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Jean-Benoît Puech a voulu dans ce « roman d'apprentissage sentimental et sexuel » raconter les souvenirs de sa propre jeunesse à Orléans (qui devient Aussières dans le livre) et Paris, pendant les vingt années qui ont précédé son mariage : 1974-1994. Pour cette confession indiscrète et morale, il emprunte le nom romanesque de Clément Coupèges, personnage fictif dont il s'est inspiré dans son « cycle Jordane ».
Après la crise de l'adolescence, un lycéen vulnérable se lie à une jeunesse dorée et se cache qu'il est requis par des exigences plus graves. Certains événements demeurent difficiles encore à raconter. Le narrateur profite longtemps de l'attachement passionné d'une jeune femme fragile, Marie-Laure de Chagné.
Sept ans plus tard, il apprend qu'elle mène une double vie. Elle se tue presque aussitôt dans un accident supposé, comme si elle ne pouvait survivre à cette révélation, et lui s'égare dans une culpabilité morbide. Il cherche alors la « Ressemblance » dans divers milieux de la prostitution, avec une certaine Olga, et ne s'en éloigne que pour s'éprendre d'une bohémienne, Julia Rilker, qui se joue de sa détresse et le manipule. Le maître suffisant devient l'esclave indigne. Mais un tel renversement des rôles apportera au héros la maturité nécessaire pour une union complète et définitive. La rencontre de Sophie Vernelle, une jeune amie de sa mère, lui redonne enfin l'espoir d'une réciprocité durable. Les épisodes précédents ne sont plus, dès lors, que des préparatifs de noces. Pourtant, on ne saura jamais vraiment s'il s'agit du récit de la vraie vie vécue ou une nouvelle version, plus réaliste, d'une fable perpétuelle.
Prenez un auteur : Jean-Benoît Puech, professeur d'université ( il enseigne l'histoire de la critique et de la théorie littéraire et a notamment travaillé sur « la supposition d'auteur »), donc imaginez que cet auteur souhaiterait parler de lui-même, ce qui signifierait écrire une autobiographie, mais ce même auteur douterait de la possibilité même de ce projet. Pourquoi ? me direz-vous. Eh bien parce qu'il serait intimement persuadé qu'il est impossible de dire la vérité sur soi-même (ben oui, on a plutôt tendance à vouloir faire le beau, à vouloir « s'inventer ») et puis dire « vrai » signifierait « tout dire », ce qui est matériellement impossible, enfin l'écriture apparaît comme un filtre qui modifie le réel (vous savez, les figures de style, etc…)
Bref, comme la frontière entre réalité et fiction semble bien poreuse, on peut affirmer que « la fiction est au cœur de toute entreprise biographique » (qui a dit ça ? je ne sais plus mais c'est assez juste!) Et puis, comme parler de soi, ça ne se fait pas, eh bien autant passer le micro à quelqu'un d'autre. Et c'est là que ça se complique…
Notre facétieux J.B Puech a donc eu l'idée d'inventer un écrivain : Benjamin Jordane (1947-1994) (vous noterez le jeu subtil sur les initiales BJ/JB), une espèce de double de lui-même, puis, il (J.B P) a d'abord écrit les livres (romans, notes, journaux, nouvelles...) de son écrivain imaginaire et petit à petit, tandis qu'il concevait les livres de Benjamin Jordane, il a conçu qui était Benjamin Jordane, au point de faire une biographie (fictive évidemment) de cet écrivain (qui n'existe pas), à savoir « Les préparatifs du mariage ». (Nous y sommes.) (Vous êtes toujours là?)
Cette entreprise a commencé par un texte intitulé « La Bibliothèque d'un amateur » : texte dans lequel se trouvaient des notes de lecture (celles de Benjamin J.) au sujet de livres qui n'existent pas (dans le réel). Ça devient assez vertigineux, il faut bien le dire…
Voici le projet présenté sur la 4e de couv de « La Bibliothèque d'un amateur » : il s'agit «d'études à propos de récits qui ne sont pas encore écrits. Leurs auteurs hypothétiques mettraient en scène, paradoxalement, ce qui échappe à tout public: l'art de créateurs sans œuvres, d'œuvres sans commentaires, de commentaires sans lecteurs et peut-être l'art en personne, sans créateur.»
Bref, y a plus grand monde au logis mais qu'est-ce qu'on s'amuse...
Allons, pourquoi pas ? Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela repose sur un dispositif narratif complexe et pour le moins original qui tient de la performance, de l'expérimentation littéraire, que tout cela prend appui sur une réflexion intéressante au sujet du genre même de la biographie et de l'autobiographie par la mise en évidence de « l'inévitable processus de fictionnalisation à l'œuvre dans tout récit de soi» ou bien qu'il s'agit d'une mystification littéraire voire d'une supercherie…
Alors, moi, lectrice lambda, qui débarque naïvement dans ce roman sans savoir qu'il est une partie d'un immense édifice reposant sur une vaste réflexion théorique, qu'est-ce que je lis quand je lis « La Préparation du mariage » ? Eh bien, je lis un roman des années 60, vaguement ringard, qui met en scène une bande de bourgeois désoeuvrés s'interrogeant sur la littérature, le sens de la vie, l'amour, se baladant ici et là dans différentes villes de province qui puent l'ennui, flirtant, baisant, allant au « dancing » , bref, moi, la lectrice lambda, je lis un texte qui m'apparaît suranné au possible, désuet, poussiéreux et un brin prétentieux. Je lis Gide et je m'ennuie mortellement dans ce monde antédiluvien.
Franchement, je me suis plus amusée à faire mes petites recherches sur Internet au sujet de ce faramineux projet que j'ai trouvé plutôt rigolo qu'en lisant ce texte (dont je n'ai pas achevé la lecture, d'ailleurs.) En théorie, pourquoi pas, en pratique : mais qu'est-ce que c'est chiant !!! (C'est toujours un peu comme ça, la littérature de laboratoire, seul l'auteur s'amuse follement...)
Dommage pour le plaisir de lecture. Dommage pour le lecteur. Dommage pour moi.
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