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Subir un envoûtement à la lecture de ces phrases, qui coulent en nous, lecteurs chanceux d’avoir cet opus entre les mains.
Ce livre vous parle d’amour en une longue lettre vibrante.
1914 ? Heller lieutenant allemand croit sa fin proche. Il écrit à la femme française qu’il a rencontré juste avant la déclaration de guerre. Il devait faire son portrait mais la toile est restée vierge.
« Ce jeûne me rassurait sans m’illusionner. Devant vous, j’avais entendu une autre vie m’appeler à l’intérieur de ma vie. Loin d’être dupe sur la nature de mes sentiments pour vous, je veillai à ce que ceux-ci ne franchissent pas clandestinement une frontière sensible, la dernière, celle qui m’offrait encore un peu de terre ferme sous les pieds. Aussi me réfugiai-je dans un quotidien où j’étais sûr d’être le moins atteignable. »
En un condensé de mots précieux, de forme poétique, le lecteur voit éclore le sentiment amoureux.
Imagé et hypnotique, les mots coulent dans un temps suspendu entre l’immédiateté et l’infini souhaité.
« C’est une bouche close qui invite l’aveu, c’est les yeux d’une inconnue qui nous exaucent, c’est cette passerelle entre deux souffles, cette séparation des mondes brusquement abstraite dans la nocturne montée d’un désir. Et c’est cette senteur de bouquet déchiré dans l’oragée des corps. »
Le lecteur vit une aventure où il va faire le grand saut dans la beauté absolue de l’écriture de Pierre Cendors.
Tout y est vie qui pulse, les mots nous transpercent pour nous laisser pantois devant tant de magnificence.
« Les mots sont des yeux qui aident à sonder nos tréfonds, même à notre insu. »
Seul bémol, la police utilisée qui fait mal aux yeux.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 28 octobre 2019.
Voici une lecture hypnotique et étrange, nous ne savons pas où nous sommes, où va nous entraîner ce texte. D'une belle écriture fluide, nous partons dans l'esprit et le récit de ce narrateur qui nous manipule, nous bouscule, on avance, on recule, on découvre des références cinématographiques, quelques références philosophiques. Mais cela n'a rien de pompeux. Est-ce le récit d'un réalisateur, un scénario pour un film, un récit familial avec des faux frères ou vrais frères. Qui est ce narrateur, un marionnettiste, un réalisateur en train d'écrire un film, un homme vieillissant qui nous raconte l'histoire de sa famille.
J'ai aimé me perdre dans les méandres de ce roman récit. Tout est entremêlé dans ce texte, des descriptions de scenarii de films avec des faux-vrais acteurs, des demi-frères, des petits fils, des énigmes, des valises mystérieuses, des carnets de moleskine qui pourraient nous éclairer. on a l'impression d'être devant un écran et de ne pas saisir le scénario et les liens entre les personnages. Paradoxalement, on pourrait être perdue et se lasser. Eh bien non, on continue à lire ce livre envoûtant et on veut voir jusqu'on ira l'auteur et si on va comprendre et ne pas se perdre dans ce labyrinthe cinématographique, philosophique.
« Chère Else,
Je dois bientôt m’en aller, partir. Vous quitter. C’est la dernière nuit que je passe en tête à tête avec votre absence. C’est là, je le sais, toute la compagnie que je recevrai jamais de vous. Demain, je serai de retour au front. Je n’ai jamais pu mentir devant vous. Je m’avance sur un chemin où, dans quelques heures, à l’instant peut-être où vous lirez ces mots, je me serai déjà franchi. »
Ce premier paragraphe à peine terminé, je suis conquise.
Un lieutenant allemand, peintre, ayant vécu à Paris jusqu’à la mobilisation écrit une lettre à Else, une femme plus fantasmée que réelle rencontrée une seule fois.
« Vos pensées comme vos nuits me sont inconnues. Je ne vous connais que de loi et, pourtant, depuis notre rencontre à Paris, vous m’êtes devenues plus intiment liée que mon propre souffle. Vous êtes apparue sur mon chemin en l’ouvrant à sa plus secrète sente. »
Cette lettre, la recevra t'elle, la lira t'elle alors que le lieutenant Heller se prépare à partir à l’assaut au lever du jour. Il sait qu’il n’en sortira pas vivant. Cette assurance le pousse à parler d’amour d’intériorité, de dévoiler ses pensées à Else qu’il sublime en Orphia.
En chaque homme, madame, est une intensité errante qui recompose, femme après femme, le visage d’une seule. Inaccessible. Cruellement proche. Chacune d’entre elle la lui rappelle. Toute lui sont un exil.
Ce livre écrit « A la mémoire d’Alain-Fournier » qui fut l’idole de mon adolescence, est poésie et beauté. Tout comme l’auteur du Grand Meaulnes, il sublime une femme juste rencontrée et en fait LA femme, L’AMOUR. Lorsqu’il parle d’Orphée, l’ordonnance du lieutenant, qu’il prénomme Orphée, Pierre Cendors rend hommage à tous les poètes et artistes morts aux combats, qui ont donné des textes magnifiques.
