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«Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu. Ce goût, c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté... Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur goutelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir.»
Le premier pas, si simple en apparence, vers une œuvre magistrale où chaque personnage acquiert le statut de héros, où le lecteur est emmené plus loin qu’au-delà du miroir, puisqu’il devient tour à tour narrateur, sa grand-mère, son amour de jeunesse et tous les autres....
« Les lieux que nous avons connus n’appartiennent pas qu’au monde de l’espace où nous les situons pour plus de facilité. Ils n’étaient qu’une mince tranche au milieu d’impressions contiguës qui formaient notre vie d’alors : le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant ; et les maisons, les routes, les avenues, sont fugitives, hélas ! comme les années. » La phrase finale « Du côté de chez Swann » éclaire brillamment toutes les pages qui l’ont précédée, passant par « Combray », « Un amour de Swann » et « Noms de pays : le nom ». Longtemps, je me suis refusé à pénétrer dans « A la recherche du temps perdu », intimidé que j’étais par les dithyrambes sur l’œuvre proustienne. Je me souvenais aussi des impressions que mon professeur de français nous avait retranscrites, évoquant La recherche avec une émotion et une passion si intense, que je me demandais si j’allais l’apprécier autant, si j’allais être à la hauteur pour affronter ce monument.
Eh bien, que dire, si ce n’est que je ne regrette pas le voyage dans les méandres des souvenirs du narrateur, dans cette expérience de pensée qui nous fait sentir le temps qui passe, qui nous rend sensible une conception si nouvelle du temps, de la sensation qu’on en a, de l’erreur de notre intuition à son sujet. Entre Méséglise et Guermantes, de Combray à Paris, de ces lieux rêvés et idéalisés, on ne ressort pas indemne. Et, au-delà de cette très juste perception du temps et du monde sensible, Proust dépeint comme personne bourgeoisie et noblesse, cette bonne société, ses codes, ses références artistiques et culturelles, ce beau monde dont il nous fait saisir la psychologie avec une acuité et une précision parfaites, si bien détaillée par ses longues phrases dont souvent on ne sait plus où elles ont commencé, chacune d’entre elle devenant à elle seule un voyage et une expérience dans cette galerie de personnages si subtilement rendue. A tout cela encore, s’ajoute l’humour, la malice et la naïveté du narrateur s’entremêlant pour nous décrire savoureusement des personnages, comme l’inénarrable Mme Verdurin, protectrice des arts terriblement superficielle. Et l'amour bien sûr !
La recherche est une réflexion philosophique, une étude psychologique, et il est évident que maintenant que je m’y suis lancé, je vais poursuivre ma lecture, continuer inlassablement de parcourir les méandres de ses complexes phrases si belles pourtant, une fois que mes premières impressions se seront dissipées et que le besoin de me plonger à nouveau dans la magie de la prose proustienne m’assaillira. Mon voyage n’est pas terminé et je m’en réjouis.
« Longtemps, je me suis couché de bonne heure »… curieux, moi-aussi, de partir A la Recherche du Temps Perdu, avec la prudente détermination de l’explorateur franchissant la lisière d’une jungle impénétrable, avide de s’en aller retrouver le temps perdu. Mais n’est pas Livingstone qui veut, si bien qu’aucun Stanley ne put jamais porter connaissance à qui que ce soit que je sois arrivé quelque part. On me trouva, à trois reprises, profondément endormi avant d’avoir franchi la première dizaine ou vingtaine de pages de ce si fameux « Du côté de chez Swann ». L’explorateur n’avait rien exploré, le lecteur avait bien lu et relu deux ou trois fois, sans vraiment réussir à les comprendre, quelques phrases comme : « Un homme qui dort, tient en cercle autour de lui le fil des heures, l’ordre des années et des mondes. Il les consulte d’instinct en s’éveillant et y lit en une seconde le point de la terre qu’il occupe, le temps qui s’est écoulé jusqu’à son réveil. » Il avait reposé l’ouvrage sur une étagère, le confiant à la poussière et se jurant qu’on ne le reprendrait plus à ainsi perdre son temps. Il proclamait sans vergogne lorsque le sujet venait à son oreille : « J’ai essayé, les bras m’en sont tombés, c’est cérébral, ampoulé et assommant. »
