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Il s'agit de la première publication consacrée à l'oeuvre de Gitte Schäfer.
Pour cet ouvrage, Gitte Schäfer s'est inspirée d'un numéro de Die Kunst, Monatsschrift für Malerei, Plastik, Graphik, Architektur und Wohnkultur, revue allemande fondée en 1900 et publiée jusqu'à la fin des années 1980. Elle a emprunté la couverture défraîchie, le format et la mise en page d'un numéro de 1970, et remplacé les articles et les images d'origine par des photographies de ses propres travaux et des vues de ses expositions, transposant dans le livre la stratégie d'appropriation qu'elle utilise dans son travail plastique.
Gitte Schäfer (née en 1972 à Stuttgart) a engagé depuis 2000 une observation attentive de l'effet du temps sur les images et objets produits, diffusés, oubliés, ressurgis, en imaginant des peintures et sculptures qui semblent tout à la fois hors d'âge et d'une étonnante proximité. Sa pratique qui se situe dans le domaine de l'insolite, de l'étrange, crée dans l'espace d'exposition un lieu qui oscille entre le cabinet de curiosités et le paysage fantastique. Les jeux d'association multiples sont pour beaucoup dans le plaisir de l'artiste mais aussi celui du visiteur.
On peut associer dans un premier temps l'oeuvre de Gitte Schäfer à la liberté de l'enfance, celle du jeu, de l'intuition et de l'émerveillement. Loin de toute naïveté cependant, l'artiste joue des multiples références artistiques et de la familiarité des éléments, pour nous emmener dans un univers très singulier et étrangement décalé.
La présente publication rend compte de l'abondance des voies et des interprétations qu'ouvre son travail.
La préface d'Eva González-Sancho souligne la dualité entre une production qui s'enrichit et se complexifie dans le déploiement spatial d'un ensemble d'oeuvres et une contemplation plus affective, personnelle, dans le cas d'une présentation « individualisée ». Cette dualité laisse alors « ouverte » la question de la lecture de l'oeuvre « dans un environnement privé et dans le contexte d'une présentation plus globale et de surcroît publique ».
Le texte de Fanni Fetzer, historienne des traditions populaires interroge la mémoire imagée collective : « Gitte Schäfer se dit chasseuse de traces, de signes et d'histoires, qu'elle débusque dans toutes sortes de motifs, formes, matériaux et techniques. Son territoire de chasse couvre toute la vieille Europe, dont les chants folkloriques, l'Histoire et les histoires se retrouvent dans son travail, agrémentés de désirs quotidiens d'exotisme et d'aventures. » Avec pour toile de fond les oeuvres de Schäfer, le texte de Jacob Fabricius questionne sans apporter de réponse claire et définitive les origines familiales et forcément pleines d'affect de son goût pour l'art et sa collection.
Pour Dominic Eichler, un des enjeux décisifs de l'oeuvre de Schäfer est « de démontrer comment les objets et les images du monde peuvent être récoltés et extraits avec profit du flux ininterrompu des choses - délivrés de l'inhérente obsolescence que leur assigne implicitement le dogme de la consommation » . Ces objets récoltés évoquent alors dans l'espace d'exposition « des histoires bizarres ou curieuses, des rencontres fantaisistes », se font l'écho « d'autres personnes, d'autres lieux, d'autres formes d'existence, disparus peut-être aujourd'hui ».
L'entretien de Frédéric Oyharçabal avec le psychanalyste Jean-Paul Abribat s'appuie sur le caractère éminemment « conversationnel » de l'oeuvre de Schäfer pour esquisser les contours d'une oeuvre qui refuse toute centration - et par extension celle du sujet, pour une « confiance en la multiplicité, l'hétérogène, l'hétéroclite, sans qu'il y ait un point unificateur ».
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