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Douze ans ou presque après sa disparition, Hassan II laisse rarement indifférents tous ceux qui l'ont connu, à commencer par les Marocains eux-mêmes.
Marqué par deux tentatives de coup d'Etat et une longue série d'événements tragiques - émeutes de 1965, enlèvement de Ben Barka, «suicide» du général Oufkir, disparition de centaines de militants de gauche, arrestation de milliers d'autres, etc. - le très long règne de Hassan II se serait peut-être interrompu brutalement si le monarque n'avait réussi une opération magistrale avec la Marche verte, au Sahara, à la fin de l'année 1975. Mais, s'il a réussi à conforter l'institution monarchique, s'il s'est souvent montré perspicace et clairvoyant en politique internationale, aussi bien dans la gestion de ses relations avec le monde occidental que dans son approche du conflit israélo-arabe, Hassan II, peu intéressé par l'intendance, a largement échoué dans les domaines économique et social.
Manipulateur habile et cynique, le souverain s'est appuyé toute sa vie sur un appareil sécuritaire efficace, sur l'achat des consciences et les prébendes pour régner. L'argent lui a d'abord permis de vivre dans un luxe inouï, alors que la majorité de ses sujets tiraient le diable par la queue. Grâce aux innombrables rentes et privilèges qu'il a distribués, il s'est ensuite assuré le soutien d'une bonne partie des élites. Revers de la médaille : l'émigration de dizaines de milliers de cadres, privés de perspectives ou allergiques à la corruption et aux dérives du régime, a pesé lourd dans le bilan de son règne.
Certes, les Marocains et nombre de dirigeants occidentaux lui ont sans doute su gré d'avoir géré subtilement l'espace religieux et évité les drames qu'ont connus tant de pays arabes et musulmans. Voyageant beaucoup, soignant son image, Hassan II était très présent sur la scène internationale. A défaut d'être toujours entendu, le Maroc était écouté. Sur ce plan, le royaume ne lui a pas encore trouvé de successeur.
Nourri de très nombreux témoignages -dont, beaucoup, inédits - cet ouvrage nous donne à voir, plus de dix ans après sa mort, le vrai visage d'un homme dont on a pu dire qu'il a sans doute mieux servi le Maroc que les Marocains.
Ignace Dalle a passé de nombreuses années en poste dans le monde arabe, notamment au Liban, en Egypte et au Maroc. De 1992 à 1996, il fut directeur du bureau de l'AFP à Rabat. Diplômé de l'Ecole supérieure de journalisme de Lille et d'Etudes arabes de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth, il est l'auteur de plusieurs livres sur cette partie du monde. Il a déjà publié en 2004 chez Fayard Les Trois Rois, une histoire de la monarchie marocaine depuis l'Indépendance.
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