Et c’est ce même cuistre qui vient aujourd’hui vous vanter les charmes de la promenade « Du côté de chez Swann » et vous inciter à pénétrer sans crainte dans la jungle proustienne. Pourquoi donc, sous quel prétexte, avec quels arguments ? C’est toujours très cérébral. Les phrases longues et assommantes ont-elles disparues ? Elles sont toujours là, j’en ai retrouvé une de deux-cent-soixante-sept mots consacrée à la promenade en calèche de Mme Swann au Bois. Il faut la lire pour découvrir, ce qui est incroyable, qu’elle est parfaitement légère, pour peu qu’on soit attentif à la ponctuation, et qu’elle constitue en elle-même une véritable et magnifique scène de cinéma. Rien d’assommant, que du plaisir d’assister à un spectacle de choix si minutieusement et élégamment dépeint. On découvre aussi, en particulier dès le premier chapitre (Combray), quelques lignes admirables sur la grand’mère de l’auteur, son amour pour sa mère, sa tante, sur des gens simples comme la cuisinière de sa tante ou des gens du grand monde comme ce monsieur Swann dont le nom m’avait autrefois tant intrigué. Ces personnages nombreux (il y en a beaucoup d’autres) vus par le regard d’un enfant sont souvent attachants, parfois ridicules mais toujours consistants. Ils permettent à l’auteur d’évoquer finement un des thèmes principaux de son œuvre : le souvenir, dernier refuge de ceux qui furent et ne sont plus, de ce qui fut et qui n’est plus. Il y a aussi ce que peut produire de plus fort l’Impressionnisme en littérature (le peuplier qui adresse à l’orage des supplications et des salutations désespérées, le tonnerre qui roucoule dans les lilas, la promenade au-milieu des aubépines ou une description magnifique de poésie à propos d’asperges se terminant de façon très humoristique). Et puis arrive vite (vers la cinquantième page), prodigieux, plus célèbre que l’œuvre, plus fameux que l’auteur, le passage consacré à la madeleine, génial exposé liant le goût, l’odeur et le souvenir. Quatre pages délicieuses, fabuleuses, que bien peu ont lues mais que tout le monde croit connaître, quatre pages qui justifieraient à elles seules toutes les tentatives impulsives de partir A La recherche du Temps Perdu.
Dans la seconde partie (Un Amour de Swann), consacrée aux tourments de l’amour et aux affres de la passion faits de soupçons, d’inquiétudes, de mensonges, d’espoirs déçus, voici donc un dandy fréquentant les meilleurs cercles et les plus jolies femmes, « Swann, lui, ne cherchait pas à trouver jolies les femmes avec qui il passait son temps, mais à passer son temps avec les femmes qu’il avait d’abord trouvées jolies. » …qui se laisse séduire par une cocotte qu’il ne trouvait pas à son goût mais qui, après lui avoir « fait son thé », sut l’ensorceler et le tourmenter jusqu’à ce qu’un beau matin, enfin guéri, « il s’écrie en lui-même : Dire que j’ai gâché des années de ma vie, que j’ai voulu mourir, que j’ai eu mon plus grand amour, pour une femme qui ne me plaisait pas, qui n’était pas mon genre ! » On n’est pas très éloigné de Zola (Nana) mais, ici, point de naturalisme, tout est en suggestion et légèreté, en non dit et en supposition, ce qui paradoxalement ajoute à l’affection comme à l’affliction pour Swann, qui, au fil des ses déboires, gagnent le lecteur. Quant Zola se place du côté (décidemment « le côté ») de la cocotte, Proust se range du côté de l’amoureux transi, du séducteur séduit, du cocu magnifique. Ce n’est plus tout à fait le même point de vue.
La troisième et dernière partie, la plus courte, est consacrée aux rêveries de l’enfant qu’était Proust à partir de noms de ville déclenchant en lui l’imagination de voyages enchanteurs, alors même que sa santé fragile l’empêche de quitter Paris. Alors, même si une dizaine de villes bretonnes ou normandes deviennent sous sa plume et par la grâce de son talent ce que leurs syndicats d’initiatives n’auraient jamais osé rêver, c’est Paris qui profite le plus de ses magnifiques descriptions, d’autant plus belles qu’elles sont magnifiées par un premier amour, celui qu’il ressent un jour, quelque part sur la promenade des Champs-Elysées, pour « une fillette à cheveux roux qui jouait au volant devant la vasque ». Elle s’appelle Gilberte Swann et à cet instant, c’est bien « du côté de chez Swann » que son cœur bascule.