Si les mots savent habiller nos sentiments et nos pensées, ils échouent à nous mettre à nu. La nudité de l’être use leur étoffe jusqu’à atteindre une transparence peu dicible.
La poésie, madame, c’est désimaginer le monde tel qu’on nous le vend. C’est découvrir qu’il n’est rien et que s’en éveiller est tout.
Un livre que j’ai pris plaisir à déguster, émerveillée par la richesse, la poésie du texte, retournant en arrière, juste pour le plaisir d’une phrase. Pierre Cendors, à travers le narrateur, interpelle sur la liberté, l’absurdité de la guerre.
Je n’avais pu entrer dans son précédent livre, « Archives du vent », le cinéma n’est pas mon domaine de prédilection, mais l’écriture de Pierre Cendors m’avait interpellée. Ravie d’avoir réitéré avec « Minuit en mon silence »
Le Tripode a encore fait mouche Je suis en manque de mots pour en parler et ne saurais dire que cela : c’est tragiquement beau, lisez-le, c’est un gros coup de cœur pour moi.
Petit plus, le soin apporté au livre ; la très belle couverture, porte d’entrée du livre, est une création de l’auteur
La poésie fait un poème de tout, madame, de la vie, du hasard, même de la mort d’un soldat. Un poème écrit avec son sang. Je ne souhaite à personne d’être poète. Votre vie ne vous appartient pas plus que votre mort. On vous croit le plus libre des hommes, mais c’est une liberté dont on ne s’évade pas.
Ses yeux parlaient le langage de mon silence. Ils m’aidaient à voir en moi-même. Peut-être notre vérité nous éclaire-t-elle toujours ainsi par le regard des autres.
Pourquoi est-il si difficile d’entrer en soi si c’est là, paraît-il que nous sommes ?
Existe-t-il ici-bas une liberté qui rend libre ?
Un jour, lieutenant, vous m’avez demandé pourquoi je m’étais engagé et ce que j’étais venu chercher dans cet enfer. La dévastation m’a conduit à cette guerre. Je n’ai pas besoin de vous dire que peu en reviendront. Et ceux qui en réchapperont seront tombés d’une autre manière. Moi, je suis tombé bien avant. Au moment de mon arrivée, je portais le deuil de mon enfance. J’avais vingt ans. Il était minuit en mon silence.
"Mettre en lumière le langage de l'obscur".
Faire naître de l'invisible et des ombres une autre réalité que celle du monde où nous vivons.
Renouer avec l'autre partie de nous-mêmes bien plus révélatrice de qui nous sommes mais ensevelie sous la sédimentation du quotidien.
Pierre Cendors nous offre cet instant dans un texte hypnotique et sublime comme le regard magnétique et profond de l'actrice Louise Brooks, l'ange noir, qui semble sonder notre âme.
"Archives du vent", la seule lecture du titre est déjà prometteur du charme terrible de ce livre : saisir l'impalpable.
" Dans ce monde devenu tout à coup immobile, je crus entrevoir l'essence de la beauté. Elle était là, devant moi : fragile banquise d'un instant, pure flottaison de l'âme sur les hauts-fonds d'un mystère. La contempler ainsi dans sa nudité assouvissait un désir de sacré, qui dans le même temps, se révélait inextinguible".
"Le marcheur du vide", " ouverture au noir", "le cabaret du néant" sont des exemples de titres de chapitres qui sont révélateurs de l'emprise très forte d'emmener le lecteur vers une frontière de plus en plus floue entre la réalité et un autre réel possible, vers une autre dimension où le vrai et le faux s'éteignent.
L'écriture et le cinéma des années 30 et 50 s'imbriquent naturellement dans ce roman très singulier à la fois métaphysique et réaliste construit autour d'une énigme qui s'apparente à une enquête policière.
Egon Storm est un réalisateur islandais reconnu mondialement par son invention technologique révolutionnaire, le Movicône : faire jouer ensemble des acteurs disparus dans des films qu'ils n'ont jamais tournés.
Rattrapé par sa célébrité, cet homme solitaire et adepte de chamanisme se réfugie dans les terres les plus éloignées d'Islande, là où le ciel rejoint la mer.
Dans une cavité rocheuse seulement recouverte à marée haute, Egon Storm y puise l'inspiration. Il a aussi de puissantes visions qui le ramènent à un homme mystérieux, Solness.
Je ne dévoilerai pas plus l'intrigue car tout réside entre les lignes des feuilles blanches et les séquences en noir et blanc du cinéma muet.
J'ai lu le livre, j'ai vu un film , c'est un pur plaisir.
Je ne peux que répéter mon enthousiasme à lire "archives du vent". J'ai été surprise par la tournure des évènements et complétement envoûtée par son imaginaire très séduisant.
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