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Sans doute la meilleure version du célèbre mythe d'Oedipe (entre celle de Sophocle, Cocteau, Corneille).
Sénèque, ou l'Art de la Tragédie antique par excellence ! Un réalisme poignant (notamment quand Oedipe s'arrache les yeux), un texte bouleversant, une lecture qui ne s'arrête pas, pas même lorsque la fin est là. Bien sûr, la traduction française des vers en latin, bien plus poétique qu'une traduction purement littérale, amplifie ce tragique et cette catharsis qu'on ressent pour le personnage : il nous bouleverse, nous terrifie, nous donne à le prendre en pitié et à le détester pour son orgueil. Mais c'est véritablement une version à lire absolument, courte qui plus est !
Oeuvre intemporelle que cet essai du célèbre philosophe stoïcien qu’était Sénèque ! Rééditée en 1998 aux éditions Fayard, dans la collection Mille et une nuits, » De la brièveté de la vie « est une lettre écrite à son beau-père Paulinus en l’an 49, dans laquelle Sénèque expose le fait que pour atteindre le bonheur, il faut consacrer son temps à la sagesse et non le perdre en activités stériles et inutiles ! Si l’homme court inexorablement après le temps, il semble ne pas en user efficacement. Un grand classique de la philosophie qu’il est bon de lire et relire.
Qui n’a jamais fait le triste constat que la vie nous filait entre les doigts ? Sénèque débute ainsi cette lettre :
p. 7 : » La majeure partie des mortels, Paulinus, accusant de mauvaiseté la nature, déplore que nous naissions dans la perspective d’une trop courte existence. «
Or, d’après le philosophe, nous ne manquons pas de temps, bien au contraire, mais nous ne l’exploitons pas à bon escient. L’homme semble se placer dans une certaine attitude de passivité, ce qui lui confère cette sensation de frustration. Cette négligence du présent est contraire au discours épicurien.
p. 9 : » Mince est la part de la vie que nous vivons. Quant à tout l’intervalle restant, au fond n’est pas vie mais seulement temps. «
Ainsi, Sénèque invite à vivre l’instant présent. Si nous ne pouvons échapper à la finalité de notre existence par la mort certaine, nous pouvons en revanche tendre vers le bénéfice de la vie et la sérénité devant l’acceptation de la mort.
p. 23 : » Personne n’apprécie le temps à sa véritable valeur ; chacun en use avec lui sans retenue, comme s’il était presque gratuit. «
L’oisiveté semble par conséquent incompatible avec la limite inéluctable qu’est la brièveté de la vie. Vantant notamment les vertus de la connaissance, de la curiosité et de l’ouverture d’esprit, l’homme sage devient ainsi pleinement acteur de l’accomplissement de sa vie. Sénèque réfute la notion de prévoyance. Car en se projetant, l’homme s’arrache au moment présent.
p. 24 : » Le plus grand obstacle à la vie est l’expectative, qui, suspendue au lendemain, gâche l’aujourd’hui. «
La crainte de l’avenir empêche tout être humain de tirer parti du temps présent. Sénèque désapprouve ceux qui dépensent ce précieux sésame qu’est le temps en plaisirs et distractions éphémères. Recherchant plus souvent une ascension sociale qu’une élévation de soi, l’homme néglige sa propre réalisation. La cause de cette insouciance : chacun vit comme s’il devait vivre pour l’éternité, mais la fragilité de l’existence ne vient souvent que trop tard. Et si le temps est ce que l’homme dit avoir de plus précieux, c’est ce qu’il dépense le plus, quand au contraire il s’attache à son argent ou ses possessions. Ces occupations futiles sont des passions incompatibles avec la vie de l’homme sage.
p. 18 : » Votre vie, pardieu, durerait-elle mille ans et plus, se rétrécira malgré tout jusqu’aux plus étroites limites ; point de siècles que les vices ne soient capables de dévorer ; il est, de fait, inévitable que cet espace, que la nature franchit même si la raison s’efforce de le rallonger, vous échappe bien vite ; car vous ne comprenez pas, ne retenez pas, ni ne forcez à ralentir, la plus fugitive des choses, vous la laissez au contraire s’en aller comme une chose superflue et récupérable. «
Ainsi, pour le penseur romain, la vie se divise en trois temps : ce qui fut, ce qui est et ce qui sera. Le rapport qu’entretiennent les hommes avec ces trois ekstases de la temporalité influe sur la qualité de leur existence.
p. 41 : » La vie du sage offre de vastes perspectives ; cette fameuse limite, qui enferme le reste des gens, ne vaut pas pour lui ; lui seul est dégagé des lois du genre humain ; tous les siècles lui sont dociles comme à un dieu. Une période est-elle passée ? Il s’en saisit par la mémoire. Présente ? Il en use au mieux. Est-elle à venir ? Il l’anticipe. Il se fait une longue vie par conjugaison de tous les temps en un seul. «
Sénèque constate également l’incapacité de l’homme à pouvoir rester seul avec lui-même. Cependant, seule une confrontation avec ses propres désirs pourrait lui procurer le sentiment de vivre une vie accomplie. L’expérience de l’ennui et de son dépassement est peut être le passage obligatoire pour se rencontrer et s’éprouver dans une temporalité véritable.
Entre stoïcisme et épicurisme, ce traité de sagesse a pour vocation d’atteindre l’ataraxie, la paix de l’âme. Sa hauteur morale n’a pas perdu de son actualité. A méditer pleinement…
p. 38 : » Nous pouvons débattre avec Socrate, douter avec Carnéade, trouver la paix avec Épicure, vaincre la nature humaine avec les stoïciens, la mettre de côté avec les cyniques. Puisque la nature supporte de partager avec nous l’accès à toutes les époques, pourquoi ne pas nous élancer de tout notre cœur, délaissant l’exigu et bref corridor de la vie, dans ces immensités, qui sont éternelles, de concert avec les meilleurs esprits ? «
Livre étonnant s'il en est. Moi qui classais Sénèque parmi les Stoïciens, il cite Epicure dans chacune de ses lettres.
Alors, évidemment, ce sont là les paroles d'un grand sage, que dis-je, d'un très grand sage. Et l'on y apprend beaucoup pour mieux vivre ou vivre mieux.
Ce qui m'a un peu dérangée ? Ces lettres à Lucilius qui se veulent des conseils paternels à un plus jeune tournent parfois à l'exhortation arrogante et à l'absence de discussion possible. Je sais et je te transmets mon savoir. Si tu ne fais pas ce que je dis, tu es dans l'erreur. Et là, bien sûr, mon sang rebelle ne fait qu'un tour.
Et au fil de ces lettres, j'ai fini par avoir l'impression de lire un prêche d'un grand-père autocentré, éloquent et brillant certes, mais profondément ancré dans ses certitudes.
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