Retournant bien plus tard au Bois ou aux Champs-Elysées, cherchant la trace de son enfance et de ses émois, il ne peut que constater (l’un des thèmes centraux de son œuvre) que revenir dans les endroits de sa jeunesse ne parvient pas à la ressusciter : « Les lieux que nous avons connus n’appartiennent pas qu’au monde de l’espace où nous les situons pour plus de facilité. Ils n’étaient qu’une mince tranche au milieu d’impressions contiguës qui formaient notre vie d’alors : le souvenir d’une certaine image n’est que le regret d’un certain instant ; et les maisons, les routes, les avenues, sont fugitives, hélas, comme les années. »
Et je me dis qu’il y a sans doute dans cette phrase finale l’explication de mes précédents échecs à trouver quelque intérêt à ce chef d’œuvre. Je n’avais sûrement pas assez vécu. Je me contentais de vivre sans me soucier des années qui passaient, accumulant sans m’en rendre compte des souvenirs que je prenais alors pour quantité négligeable puisqu’il me semblait vivre des moments éternels. Proust est sans doute pour cela à lire à la maturité, il réclame de l’attention et de l’expérience pour pouvoir vraiment apprécier ses thèmes et son style. Accompagné d’un fond musical composé par ses contemporains (Debussy, Rachmaninov, Satie), j’ai fait un somptueux voyage dans les souvenirs et les émotions impressionnistes du « petit Marcel » et aussi un peu, c’est là qu’est la magie, dans les miens. Maintenant que je n’ai plus vraiment de temps à perdre, aussi étonné que ravi, maîtrisant enfin la longueur des phrases et sachant goûter les imparfaits du subjonctif qui fleurissent comme les nymphéas au bord de la Vivonne, je m’apprête à poursuivre La Recherche, en m’interrogeant sur ce qui peut bien pousser A l’ombre des jeunes Filles en Fleurs …
Roman à la première personne, abordant différents genres tels le roman sentimental, psychologique, philosophique, sociologique en recréant la société y mêlant famille, voisins, ecclésiastiques, bourgeois, riches tel Swann et pauvres telle Françoise la cuisinière, petites vertus et gentilshommes, grandeurs et petitesses d’esprit, cœurs généreux et mesquins, confiance et trahison et bien entendu, histoires d’amour compliquées, celles où l’on souffre et Proust sait décortiquer ces tourments de la passion avec une plume de Maître !
Ce héros « je », permet de pouvoir, comme un capitaine à la barre de son navire, naviguer dans un flot de pensées et de souvenirs et nous faire dans un roulis permanent, tanguer du passé au présent tout en tenant le cap. « Parce que je dis « je », on croit que je suis subjectif. Parce que je suis obligé de rassembler dans mon premier volume –comme des chevaux au poteau- tout ce qui chez mes personnages se modifiera au cours du temps… » Extrait de la lettre de Proust à Henri Ghéon.
Mais c’est avant tout un roman de mémoire. De la mémoire involontaire chère à Proust car « Pour moi, la mémoire volontaire, qui est surtout une mémoire de l’intelligence et des yeux, ne nous donne du passé que des faces sans vérité ; mais qu’une odeur, une saveur retrouvées dans des circonstances toutes différentes, réveillent en nous, malgré nous, le passé, nous sentons combien ce passé était différent de ce que nous croyions nous rappeler… « Je » (et qui n’est pas moi) retrouve tout d’un coup des années, des jardins, des êtres oubliés dans le goût d’une gorgée de thé où il a trempé un morceau de madeleine… Voyez-vous, je crois que ce n’est guère qu’aux souvenirs involontaires que l’artiste devrait demander la matière première de son œuvre. » Extraits de l’interview conduite par Elie-Joseph Bois.
