle-ci est indémêlable de nos douleurs et de nos rages, transmises d'une génération à l'autre comme on essore un torchon plein de sang, dans l'anonymat d'une cuisine plongée dans la nuit.❞
Nos douleurs et nos rages
Passant de l’essai à l’autofiction, Juliette Rousseau explore la vie des femmes de la famille et rend hommage à sa sœur, emportée par un cancer à trente-trois ans. Une mise à nu percutante, qui passe par l’exhumation de lourds secrets de famille.
Si ce n'est pas sur une veillée funèbre que s'ouvre ce roman, ça y ressemble furieusement. La famille est alors rassemblée, mais chacun reste avec ses pensées, essaie de conjurer sa peine, s'occupe pour ne pas penser à l’absence, au vide, à l'inacceptable deuil qui les réunit. La jeune sœur de la narratrice est morte a trente-trois ans, dans un service d'oncologie, d’un cancer généralisé. Quelques heures auparavant, les médecins avaient suggéré de l’amputer. «C'est horrible, mais ça veut dire que tu vivras car, sinon, un geste aussi atroce n'a aucun sens.»
La recherche du sens, c’est bien ce qui préside à ce récit qui va explorer les vies des femmes de la famille, la mère et les deux filles, creuser les non-dits et remettre en perspective leur identité au cœur d’une société qui reste très inégalitaire.
C’est avec un regard distancié que la narratrice revient sur les épisodes marquants, passant de sa sœur à sa mère, témoignant de son propre vécu. Car elle a choisi de fuir cette «périphérie de périphérie», ville où ont vécu sa mère et son père et ses grands-parents: «Comme beaucoup d'enfants de la classe moyenne rurale, j'ai eu besoin d'aller à Paris pour prouver que moi aussi je comptais. Dissiper mon accent, changer mon apparence, mes références.»
En racontant à sa sœur défunte comment elle avance dans sa vie, elle continue de cheminer avec elle, lui rendant ainsi un bel hommage.
«Trois ans après ta mort, un soir, je me suis trouvée seule dans mon appartement à Paris, titubant de tristesse, égarée, nue. Instinctivement, et peut-être pour vérifier que j'étais bien là, je suis allée vers le miroir. Ce que j'y ai vu m'a fait l'effet d'une déflagration. C'était moi, et c'était moi toute seule. Tu n'étais pas là. Pourtant, face à moi, il y avait ce visage, la mâchoire carrée, plutôt masculine, le nez qui s'étire en un arrondi enfantin et surtout, les yeux noirs, le regard franc. Le même visage que toi.
Que vaut d'être sœurs face à la mort? La solitude tranchante dans laquelle tu m'as laissée est inconsolable. Tant mieux, elle est parmi ce que j'ai de plus cher.»
Maintenant qu’elle est mère à son tour, elle sent ce besoin de ne plus rien cacher, de dire le viol conjugal qui est à l’origine de la lignée ou qui a entraîné des avortements douloureux, de mettre des mots sur des troubles psychiques qui étaient alors jugés comme des caprices de femme faible. Alors elle comprend mieux ces existences, alors elle pardonne. En s’appropriant l’héritage familial, elle fait aussi œuvre de sociologue et d’historienne des mœurs, dans la lignée de son essai, Lutter ensemble, quitte à forcer le trait. Parce qu’elle a compris que c’est précisément cela, faire son deuil, «ancrer en nous une histoire qui apaise, aussi mensongère fût-elle. Les vivantes ne s'embarrassent pas de la vérité, ce n'est pas elle qui guérit.»
C’est en courts chapitres que Juliette Rousseau nous offre de plonger dans ce passé et ce présent familial, en disant les choses avec un regard acéré.
https://urlz.fr/mn7V
J’avais vu passer ce livre dans la rentrée littéraire et je ne savais pas trop s’il s’agissait d’un roman ou d’un récit. J’ai laissé passer le temps et oublié ce titre, jusqu’à ce qu’il fasse partie de la sélection des 68 premières fois.
Ce premier roman alterne prose et poèmes. Construit avec des chapitres courts, parfois il s’agit juste d’un paragraphe. La narratrice s’adresse à sa sœur aînée, morte d’un cancer à l’âge de 30 ans. On ressent tout l’amour qu’elle a pour sa sœur. Elles ont la même mère mais un père différent. Elle évoque le rapport conflictuel avec sa mère, distante, toujours en colère. Elle parle donc de sa mère, mais aussi de sa grand-mère, de ces générations de femmes qui n’ont rien choisi. Son grand-père reproche à sa mère de n’avoir fait que des filles. En 1945, le devoir conjugal peut relever du viol, mais le mot ne s’applique pas encore. C’est une époque où le patriarcat règne en maître. Les femmes n’ont pas de droits, n’ont pas le choix de devenir mère ou non.
Il y a beaucoup de questions sans réponses, sur le corps et la maternité notamment. A l’instar d’un récit intime, ce livre est bouleversant, sensible et fort. Ce premier roman, écrit par une autrice née en 1986, est issu de son retour dans son village d’enfance, dans sa maison familiale. Le livre n’est pas gai, je vous l’accorde, mais intéressant car il témoigne d’une époque, de la condition féminine, du rapport entre les hommes et les femmes. Avec son ton féministe, il prend tout naturellement place dans la collection « Sorcières » de Cambourakis.
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