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Voici présentés ici quatre parmi les meilleurs discours de Lysias (459/8-382 av. J.-C.), l'un des tout premiers, en talent et en réputation, parmi les dix orateurs attiques, en compagnie d'Isocrate et Démosthène. Ce choix, effectué parmi les 34 ou 35 discours dont on possède encore des vestiges étendus, entend illustrer les trois principaux aspects de l'activité de leur auteur : Lysias fut logographe (rédacteur de plaidoiries pour le compte d'autrui), mais il fut impliqué dans un important procès politique, et ne fut pas étranger au courant dit sophistique.
Le discours I (Sur le meurtre d'Ératosthène) a été rédigé par Lysias pour la défense d'Euphilètos, qui a assassiné en flagrant délit l'amant de sa femme. Le fait est avéré, mais il n'est conforme au droit que si l'accusé peut se disculper d'une accusation de complot, portée par les parents du mort. La démonstration procède essentiellement par une narration reconnue depuis longtemps comme un chef d'oeuvre du genre.
Le discours XII (Contre Ératosthène) est l'un des grands discours politiques que nous ont légués les Grecs. Composé par Lysias pour son compte personnel, c'est une violente diatribe contre Ératosthène (un personnage sans doute distinct de celui évoqué dans le discours I), l'un des Trente tyrans qui ont exercé sur Athènes, à l'issue de sa défaite contre les Spartiates en 404, une oppression à la fois brutale et inique. En tant que riche métèque, Lysias - avec sa famille - a subi de plein fouet un traitement dans lequel Jacqueline de Romilly a vu la préfiguration « de tous les cas de poursuites collectives et arbitraires qu'a pu connaître l'histoire ».
Le discours XXIV (Sur l'Invalide) met en scène un infirme, petit artisan exerçant près de l'agora, qui devait avoir la langue trop bien pendue. Lors d'une procédure d'examen, l'un de ses ennemis cherche à le priver de l'allocation qu'il touche en raison de son handicap. Mordant, spirituel, ce texte est parfois considéré comme un pur exercice de virtuosité.
Le discours XXXII (Contre Diogiton), transmis par Denys d'Halicarnasse, évoque la spoliation de jeunes orphelins par le parent chargé de gérer leur héritage. La figure de leur mère et son témoignage, invoqué indirectement, frappent par leur intelligence et leur dignité.
En traitant de front la dimension rhétorique de l'oeuvre de Lysias, le présent ouvrage s'inscrit dans un courant récent de redécouverte de cette discipline jadis méprisée ou ignorée. Par ailleurs, il entend ouvrir la lecture de ces textes sur les aspects juridiques, historiques et anthropologiques d'une pratique discursive qui est au coeur de la vie sociale et politique de l'Athènes démocratique, telle que l'on décrite les tenants de l'anthropologie structurale. Enfin, mis en perspective sur la longue durée, l'art de Lysias peut trouver sa place comme référence en matière stylistique.
Maître de la narration argumentative, de l'évidence narrative et de la reconstitution des idiolectes, Lysias est autant l'un des pères de la plaidoirie moderne que l'un des modèles du roman populaire.
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