Me promener avec ce « je » enfant, dans la première partie intitulée ‘Combray’ m’a enchantée, comblée de plaisir, de douceur, m’a nourrie d’esprit enfantin dans de beaux jardins fleuris, m’a fait vivre des dimanches matin à la campagne, m’a fait sentir des parfums de glycines et églantiers sauvages et m’a emplie de rêveries. J’imaginais les paysages si bien dépeints dans leurs moindres détails au point que cela m’a renvoyée dans le souvenir de promenades en Normandie avec son climat, les odeurs de chaque saison et particulièrement celles des fleurs au printemps et de la terre mouillée en automne. Puis en deuxième partie, Proust nous fait vivre l’amour de Swann, homme distingué et cultivé de la très haute société, dans un ‘Amour de Swann’ tout en témoignant d'un Paris d'époque avec ses calèches et coupés sur les Champs Elysées et ses 'salons où on cause'. Sa dulcinée, Odette de Crécy, qui serait une ‘femme entretenue’ sans grande éducation, tout dans le paraître mais si belle et si attendrissante va savoir allumer la flamme de la passion amoureuse et éveiller la jalousie de Swann. Swann est un personnage attachant et sympathique pour qui on frémit de le voir se faire entourlouper par des personnes malveillantes. On retrouve « je » dans la troisième partie intitulée ‘Nom de pays : le nom’. Il est alors jeune adolescent et rencontre la fille de Swann, Gilberte qui, belle et sure d’elle, va en toute innocence lui torturer le cœur… Mais alors qu’elle a quitté Paris, « Je » va rencontrer Madame Swann « dont la réputation, de beauté, d’inconduite et d’élégance était universelle», dans le Bois de Boulogne magnifique à l'époque et tout à fait différent de celui que nous connaissons actuellement. Donc, du coup, le lecteur apprend que Swann a fini par épouser Odette de Crécy qu’il avait laissée en son absence, aux bons soins de son ami Charlus dans la partie 2.
A mon grand étonnement, me voici tout à fait enthousiaste à la lecture de ce roman fleuve et ai déjà commencé le deuxième tome. Je pense que comme beaucoup de lecteurs, j’étais habitée par le préjugé d’un livre ennuyeux ce qui n’est pas le cas. J'ai hâte de connaître la suite. L’écriture est simple et magnifique et Marcel Proust a beaucoup d’humour. Ce livre est indémodable puisqu’il parle de l’esprit humain au sein de la société et véhicule une galerie impressionnante de tableaux de natures et paysages absolument sublime. Quelle plume !
La mémoire étant infinie, l’œuvre l’est aussi….
Jean Cau interviewant Gaston Gallimard : « Dites-moi, Gaston, est-ce-que s’il n’était pas mort, il aurait continué d’écrire ? Car enfin, après « le Temps retrouvé », « la Recherche » donne l’impression d’être une œuvre close, terminée… ». Gaston s’étonne et sourit. « Mais elle a toujours été terminée ! C’est une œuvre telle qu’il pouvait l’arrêter quand il lui plaisait ou la continuer indéfiniment. »
J’ai mis ce livre dans ma valise à chacune de mes vacances d’été, je crois… Mais le « Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que… » Zzzzzz… Et Proust chaque année a connu sa priorité grillée par d’autres auteurs et le livre revenait à la maison rejoindre la bonne vieille PAL… Donc, maintenant, retraitée, j’ai du temps et j’ai décidé de lire Proust. Au départ un peu comme une potion puis je me suis surprise à adorer être en compagnie de « Je » et l’écouter raconter son épopée au fil du temps. Une lecture qui me fait beaucoup de bien.
Magnifique ! Un chef d'oeuvre dont la réputation n'est plus à faire. Swann est touchant, Odette imprévisible, Gilberte impertinente, les Verdurins... insupportables à mon avis!
Et un classique ! Un de plus !
Comme beaucoup, la réputation de Proust l'avait précédée et je craignais les phrases interminables et les descriptions detaillees à la baie près mais j'ai été enchantée de ma lecture.
Ma lecture s'est étalée sur de longs mois, il etait important pour moi de comprendre, de ressentir ses phrases, ses sentiments, ses ressentis, alors, je relisais des phrases, des paragraphes entiers. Parfois, pour mieux comprendre le sens de la phrase, mais souvent pour savourer l'effet voulu de ces images évoquées, des sentiments des personnages, du style de Proust.
