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Si Gérard Titus-Carmel s'est d'abord fait connaître par son oeuvre graphique de dessinateur, de peintre et de graveur, s'il en est venu à l'écriture par ses notes d'atelier, « de la peinture au bout des doigts », il serait réducteur de ne voir en lui qu'un « peintre-qui-écrit ». On se souviendra qu'il est à ce jour l'auteur d'une cinquantaine d'ouvrages et recueils de poésie, dont la matière, tout en témoignant, de même que son activité d'« illustrateur » (notamment aux côtés de Bonnefoy), d'une continuité complexe entre le geste d'écrire et le geste de peindre, n'en présente pas moins une pleine autonomie. Un écrivain, donc, aussi bien qu'un peintre. De sorte que le présent recueil, réunissant l'ensemble de ses écrits sur la littérature, constitue le second volet d'un véritable diptyque inauguré par Au Vif de la peinture, à l'ombre des mots, qui rassemblait les textes qu'il a consacrés l'art (L'Atelier contemporain, 2016).
De cette vocation duelle de peintre et d'écrivain, des interrogations et des soupçons qu'elle a pu susciter chez lui-même comme chez d'autres, il est question en bien des pages. Quel but unique, se demande l'auteur, poursuit-il par deux voies concurrentes ? Ou faut-il dire : deux voies complémentaires ? On trouvera donc ici la contribution d'un double praticien sur le rapport entre deux arts qui ont en commun d'être graphiques, entre deux façons d'attaquer la blancheur du support et de donner forme à l'« absence », au « vide » et au « vertige » - termes-clefs sur le plan artistique, poétique et biographique.
Loin de se contenter d'observer cette recherche dans son oeuvre propre, Gérard Titus-Carmel la met au jour et l'analyse chez les auteurs auxquels ils se sent partie liée. Yves Bonnefoy, Pierre Michon, Jacques Dupin, Pierre Reverdy, Jean Echenoz, parmi d'autres, sont ainsi longuement scrutés et commentés, et non seulement à l'aune des thématiques et des « obsessions » de l'auteur, mais avec une attention et une érudition dans lesquelles se signale un très fort intérêt pour le domaine poétique récent. Nombreuses aussi, par conséquent, les études consacrées à des auteurs déjà reconnus mais ignorés du grand public - citons Antoine Émaz, Gustave Roud, Hart Crane et Bernard Vargaftig.
La manière de ces textes révèle de toute façon une jubilation de la lecture et de l'écriture qui ne se dément en aucun point de l'ouvrage. « Donner de la langue » à un texte :
Dans cette expression très prisée par l'auteur se dévoile le ressort d'une intelligence profuse et communicative dont on comprend qu'elle puisse en venir à buter contre le silence de la peinture. On trouvera donc aussi dans ce volume quelques récits, rêveries et digressions, souvent empreints de fantastique et occupés eux-mêmes de la thématique de l'absence, où se donne libre cours une pure jouissance du grand style.
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