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Dans une France qui pourrait être la nôtre, Laure Vertu, capitaine de police, démissionne après plus de dix années de service acharné au sein de la brigade anti-fraude. Dans ce bref roman noir, porté par une langue limpide, qui donne toute leur place aux rêves et à leur puissance, Lucie Taïeb s'empare du genre policier pour mieux le subvertir. Sa capitaine Vertu, Bartleby au féminin, dure à cuire, hallucinée, oppose au "monde tel qu'il est", à ses violences, ses dénis, ses compromissions et ses faux espoirs, un refus buté.
« Capitaine Vertu » de Lucie Taïeb est un roman que j’avais repéré à sa sortie et j’ai été ravie de le retrouver présenté lors du dernier apéro polar des éditions Pocket.
Laure Vertu est une capitaine de police très reconnue dans son travail à la brigade anti-fraude, une femme efficace, qui semble être sans aspérité, sans véritable vie personnelle, tout entière dévouée à son travail…jusqu’au jour où elle démissionne brutalement et disparaît … La jeune femme s’était retrouvée confrontée, à plusieurs années d’intervalle, à des victimes d’un homme qui les a manipulées pour emprunter grâce à elles de grosses sommes d’argent. Une affaire qui la renvoie à son lourd passé familial…
J’ai été très agréablement surprise par la qualité littéraire de ce court roman. Lucie Taïeb a vraiment une très belle plume, qui m’a charmée. Il y a une atmosphère particulière dans ce livre, à la fois brumeuse et poétique, qui est inhabituelle dans un roman noir, ainsi que des questionnements qui apparaissent en filigrane sur la constitution de la personnalité du Capitaine Vertu, sur son rôle en tant que « serviteur de l’Etat », sur le poids également de l’héritage et du nom …
Pour autant, ce livre est déstabilisant. Déjà parce qu’il est présenté comme un polar, ce qui génère certaines attentes : une intrigue, une enquête, une résolution… au début, il y a effectivement une affaire de fraude, une photo « choc », des réminiscences … et puis, très vite le récit par dans une autre direction… Et le livre est court, mouvant, échappant facilement au lecteur – qui est véritablement la capitaine Vertu, quel est son but, quelles sont ses motivations ? Des éléments sont certes fournis par l’autrice mais le récit reste très onirique et a fini par me dérouter et me perdre.
J’ai beaucoup aimé le style de l’autrice et je lirai donc avec plaisir d’autres ouvrages mais il m’a manqué ici un fil conducteur fort et une véritable intrigue et je suis passée à côté de ce que proposait l’autrice.
Une enquête policière en apparence. Un questionnement intime et politique en réalité.
A la brigade des fraudes, Laure Vertu est reconnue pour être une capitaine efficace et professionnelle. Elle ne lâche jamais rien. Mais ses équipes ne savent pas grand-chose d’elle. Distante, silencieuse, elle cloisonne parfaitement sa vie privée et son boulot. Alors qu’est-ce qui pousse Capitaine Vertu après 10 ans de bons et loyaux services à démissionner soudainement, du jour au lendemain, sans explication ?
Il y a un truc magnétique dans ce court roman à la densité folle. Difficile de trouver les mots pour en parler. La forme et la prose en font la richesse tout autant que le propos. Lucie Taïeb fait le portrait d’une femme qui tente d’échapper au rôle qui lui est assigné, qui tente de s’arracher à l’aliénation sociale et à une forme d’enfermement. Elle joue avec les questions d’identité et avec des questions très actuelles comme les violences policières en nous faisant suivre, avec beaucoup de tendresse, le cheminement de ce personnage.
Un roman très contemporain et un univers fort qui ne séduira peut-être pas tout le monde mais ne laissera personne indifférent.
« Dans sa tête loge une armée ».
« Capitaine Vertu » entre l’ombre et la lumière. Bien avant le récit sombre, émouvant et apprenant, écoutez le chant de la langue. Cette douceur de ton dont on ressent d’emblée le génie et le pouvoir intrinsèque de Lucie Taïeb qui a publié deux essais dont « Fresbkills:Recycler la terre (La Contre-Allée, 2020), plusieurs recueils de poésie et des traductions de l’allemand. Aux éditions de l’Ogre, deux romans : « Safe , (2016) et « Les Échappées » (Prix Wepler, 2019).
Ce livre-somme est un chef-d’œuvre résolument d’épreuves et de cheminements. « Capitaine Vertu » c’est une rencontre d’orfèvre et souveraine.
« Capitaine Vertu » alias Laure Vertu, est une jeune femme en quête d’elle-même, impassible et secrète, les contradictions à fleur de peau. Capitaine de police côté ville. Effacée, triste, déterminée, d’élégance et d’austérité elle travaille dans la brigade anti-fraude.
« Lorsqu’elle voyait la haine, elle n’essayait pas de la détourner ».Intranquille et poignante, « Vertu rêvait d’embrasement… Car ceux à qui Vertu adressait la parole étaient généralement flics eux-mêmes, ou truands . »
Vertu est manichéenne. Sous ses faux-airs, se cachent les troubles pernicieux, craintifs et implacables. Laure Vertu, mais est-ce bien son nom ? Solitaire et fascinante, fille d’immigré, cour poussiéreuse, faux-semblants, un père en fuite parentale. La vertu aux abois, les spéculatives endurances abolies. Capitaine Vertu, « comme le fruit tombe de l’arbre elle se détachait d’eux… décida qu’elle ne serait pas avocate, mais juge ou policière . »
Son père, manipulé, embrigadé dans les chimères et les petites et grandes combines, bandit côté jour, le déni pour allié, un voyou qui aimait l’enfant mais mal, jusqu’au jour où.
L’étau se resserre. Le récit pénètre dans la voie de l’exutoire. Capitaine Vertu est son propre bouclier. Nage dans un lac glacé, de la pluie fine et insistante sur les regards, les gerçures sur le cœur. L’effacement existentiel, Laure Vertu est de batailles et de craintes, gouffre ou plein sud. Qu’importe le spartiate glacé, le sac bleu trop bien rangé, les prises de risques, elle est son propre maître. Cheveux en bataille, la conscience étincelle et les armures salvatrices. Ce livre-monde, « femme et fille d’immigré » est un parchemin initiatique.
« Aujourd’hui, je paie. La conscience du devoir accompli. Le confort de la capitainerie. Je sais exactement ce qui a eu lieu. J’étais à l’intérieur et vous dehors. »
La vertu fenêtre sur sa vie, gémellaire de la trame belle à pleurer. On ressent le vent sur les pages. Cette capacité hors norme de faire un roman avec le plausible. Laure Vertu, sur le banc des écueils, des gerçures sur la mains, sauvage de beauté, honnête et cristalline. Vertigineuse d’émancipation, la dignité-clairière, le désastre du manque, l’obsession cardinale de sa renaissance en advenir.
Ce livre magistral, de rectitude, somme sociale et féminine, l’immensité du premier pas.
D’une contemporanéité fresque allégorique, ce grand livre tremblant de pluie est un viatique. Un hymne à la liberté, à la quête de soi. Accueillir l’honneur des clés cachées entre les lignes . Revivre ! Un livre qui accroche ses bras autour de votre cou. Publié par les majeures Éditions de l’Ogre.
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