J'ai été séduite, touchée, envieuse de cet être si sensible, si emprunt de souvenirs, de sensations, d'impression. Proust est à la littérature ce que Monet pouvait être à la peinture : il est capable de décrire des paysages par les impressions ressenties et non une description de faits de choses et c'est magnifique !
On ressent les événements et on aimerait avoir autant de souvenirs de nos lieux d'enfance de notre premier amour .
La deuxième partie m'a moins passionnée puisqu'on assiste presque à une histoire parallèle même si on retrouve le personnage de Swan. Tel un théâtre satirique qui montrerait la frivolité de l'aristocratie parisienne on assiste aux repas mondains de chez Mme Verdurin où tout se décide : soit on obtient les faveurs soit on est exclu des cercles. Swan en fera les frais...
J'ai adoré ses réflexions autour de l'écriture, la lecture, des moments imaginés qui risquent de gâcher la réalité, des souvenirs rattrapés qui permettent d'en retrouver leur saveur.
Alors faites-vous une infusion de tilleul, préparez quelques madeleines et installez-vous confortablement avec ce beau roman et savourez!
Toujours avec l'objectif de rattraper mon retard en ce qui concerne la littérature classique, je me devais de m'attaquer à un de ses sommets.
Dès les premières lignes, j'ai senti que j'entrais dans un monde où le style est roi. Chaque phrase de Marcel Proust est une friandise et chaque page est une boîte de ces friandises. Je me suis donc régalé de ces mots qui ont aguiché mes papilles de lecteur. Seulement, passé l'émerveillement des premiers paragraphes, la succession de belles mises en forme m'a conduit à l'indigestion. J'ai souvent fait l'éloge de romans qui n'avaient pas grand chose à nous raconter mais qui se distinguaient par une plume extraordinaire. Marcel Proust, lui, n'a strictement rien à nous raconter! Il nous livre un décorticage des sentiments du narrateur dans des scènes plus que banales de la vie quotidienne. Je ne me suis ni reconnu en lui, ni senti en empathie pour lui et ses "petites contrariétés" ne m'ont paru intéresser que lui.
La deuxième partie de ce 1er volume est pour sa part plus accessible. Mais même cette histoire qui nous narre l'évolution de l'amour de Mr Swann envers sa bien aimée sur fond de repas bourgeois, manque d'événements, de scènes qui pourraient marquer mon esprit.
N'en déplaise aux puristes, Marcel Proust est effectivement un maître des mots, mais je me suis cruellement ennuyé devant cette masturbation stylistique. Cela n'engage que moi, ne me mettez pas au pilori!
Le challenge "Les genres en folie" a été pour moi l'occasion de m'attaquer à un monument de la littérature: A la recherche du temps perdu de Marcel PROUST. Ou du moins à son premier tome: Du côté de chez Swann. Mes premiers pas dans l'oeuvre ont été difficiles, je l'avoue. Les phrases longues, très très longues, partent dans tous les sens et souvent j'ai dû m'y reprendre à plusieurs fois pour en comprendre le sens. Mais PROUST est ainsi. Il faut savoir prendre son temps pour savourer son écriture subtile et sublime. Oui, il a su me conquérir. Sa prose sensible et délicate croque à merveille la société qui l'entoure, les petits travers de ses contemporains et les rapports sociaux si strictement réglementés. On lit PROUST tous les sens en éveil. Avec lui, on sent les douces fragrances des jasmins du jardin de Swann, on découvre Combray, son églises, ses ruelles, ses prés comme si on y était, on entend les conversations de salon et bien sûr, on a sur la langue le goût de la fameuse madeleine trempée dans le thé de tante Léonie. Quand au détour d'une page, on tombe sur cette anecdote cultissime, on sait que l'on touche à l'essence même de cet écrivain incomparable.
Il faut lire PROUST! Une fois dans sa vie de lecteur, il faut se promener tranquillement avec lui, à Combray ou sur les Champs-Elysées, et tout doucement se laisser bercer par ses petites histoires sur le temps, l'amour, les gens.
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