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Prélude au Ragnarök, un cycle en 4 tomes, s’est terminé sur Scalde. Aslaug : Les Vents du Ragnarök est la suite directe de ce dernier roman et inaugure un nouveau cycle : Chroniques du Ragnarök. Je vous conseillerais de lire d’abord le premier cycle avant d’attaquer ce roman afin de mieux comprendre le personnage d’Aslaug, mais aussi sa riche histoire familiale. Après tout, elle est la fille de l’illustre Sigurd et de la Valkyrie Brunehilde !
À chaque fois que je lis un roman de Federico Saggio, je fais le même constat : l’auteur possède une plume incroyablement riche, immersive et imagée qui restitue à merveille le caractère sombre et implacable de la mythologie germano-scandinave dans laquelle il nous plonge. Une plume qui sublime également chaque acte de courage alors que souffle le vent glacial du Ragnarök et qu’une ambiance de fin du monde nous écrase de son poids.
Ecrasée, Aslaug l’est d’autant qu’en plus des signes avant-coureurs de la fin de tout, la jeune femme doit affronter un deuil. Le deuil de l’homme qui l’a élevée et qu’elle considérait comme son père, les fils tranchants de la Destinée lui ayant très tôt arraché son géniteur. Perdue, en colère et triste, Aslaug s’égare dans sa bestialité au point de presque en oublier son humanité ! Mais dans le noir, s’élève une lueur, celle d’un vieil ami, qui n’a jamais cessé de croire en elle, de l’aimer et de la protéger, Bragi.
J’ai eu un immense coup de coeur pour Bragi, présence rassurante qui soutient Aslaug de manière inconditionnelle, veillant à lui rappeler qui elle est vraiment et ce dont elle est capable. La jeune femme pourra compter sur sa bienveillance sans jamais pour autant se reposer sur cette dernière. Et c’est là toute la puissance du portrait esquissé par l’auteur : Aslaug a ses failles et se laisse parfois déborder par ses doutes, mais c’est une (com)battante dans l’âme. Elle trébuche, se fait mal mais se relève, encore et encore !
Même quand le désespoir se fait sentir, elle nous prouve que tant qu’elle sera vivante, elle avancera non pas sur le chemin d’une Destinée toute tracée, mais sur la voie qu’elle aura choisie d’emprunter. Et tant pis, si cela passe par tenter de secourir un peuple, qui lui aura bien facilement tourné le dos, et ceci non pas parce qu’elle le doit, mais parce qu’elle le veut ! Une tentative de sauvetage qui lui apprendra néanmoins une cruelle mais importante leçon de vie.
Libre arbitre, liberté, sens du sacrifice, courage dans l’adversité, lutte… Tout autant de thèmes illustrés avec force et une certaine sagacité ! Alors que ses personnages se détachent d’une trame inéluctable, Federico Saggio interroge sur la possibilité pour chacun de ne pas subir son destin mais de choisir d’affronter les événements et les éléments afin de se construire son propre chemin. Un chemin de liberté et de lumière, sur lequel plane néanmoins une indéniable vérité : rien ne dure éternellement, ni les dieux, ni les héros…
Page après page, l’auteur construit une intrigue qui nous happe, nous fait passer par différentes émotions et nous pousse à nous interroger sur des concepts presque philosophiques, grâce, entre autres, à son art de la narration. Un art qui alterne entre intime et grandiose, entre l’oralité des veillées au coin du feu qui réchauffent et soudent, et le caractère presque sacré des grandes épopées qui imposent silence et respect. Il flotte d’ailleurs sur ce roman une aura d’héroïsme, mais un héroïsme humain plus que divin, Aslaug restant une humaine avec ses failles, ses faiblesses, mais aussi une force incroyable qui émerge pour briller et nous éblouir par sa puissance salvatrice.
Une force qui lui sera indispensable, Aslaug étant confrontée, en plus de la cruauté des forces en jeu, à la bestialité qui prendra parfois forme humaine. Je pense notamment à l’acte abominable d’une femme qui me restera très longtemps en tête et qui m’a profondément choquée. Attendez-vous également à des scènes violentes et sombres qui prouvent toute la détermination et la force mentale de notre héroïne, qui a fait le choix difficile de ne pas courber l’échine devant une Destinée aux voiles obscures qu’il est bien difficile de lever.
En conclusion, en plus d’un rythme implacable et impitoyable qui nous fait tourner avidement les pages, Aslaug : Les Vents du Ragnarök brille par la manière dont Federico Saggio nous narre l’épopée d’une jeune femme à la personnalité complexe et développée qui refuse de se soumettre à un destin qu’elle n’aurait pas choisi. Une épopée mise en valeur par sa plume puissamment évocatrice qui nous rudoie tout en nous tenant captifs, à l’image de cette mythologie germano-scandinave de laquelle l’auteur s’inspire pour nous proposer une œuvre puissante qui lui est propre. À noter qu’en plus du fond, la forme est superbe : couverture Soft Touch, illustration pour introduire les chapitres, frise évoluant au gré des pages… Des petits plus qui rendent la lecture encore plus plaisante et immersive !
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