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La mère de tous les vices ! On osa la baptiser ainsi. Encore faudrait-il établir que ce surnom est un blâme et non le plus magnifique éloge. Car, enfin, que ferions-nous, malheureux, sans ces quelques misérables vices, en nombre si réduit, et de si maigre variété, dont notre imagination défaillante n'a jamais su élargir ni creuser les frontières ? Mais la question n'est pas là. Même, en nous tenant au point de vue moral, comment ne pas s'indigner d'une fausseté si criante.
Très court texte de Joseph Kessel qui, à travers ses expériences tout autour du monde, invoque la paresse qui, à ses yeux est l'une des plus grandes vertus si ce n'est la mère de toutes les vertus.
Ce texte est extrait d'un livre publié en 1929 aux éditions Kra qui s'intitule Les sept péchés capitaux.
Je n'aime pas beaucoup les livres de Joseph Kessel -on risque de me crier dessus-, mais après plusieurs tentatives, je dois me résoudre à cette négation. Oui mais, l'autre jour en cherchant des petits livres dans les rayons de ma librairie préférée, je tombe sur ce titre : La paresse. Inévitable, forcément. Après Paul Lafargue et Le droit à la paresse, je ne peux que me laisser tenter à la paresse de m'allonger ou m'asseoir pour déguster ce petit livre. Et là, je vois le nom de l'auteur et me dis tout de go que c'est un moyen de me faire mentir. Et j'ai raison, car j'ai aimé. Comment n'aurais-je point pu ? "Un mot a raison par lui-même sans que le sens intervienne. Or, quoi de plus séduisant et de plus loyal à la fois que celui de "paresse". Ne le voyez-vous point qui s'étire, avec langueur, mais aussi avec franchise. Comme ses deux syllabes se fondent miraculeusement -la première claire, sonore, la seconde, étouffée, chantante et moelleuse- dans une harmonie où la vigueur et la nonchalance sont aussi précieuses l'une que l'autre !" (p. 9)
La suite est tout aussi bien, avec un tour du monde d'exemples de paresse, bien sûr sur les rivages de l'océan Indien où cela semble aisé, mais aussi dans des zones moins évidentes comme par exemple la boue de Vladivostok. "Nous ne savons plus être paresseux. [...] Pouvoir demeurer étendu des heures sans que la satiété ne vous effleure. Goûter dans le repos du corps l'essentielle des joies. Par l'immobilité vaincre l'éphémère, les contingences, le désir toujours inefficace. Avoir le cerveau si vide ou si riche qu'il ne souffre point de l'inaction." (p.38/39)
En conclusion, soyons paresseux, mais attention, cela demande du travail, au moins celui de lire ce court texte !
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