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Que dire après une telle lecture ? Il est toujours difficile, je trouve, de donner son avis quand il s'agit de faits réels et qui plus est d'une horreur absolue.
Ce que je peux dire, c'est que grâce à ce témoignage, j'ai encore appris des choses sur cette période de l'Histoire. Notamment, j'ignorais que pendant les marches de la mort, certains prisonniers étaient en partie "déplacés" par bateaux et ça toujours dans des conditions inhumaines évidemment.
Je ne peux m'empêcher de me demander comment ma fille et moi aurions pu survivre dans de telles conditions. Aurions-nous résister avec autant de courage et de force à la faim, au froid, à la maladie, à l'humiliation, à la barbarie ? Et comment trouver la force de continuer à vivre après avoir vu et vécu autant de cruauté ? Comment continuer à avoir foi en l'humanité ?
Mon admiration est profonde pour ces mères (ou pères) qui se sont battues pour sauver leurs enfants, des fois en les "abandonnant" chez des étrangers en espérant leur éviter le pire ou d'autres fois en usant de subterfuges comme Raïa, la maman de Susie.
Si tout ce témoignage est très émouvant, certains passages sont particulièrement insoutenables, par exemple celui dans la Maline lors d'une Aktion dans le ghetto de Wilno ou encore le passage à tabac de Susie au camp de Kaiserwald. Tout cela est d'autant plus touchant quand on sait que c'est le regard et le vécu d'une enfant de 9 ans !
Cette nouvelle édition est enrichie de deux textes de Doron Rabinovici, le fils de Susie, et de deux interviews de celle qui aujourd'hui s'appelle Schoschana Rabiniovici. Très interessant.
« Nous, les enfants, nous oubliions de jouer, nous oubliions de rire, nous étions tristes, glacés, perpétuellement en proie à la faim, nous apprenions à vivre silencieusement, à nous regarder et à écouter les conversations des adultes. »
Jamais les enfants ne devraient vivre ça. Mais, tapis dans les caves du ghetto de Wilno, entassés sur des châlits dans le camp de concentration de Kaiserwald, travaillant comme des adultes dans le camp d’extermination de Stutthof ou titubant entre les corps durant la marche de la mort d’évacuation des camps, ces enfants martyres n’eurent d’autre choix pour survivre.
La petite Susie Weksler avait 9 ans quand les allemands envahirent sa ville de Wilno en Pologne. Commença alors en cette année 1941, pour elle, sa mère Raïa et toute la population juive polonaise de la ville, un calvaire qui dura pendant 4 longues années. Elle vécut l’impensable, l’insupportable, fut malade, blessée, enfant au milieu d’adultes, qui apprenait dans la douleur ce qu’était l’anéantissement de tout un peuple.
Sa mère Raïa fut le moteur de sa survie, la cachant, la soutenant, la faisant passer pour une femme et lui donnant la force, par ses mots, de supporter l’insupportable pour continuer à vivre, quoiqu’il arrive.
Ce récit est un déchirement mais il constitue un témoignage essentiel, à travers un regard d’enfant sur l’enfer nazi. Je l’ai lu en apnée, tentant de garder un certain recul face aux mots de Susie que l’autrice a retranscrits tels que la petite fille les a pensés, sans jugement, juste en ressentis.
De nombreuses annexes complètent et enrichissent ce livre dont un plan du ghetto, un arbre généalogique de la famille presque totalement disparue de Susie, ainsi que des textes de son fils cadet, Dorion Rabinvici, historien et essayiste.
Il faut absolument lire « Grâce à ma mère » pour avoir cette autre vision, à la fois naïve et tellement réaliste, de la machinerie nazie et de ses acteurs. Et gardons en tête cette réflexion si tristement actuelle de Dorion « on n’a pas vaincu ce qui a conduit jadis aux camps d’extermination ».
Pour terminer, je laisse la parole à Susie devenue Schoschana Rabinovici à la libération, pour ces derniers mots qu’elle prononça à 86 ans : « Soyez à partir à partir de maintenant les témoins de notre souvenir. Vous nous avez entendus. Racontez-le. Reprenez notre combat contre le mensonge, contre l’oubli. »
Suzie Wekler, 9 ans vit avec sa mère Raïa à Vilnius en Pologne. Sur la couverture, on les découvre toutes les deux. Ce sont 2 survivantes de la Shoah.
Grâce à son récit à la fois simple et détaillé agrémenté de notes de bas de pages très précis, nous avons la sensation de vivre à la même époque que nos deux protagonistes, mais surtout d’être des spectateurs impuissants, sachant par avance les horreurs que va subir tout un peuple et tout ceux qui ne seront pas à l’image de ce que les nazis auront jugé digne de vie.
La description des blocks où dormaient Suzie et sa mère m’a plongé de nouveau dans ma visite cet été des camps de concentration d’Auschwitz, de Birkenau en Pologne et celui de Sachsenhausen en Allemagne. Des conditions de vie indigne pour tout être humain.
On découvre avec horreur que pour les nazis, mais aussi pour la population environnante les juifs n’étaient rien, des êtres sans importance, du bétail qu’on mène à l’abattoir. Les nazis les ont déshumanisé à l’extrême, leur volant tout, les laissant mourir d’épuisement, de maladie de faim, les exécutants froidement, j’oserai dire par plaisir… Ne leur donnant même pas une sépulture digne, en les brûlants ou les jetant dans des fosses communes, sans cérémonie, des anonymes sans existantes.
Suzie ne doit sa survie qu’à l’intelligence et l’amour de sa mère, mais également à la Bienveillance des autres détenues.
Un livre poignant qui joue parfaitement son rôle de devoir de mémoire, d’autant plus qu’il est écrit par une enfant qui a survécu aux camps de la mort.
Le dossier final est également très intéressant, soulignant encore une fois l’importance de ne pas oublier.
Mais cela me laisse toujours sans voix quand je découvre que, encore une fois, des criminels de guerre s’en sont sorties sans aucune sanction.
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